5.

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C'est avec une boule au ventre que je pars de chez moi ce matin.
Le chemin jusqu'au lycée ne change pas, et pourtant, aujourd'hui, il me parait beaucoup plus court.
Je ne veux pas y aller. J'ai peur. Et je sais que c'est déraisonnable car, concrètement, je n'ai aucune raison d'angoisser. Mais dans mon esprit il y en a et je ne peux rien faire pour empêcher mon angoisse de s'accroitre.
Je pédale le plus lentement possible, mais j'arrive tout de même au lycée sans aucun mal. J'ai tout juste le temps de passer prendre mes affaires dans mon casier et d'arriver devant la salle que la sonnerie retentit.

Une heure de français, une heure d'anglais, et je rencontre Constance. Ce sont les deux plus longues, et pourtant trop courtes, heures de ma vie. Car, même si j'appréhende les heures que je vais devoir passer avec cette totale inconnue, je ne peux empêcher ma curiosité de se questionner sur cette fille. À quoi ressemble-t-elle ? L'ai-je déjà croiser ? Que pense-t-elle de ces cours ? Tout me passe par la tête, et j'ai de plus en plus de mal à faire arrêter ce déferlement de questions.

La sonnerie avant la pause de 10 heures retenti et je me dirige doucement vers la salle de permanence, après voir déposé et repris certains manuels dans mon casier.
Je suis seule dans la salle, ce qui est normal en sachant que c'est la récréation et que la plupart des élèves sortent pour parler à leurs amis.
Plus que quelques minutes avant que Constance arrive, avant que je sois fixée sur cette inconnue. Mon stress est à son paroxysme et ma curiosité également, donnant un mélange étrange. J'ai l'impression d'être une enfant qui a peur de recevoir un cadeau de noël inintéressant.

La cloche marquant la fin de la pause sonne enfin, et quelques personnes rentrent en petits groupes dans la salle de permanence avant de s'y installer bruyamment.
Je sors ma trousse et mes manuels lorsque je vois une fille d'environ mon âge entrer. Elle regarde partout avant de me repérer puis de s'avancer vers moi, un sourire sur le visage.
" Tu dois être Juliette ?
- Euh, oui c'est ça, et tu es donc Constance ?
-  Bonne conclusion, dit-elle avant de tirer la chaise qui est à mes côtés et de s'y assoir. Je souris un peu, assez impressionnée, sans vraiment savoir pourquoi. Bien, on m'a un peu forcée à être ici... J'imagine que c'est pareil pour toi.
- Ah oui, on... m'a pas du tout laissé de choix, dis-je en me rappelant des paroles du Proviseur.
- Je suis désolée, c'est de ma faute, si t'es obligée d'être la. Mais bon, c'est pas comme si je voulais y être aussi, s'esclaffe-t-elle.
- C'est pas grave... Hm, tu voudrais travailler quelque chose en particulier ?
- Maintenant ?
- Bah, on est pas la pour jouer aux échecs.
Elle lève la tête vers moi pour me regarder plus attentivement puis esquisse un sourire.
- Je vois. T'es en quelle classe ?
- En Première L1 et toi ?
- Première L2... Je ne t'avais jamais croisé avant.
- Je suis assez discrète, ça doit être pour ça.
- Ah bah, oui sûrement. Tu es bonne en quoi ?
- Franchement à peu près tout. Sauf la SVT, pour ça tu ne pourras pas compter sur moi, je dis d'une mine dégoutée.
- La SVT, c'est mon truc ! Par contre, le Français, c'est pas vraiment ça.
- C'est assez embêtant pour une L... Alors j'imagine qu'on peut commencer par ça. Vous faites quoi, en ce moment ?
- Je pense que tu comprends pourquoi on est assise la maintenant, alors, dit-elle en levant presque les yeux au ciel. Euh, je on est sur le théâtre en ce moment, Molière et compagnie. On a commencé il y a pas longtemps et pour mercredi j'ai un commentaire à rendre mais je suis coincée sur la deuxième partie de mon plan."

Et c'est comme cela que, pendant deux heures, on a rédigé un commentaire sur Dom Juan.
Je ne me suis jamais autant sentie soulagée qu'à la fin du cours. Pourquoi avais-je tant angoissé ? Il ne s'est absolument rien passé et on a peu parlé de nous. Je n'ai pas eu à faire la discussion, donc je peux réellement dire que tout s'est bien déroulé. Ce n'est pas une si grosse et horrible corvée.

Ce soir, en sortant du lycée et avant de rentrer chez ma mère, je vais dans la forêt pour me décontracter légèrement car ce lieu m'apaise. Cela fait du bien de penser à autre chose qu'à Constance, qui n'est donc plus une inconnue. Cette fille est restée dans ma tête durant tout une semaine, et je me sens si légère maintenant que je n'ai plus à m'en faire sur elle et nos cours du lundi matin. C'est encore plus grand qu'un soulagement.

Lorsque j'entre chez ma mère, je la vois assise sur une chaise de la table du salon, probablement en train de corriger des copies.
Le lundi, elle finit tôt les cours, vers quinze heures il me semble, alors lorsque je rentre elle est déjà la. Je déteste cela car cela veut dire qu'au moment même où j'arrive, je dois parler et l'écouter, sans que je puisse me reposer seule dans ma chambre, un livre dans les mains.
J'enlève mes chaussures et l'embrasse sur la joue avant de me prendre un paquet de gâteaux dans le placard. Des gâteaux bio, évidemment.
Ma mère me raconte sa journée, rien de  bien passionnant, et me demande comment s'est passé la mienne, comme tous les soirs. Mais cette fois ci, chose complètement rare et inhabituelle, je la lui raconte réellement. Tout, sauf la forêt évidemment. Les cours, Constance, ce qu'on a fait, comment cela s'est passé. Je ne sais même pas pourquoi je l'ai fait, sans doute que j'avais besoin d'en parler, pourtant je ne vois pas pourquoi. Peut-être pour évacuer complètement tout ce stress qui fut inutile.

Je monte dans ma chambre, jusqu'au diner puis y remonte lorsque ma mère a fini de raconter tous les petits détails de sa vie. Rien de changeant, cette fois ci.
Je m'endors plus tôt que d'habitude, fatiguée de toute cette angoisse accumulée tout au long de cette semaine.
Maintenant je peux relativiser. Un cours par semaine, c'est-à-dire deux heures tous les sept jours, remplies par des exercices, des commentaires et des leçons. Pas de discussions. Pas de stress.
Ce n'est pas un simple cours qui va changer quelque chose dans ma vie.

⭐️

Et voila, le chapitre 5 est posté.
Alors la, concrètement je sais qu'il est pas top. Mais je devais insérer Constance en douceur, pour ne pas aller trop vite, voyez-vous.
Bref, j'espère que ca vous a quand même plus :)
N'hésitez pas à voter et à me laisser un avis, ça m'encourage beaucoup.
Merci énormément pour les 500 lectures, je sais que pour beaucoup de monde ce n'est pas grande chose mais pour moi cela signifie pas mal !

-Marie
@halstonradio sur twitter

La cinquième saisonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant