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Départ en force.

Avec ce sac trop lourd sur mon épaule droite, car je suis droitière pour porter, j'évite d'avoir le sac qui frotte ma cicatrice. Elle a toujours été là. En tous les cas, je ne me rappelle d'elle depuis toujours et de rien avant. Ils m'ont dit qu'ils la feraient enlever, peut-être un jour ; quand je dis « ils », je parle de mes parents bien entendu. Mais je le sais depuis longtemps, les parents pensent toujours à bien trop de choses pour finalement n'en faire aucune. Du coup, je me suis habituée à cette cicatrice.

Je suis la première d'une longue lignée d'enfants. Quoi qu'ils en disent, quand je dis « ils », je parle de mes parents bien entendu, la longue lignée s'est arrêtée après mon unique frère et ce n'est certainement pas parce que nous étions une grande réussite. Ce petit avorton tient plus du troll et moi du zombie. Je me sens nulle, en tous les cas différente de leurs grandes espérances.

Quelle veine aussi de naître avec une cicatrice qui ne vient même pas d'un super méchant que personne n'ose combattre. Quelle veine d'avoir des parents en constante dispute puis divorcés. J'ai souvent eu l'impression que  c'était écrit dès ma naissance, que c'est entièrement moi et ma cicatrice tout ce chaos. Enfant, j'aimais qu'on m'appelle Elshara, une monstrueuse âme en peine qu'il fallait délivrer dans un des jeux de mon enfance. J'ai toujours imaginé que son cœur était fait de pièces cousues formant sur le côté gauche une cicatrice semblable à la mienne. Mais le temps a fait de moi la tyrane Taghia.Aujourd'hui, Taghia va rendre sa place à Elshara le coeur brisé, fille pleine d'espoir.

Mon anniversaire est pour bientôt. Qu'il puisse me soulager de ces nombreuses années durant lesquelles on a maintenu ma tête sous l'eau. Mais ça risque fort de ne pas marcher, à cause de la cicatrice, à cause de la douleur et parce que je suis une zombie et pas une humaine.

« Ca va bien ? » « Pourquoi tu ne souris pas ? » « Tu es si blanche ! », je déteste ces questions que les humains posent toujours pour que je leur fasse croire qu'ils ont résolu mon problème. L'echo résonne encore dans ma tête. Tiens, non, un homme qui m'interroge : "Madame, ça va bien ?"

« Oui, ça va »

« Vous êtes sûre ? Faites attention avec votre tablette, un accident ou un vol sont si vite arrivés. Vous devriez la mettre dans votre sac »

« Oui, oui. »

Je lui pardonne son incursion condescendante au moment où il remarque que mon sac n'est pas bien fermé tant il est plein et qu'il se sent un peu ridicule. C'est décidé, je prendrai le taxi jusque la gare. Ma cicatrice me fait délicatement souffrir.

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⏰ Last updated: Mar 27, 2017 ⏰

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Une princesse kidnappée par un ThugWhere stories live. Discover now