Chapitre 18

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Je vis ma sœur, Alix. Elle me regardait. Je ne la reconnaissais presque pas, elle avait tant grandi. C'était maintenant une jeune femme. Elle avait de longs cheveux bruns comme les miens mais en plus brillants, plus soyeux. Ils encadraient son visage d'ange. Il avait encore les légères rondeurs de l'adolescence. Ses joues étaient teintées de rose, ses grands yeux marron, comme les miens me regardaient avec amour. Elle me souriait innocemment, le même sourire qu'enfant, celui auquel on ne pouvait dire non.
Elle était légèrement plus petite que moi et me tendait la main. Je la regardais, fascinée. Je n'en pouvais croire mes yeux. Je restais immobile sous le choc. Elle était sublime et elle m'avait tant manquée. Mon cœur était serré face à elle. Ma sœur, ma beauté, mon amour, je pouvais la voir, peut-être même la toucher! Je pourrais la fixer comme ça pour le reste de ma vie sans me lasser.

Je détournai mon regard pour observer le reste et je restai stupéfaite. On était dans notre chambre d'enfant. Je reconnaissais notre vieille tapisserie bleu pâle, nos deux lits placés côte à côte, la maison de poupée près de la porte et la grosse armoire qui nous faisait peur lorsqu'elle était entrouverte la nuit.

Je la regardais, perplexe. Que voulait-elle qu'on fasse ici? Je tendis ma main à mon tour en tremblant, peut-être allait-elle disparaître lorsque je la toucherai? Je priais et effleurais ses doigts. Je déglutis et plantai mon regard dans le sien. Elle me rassura d'un sourire et me prit entièrement la main. Je sentis sa peau douce contre la mienne. Je ne pouvais détacher mon regard de nos mains jointes, ça ne pouvait être réel pourtant je la sentais tout contre moi me réchauffant la paume. Elle me tira vers la sortie et on se retrouva dans le couloir qui menait d'un côté à la salle de bain et de l'autre au salon et à la chambre de mes parents. Il était sobre, tout de blanc avec pour seul couleur le meuble à chaussures en bois. On n'avait jamais su quoi mettre d'autre pour le rendre moins morne.

Elle ne s'arrêta pas là et me tira presque en courant jusqu'au salon. Elle ouvrit la porte sans attendre et je redécouvris cette pièce. Elle était de taille modeste, peinte en gris et blanc cassé. Deux énormes bibliothèques se situaient dans le fond regroupant tous les ouvrages préférés de mes parents. Une éminente table en bois était au centre entourée de chaises assorties. Un canapé mauve se situait dans le coin opposé, face à une télévision éteinte, posée devant le balcon sur lequel poussaient d'innombrables fleurs et plantes.

Je faisais circuler mes yeux d'un bout à l'autre tentant en vain d'enregistrer ces images au plus profond de moi, comme pour m'en imprégner. Je ressentais un bien-être comme je n'en avais encore jamais ressenti, mais une part de moi était inquiète. Je détachai mes yeux de cette pièce pour admirer ma sœur qui avait les yeux fixés derrière moi. Je me retournai alors et mon cœur rata un battement.

Mes... mes parents étaient là, juste là, devant moi, me regardant avec un sourire. Eux, par contre n'avaient pas changé. Mon père était toujours aussi grand avec ses cheveux bruns et ses yeux bleus et ma mère, toujours aussi belle avec ses longs cheveux noirs et ses yeux marron. Ils s'avancèrent vers moi d'un pas. J'étais tétanisée, je voulais courir et sauter dans leurs bras mais tout cela me semblait si irréel.
-Ma... maman... papa? Chuchotai-je d'une voix entrecoupée.
Ils hochèrent la tête.
Je fondis en larmes et me couvrais le visage. Je ne pouvais y croire. Cela faisait si longtemps, mon cœur allait exploser. J'étais partagée entre la joie et le chagrin. Je sentis une pression sur mon épaule. Je redressai la tête et je me retrouvai dans ce nuage bleu des yeux de mon père. J'allais le prendre dans mes bras quand j'entendis un murmure :
- On n'est pas seuls.
Je tournai la tête, les yeux écarquillés, ç'a avait été la voix d'Alix, une voix magnifique, cristalline mais enfantine ce qui me surprit à tel point que je sursautais et angoissais. Ce n'était plus une enfant... alors pourquoi? je regardais autour de moi, mes parents, ce salon, ce couloir. Rien n'était normal, je rêvais, ils n'étaient pas vraiment là. En faisant ce constat, ma mère, devant mes yeux, devint de plus en plus floue. S'ensuivit de même pour mon père puis ma sœur et tout le reste. Je pleurais encore davantage, tâchant de les retenir, de rester, de replonger dans le rêve, de ne pas les perdre encore une fois mais je fus plongée dans un autre décor, celui d'une salle de classe.

Le Témoin recherchéWhere stories live. Discover now