35. Night Zaïm

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Quand une femme te fascine, t'en deviens obsédé. 

Et quand t'es obsédé, tu deviens vulnérable. 

– Berlin

ℤ𝕒ï𝕞 𝕂𝕙𝕒𝕟

Khalti Salima – la mère de Yousr – m'a invitée à prendre le petit-déjeuner chez elle, avec comme excuse qu'on ne me voyait plus aussi souvent. Alors je me retrouve assis sur ses sederis, mangeant des baghrirs avec atay – du thé arabe – à l'écouter me dire à quel point je l'ai manqué et qu'il faudrait rapidement penser au mariage avec sa fille. 

Dans les situations comme ça, je reste silencieux. Je n'ai pas envie que ma voix trahisse le fait qu'il n'y aura pas de mariage, mais un enterrement à la place. J'aimerais lui dire de profiter de ses enfants tant qu'il en est encore temps, parce qu'après le braquage, khalti perdra sans doute toute sa famille. 

Rien qu'à l'idée qu'elle souffre seule, j'ai un pincement au cœur. Mais ma famille n'en tiendra pas rigueur. Après tout, Yousr Seghir ne vit que pour nous démasquer et nous tuer ou nous enfermer. 

Zakaria se tient droit en se raclant la gorge pour dire à sa mère d'arrêter de voir l'avenir de sa fille aussi loin. Je mets un peu de miel mélangé à du beurre sur ma crêpe et au même moment, la principale intéressée se pointe dans le salon, en s'étirant les bras au-dessus de la tête, l'air encore endormie. 

Ses cheveux sont attachés dans une queue-de-cheval qui ne tient plus debout. J'ingurgite difficilement en descendant plus bas les yeux, tombant sur un débardeur qui remonte lorsqu'elle lève les bras et son short de basketball descendant jusqu'aux genoux, qui laisse tout de même apercevoir ses belles jambes. 

Je m'imbibe les lèvres quand les scènes de notre soirée à Paris me reviennent en tête. 

Bon sang... 

J'ai réussi à échapper à cette misère quelques jours, mais aujourd'hui, tout risque de me replonger dans l'euphorie de cette soirée. 

Lorsque la belle demoiselle m'aperçoit, elle fronce les sourcils quelques secondes avant de lever les yeux au ciel pour aller s'asseoir à côté de son père qui a du mal à finir son assiette. Moi aussi, je commence à avoir du mal à la finir avec cette tension qui surplombe l'air. 

Khalti se lève soudainement un grand sourire aux lèvres.

─ Mourad, dis-moi ce que t'en penses... Yousr lève-toi et assieds-toi à côté de Zaïm.

Après mûres réflexions et le regard tueur de sa mère, celle-ci se lève à contrecœur pour s'asseoir à mes côtés, face à ses parents. Je suis au milieu de la fraternité Seghir. 

La cuisse gauche de Yousr touche la mienne sans le vouloir et mon cœur saute un bond comme chaque fois qu'elle s'approche de moi. Salima nous tuerait si elle apprenait les petits jeux de sa fille et de celui qu'elle souhaite voir comme son gendre.

─ Un mariage quelle couleur ? Demande-t-elle à son mari.

─ M'man ça commence à devenir lourd cette histoire de mariage, soupire Yousr.

─ Parle mieux à ta mère.

─ Quand elle arrêtera de vouloir me caser avec n'importe qui !

La pièce s'assombrit dans un silence où seules les ténèbres de Yousr se déchantent. Je tourne ma tête vers elle afin de constater la moindre émotion, mais je ne suis accueilli que par de la colère. Je ne comprends pas ce changement d'attitude, elle qui quelques jours plus tôt était super proche de moi. 

𝐒𝐀𝐑𝐐𝐀𝐍 | 1 et 2 |Where stories live. Discover now