6. Voyage en Inde (1) : rencontres et retrouvailles

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Le premier samedi du mois d'aout, le cœur serré, Kilian était une dernière fois allé voir Cédric avant son voyage en Inde. Le vol était prévu dans l'après-midi. Si l'état du jeune adulte ne s'aggravait pas, il ne s'améliorait malheureusement pas non plus, ce qui était bien le plus dur à vivre pour ses proches. Sur la chaise à côté du lit, le blondinet laissa la peluche rose que lui avait offerte Aaron et promit de revenir la chercher très vite. Même si Cédric ne l'entendait pas, il tenait à le rassurer. Ce n'était pas un abandon, juste un léger retrait pour se vider la tête.

Depuis la fête foraine, il s'était écoulé deux petites journées pendant lesquelles les amoureux avaient trainé avec des copains, fait un tour chez Gabriel de passage entre deux voyages pour un petit dessin sur le fil, regardé des films sur le PC, écrit un peu – pour Aaron – et fait quelques parties de « devine c'que c'est », un jeu inventé par le brunet qui consistait à bander les yeux de son Kilian immobilisé puis de lui glisser dans la bouche toutes sortes d'objets, aliments ou parties du corps humain à retrouver. Chaque bonne réponse était récompensée d'une caresse sur la tête, et chaque mauvaise punie d'une tape sur les fesses. Le blondinet adorait ce jeu et ses quelques variantes, comme le « Strip devine c'que c'est », où l'effeuillage était de mise, le « Xtrème devine c'que c'est », dans lequel ce n'étaient ni ses lèvres, ni sa langue mais les parties les plus saugrenues de son corps qui devaient s'activer pour trouver les bonnes réponses, et bien sûr le « Not for Kids devine c'que c'est », qui concluait presque toutes leurs parties et qui n'avait plus grand-chose à voir avec le jeu de départ, si ce n'était que Kilian était attaché et qu'il était récompensé quand il trouvait la solution de l'énigme. Toujours la même dans cette version du jeu.

Comme prévu, Catherine, la mère d'Aaron, vint chercher son fils et le petit ami de ce dernier vers quatorze heures trente pour les conduire à l'aéroport. Ce voyage à trois lui avait été proposé par une amie qui l'avait déjà fait. Il consistait en un tour presque exhaustif du pays en quinze jours, transferts compris, en groupe d'une dizaine de personne avec un guide. Dans chaque hôtel, les trois voyageurs dormiraient dans la même chambre. Compréhensive, la mère de famille avait accepté de laisser le lit double à sa progéniture et au principal trophée de ce dernier, à condition bien sûr qu'ils n'y fassent rien d'autre que de s'y reposer.

De l'aéroport Saint-Exupéry de Lyon jusqu'à Orly, puis de Roissy jusqu'à Delhi, le voyage dura de nombreuses heures. Si Aaron était un habitué des longs trajets et avait une foi presque aveugle dans l'aviation comme mode de transport, Kilian, lui, ne volait que pour des sauts de puce d'un coin à l'autre de la France. S'il eut un peu peur lorsque de violentes turbulences firent trembler la carlingue, il apprécia tout particulièrement la télé privative en classe économie et le vaste choix de films qui lui étaient proposé. Le plateau repas et le manque de place entre les sièges, par contre, le déçurent particulièrement. Ce n'était pas bon et il avait mal au dos. Heureusement, Aaron accepta qu'il s'endorme la tête sur son épaule, ce qui lui permit d'avoir un sommeil presque agréable, quoique bien trop court pour un adolescent de son âge.

Une fois arrivés, après avoir patienté pendant un trop long moment à la douane, Aaron s'en alla récupérer les bagages en laissant Kilian grogner à côté de Catherine. Si la mère de famille appréciait vraiment le blondinet dont son fils était dingue, elle n'ignorait rien de son mauvais caractère au réveil. Une mise en garde résonnait dans son esprit :

« Des fois, il est un peu pénible, surtout quand il dort mal et qu'il est contrarié, mais sinon, il est trop chou. S'il t'embête, dis-le moi, je sais comment le calmer. »

Quelques secondes plus tard, le brunet revint avec un chariot plein de bagages puis, voyant l'air ennuyé de sa génitrice qui toussotait, déposa une légère tape sur le bas du crâne de son petit ami, saluée par un « Ouille ! Maieuh, j'ai rien fait d'abord ! » en plein milieu de l'aérogare.

CamilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant