Chapitre 8 ; Punition

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Le ciel était clair ce jour là, il faisait assez doux pour la saison, pourtant, l'atmosphère n'était plus aussi tranquille que dans son début d'après-midi. La tension était palpable alors que Yukine et Kabune attendaient en silence le retour de Daikoku, partit chercher un troisième Shinki, et Hiyori, arrivait quelques minutes avant que le drame ne se propage. La lycéenne avait reçu pour mission de retrouver Yato, dont personne n'avait plus de nouvelles depuis la matinée. La déesse de la pauvreté, quand à elle, tournait en rond, inquiète, ne supportant pas l'attente. Le jeune Shinki aux mèches d'or, lui, secouait sa jambe droite frénétiquement sans daigner lancer une regard à sa camarade, assise à côté de lui sous le porche. Kabune le fixait, attendant une parole de sa part, un reproche, de la colère, de l'inquiétude, qu'il lui fasse part de ce qu'il allait se dérouler à présent, mais rien. Le blondinet préférait rester murer dans le silence.
Il avait peur. Peur pour Yato. Peur pour elle. Yukine n'osait, en réalité se tourner vers elle seulement parce qu'il savait que si il avait agit, son amie ne se serait pas blessée, que le dieu aux yeux d'azur ne serait probablement pas agonisant dans une ruelle et introuvable. Il s'en voulait. Il s'en voulait énormément. Il aurait aimé revenir en arrière, ne pas laisser le choix à Kabune, prévenir les dieux et éviter tout cela. Mais voilà, au fond de lui, il savait, il savait pourquoi il n'avait rien fait. Serte, il avait souhaité laisser sa chance à la Shinki aux yeux de jade, lui laisser la chance de tout avouer d'elle même, de tout arranger seule, mais ce que le jeune blond voulait par dessus tout, c'était ne pas la voir punie. Ne pas savoir son malheur. Ignorer son mal être, ce qui l'avait corrompu. Non pas que le jeune garçon se moquait des sentiments de la brunette, non, loin de là. C'était un tout autre sentiment que l'indifférence qui le l'avait poussé à agir de la sorte. En réalité, la peur de se rendre compte qu'il était l'origine du mal de sa camarade l'avait paralysé. C'est pour cela qu'il avait espéré au fond de lui, que les choses s'arranges d'elles même, comme par magie.
Au final, la situation s'était empirée, et tout cela par sa faute. Maintenant, il n'esperait qu'une chose, que tout se termine au plus vite. Il ne se sentait pas prêt à affronter la réalité, la cause du mal être de Kabune. Il en était persuadé, il était la cause de son malheur. Pourquoi ? Comment ? Ça, il n'en savait strictement rien, mais ce regard qu'elle lui avait lancé, ses yeux le suppliants de s'éloigner, cette angoisse qui naissait en elle lorsqu'il restait trop longtemps à ses côtés. C'était une évidence, bien que ces faits se soient arrêtés il y a peu.
Alors que le soleil atteignait l'horizon, Daikoku fit son grand retour en compagnie d'une jeune femme aux courts cheveux de jais. Yukine l'a reconnu immédiatement ; Mayu. Ancienne Shinki de Yato avant le blondinet, la jeune femme, bien qu'aillant parfois du mal à supporter le dieu du désastre, tenait tout de même à l'aider de temps à autres, lorsqu'il en avait besoin. Daikoku fit signe aux deux jeunes de s'approcher. Kabune, peinant à se relever d'elle même à cause de sa blessure, le blondinet n'hésita pas à lui apporter son aide, afin qu'elle se mette sur pied.
« Eh, l'interpella la brune aux yeux émeraudes d'une petite voix peu confiante alors qu'il lui tendait la main, merci d'avoir gardé le secret... ( Elle grimaça de douleur alors qu'elle se penchait en avant pour poser pied à terre. ) Je n'ai pas réussi à respecter la promesse que je t'avais faite, elle souffla par la suite, une fois à sa hauteur, tête basse. »
De quoi parlait-elle ? Quelle promesse ? Alors que le blondinet la laisse passer devant lui en silence, il tentait de se remémorer les instants susceptibles d'avoir eu la forme d'une promesse. Mais rien ne lui vînt à l'esprit. C'est lorsqu'il s'arrêta à la hauteur de Daikoku et Mayu, aux côtés de la brunette , et que cette dernière demanda des nouvelles de Yato, que ses mots lui revinrent ; " J-je te promet de ne jamais faire souffrir qui que ce soit. Ni Yato, ni personne d'autre. Je te le jure."

Le grand Shinki fut formel, ils ne pouvaient attendre le retour du dieu au yeux d'azurs, il fallait purifier Kabune, et au plus vite, afin d'indiquer les soins approprier à la plaie béante sur son abdomen. La jeune femme aux courts cheveux de jais, bienveillante, conseilla à la jeune brune de bouger de trop malgré la douleur. Yukine, quand à lui, respirait bruyamment. Son souffle irrégulier trahissait son anxiété. Le jeune Shinki, contrairement à ses aînés, n'avait jamais punie qui que ce soit et cela l'effrayait quelque peu. Daikoku posa une main se voulant rassurante sur son épaule tremblotante avant de lui sourire.
« Tout va bien se passer Yukine, le réconforta-t-il, je te l'assure. »
Mayu, Yukine et lui, se placèrent donc autour de la brunette, sous le regard compatissant de Kofuku, observant la scène, sous le porche. C'est Daikoku qui débuta le monologue donnant lieu à l'ablution, clamant ses mots avec force et d'une voix claire ;
« L'esprit du défunt a abandonné sa dévotion au dieu Yato, et la protection du grand nom qui lui a été accordé.
- Élimine ses impuretés, et fais en une âme lumineuse, honnête et juste sans mauvaises intentions, continua la femme aux mèches couleur charbon.
- U-utilise ce rituel de purification pour le rendre pur... S'exclama alors le blondinet avec le peu de confiance qu'il aurait put trouver en lui à cet instant. »
C'est après avoir prononcer l'emprisonnement, que les frontières éblouissantes firent leur entrée. Enfermée entre trois murs scintillants de milles feu dans la nuit déjà sombre, Kabune se mit à hurler. Ses muscles se contractants, tiraillés entre l'envie de se tordre de douleur et sa blessure qu'elle ne devait pas aggraver, la brunette resta quelques secondes immobile, à agoniser dans un cris assourdissant. Malheureusement, l'envie surpassa le devoir et la Shinki aux pupilles émeraudes se recroquevilla sur elle même, serrant ses bras autour de son ventre, avec l'espoir de faire taire la douleur. Des petits cris d'agonie s'élevèrent alors, provenant de son abdomen.
Mais malgré ses plaintes, la brune restait muette, elle n'avait aucune envie de se confesser, aucune envie de révéler ce qu'il n'allait pas, tout ce qu'elle espérait c'est que tout s'arrête, maintenant. Voyant le silence dans lequel elle semblait vouloir se murer, Daikoku prit la parole ;
« Aller Petite ! Dis nous ce qui te tracasse !
- Tais-toi Daikoku... Réussit à souffler la brunette, entre deux piques de douleur.
- S'il te plaît Kabune, intervint Yukine, pense à Yato ! Pense... pense à ta promesse !
- Cette promesse à la noix est brisée ! Cracha-t-elle, se redressant subitement. Il ne sert à rien de penser à Yato, ni même à qui que ce soit d'autre ! Il finira par s'en remettre ! Quant à toi, moi, ou n'importe quel Shinki, nous sommes déjà mort ! Alors que pourrait-il nous arriver de pire, hein ?! Rien ! On nous a déjà tout enlevé ! Tout ! Absolument tout ! »
Les mouvements, bien trop brusques, que la jeune fille aux yeux de jade venait d'effectuer, eurent pour conséquence de faire saigner à nouveau abondamment la mutilation qu'elle s'était infligée d'elle même quelques heures plus tôt. Le liquide écarlate humidifiant petit à petit les bandages entourant la taille de la brunette, les fit bientôt dégorger, le laissant s'écraser sur la terre froide. Mais elle ignorait, délibérément, ou non, que son temps entre ces trois frontières était compté. Il ne fallait pas qu'elle tarde de trop a dire ce qu'elle avait sur le coeur car, à défaut de se transformer en Ayakashi, elle se vidait également progressivement de son sang.
« On nous a tout prit Yukine ! Nos souvenirs ! Notre vie ! Nous n'avons plus rien ! Elle continua, plongeant son regard dans celui de son camarde de l'autre côté du mur de lumière. Mais j'ai tenté de te rendre une partie de ce que l'on t'avait prit, à toi...
- Kabune ! ( La voix de Yato résonna alors dans la cours.) »
Tous se tournèrent vers sa provenance, tout aussi surpris que soulagé. Le brun aux pupilles azurs se tenait bel et bien là, appuyé contre Hiyori, lui servant, comme elle le pouvait, de béquille. Le pauvre était dans un piteux état. Il respirait difficilement et semblait pouvoir s'effondrer à n'importe quel moment. Hurler le nom de sa Shinki lui coûtait d'ailleurs beaucoup, mais il n'avait pas le choix, il fallait qu'il l'empêche de continuer. Elle s'apprêtait à corrompre malgré elle, non seulement Yukine, mais tous les Shinkis présent ici même. Ouvrant, au passage, une brèche au secret des Dieux, fatal, inavouable. Il n'allait pas laisser cette tragédie se reproduire, il en était hors de question.
« Kabune ! Reprit-il, utilisant le peu de force qu'il lui restait. Tu peux te recréer des souvenirs ici, avoir une nouvelle vie parmi nous tous ! Je t'ai offert une seconde chance ! Tu ne peux plus faire partie du monde des vivants, mais tu peux faire partie du nôtre à présent !
- Yato... murmura la jeune brune sans le quitter des yeux.
- Considère nous comme tes nouveaux amis ! Considère nous comme ta nouvelle famille ! Continua le brun, quelque peu essoufflé. Et vie ! Vie une nouvelle vie à nos côtés ! »
Des larmes se mirent à perler le long des joues rosies par le froid de la brunette. Ses bandages, trop humides, ne pouvant plus tenir contre elle, commençaient à se détacher de sa peau de couleur mêlant rouge et mauve. La douleur était devenue obsolète. Elle ne pensait qu'à écouter ce que le dieu aux yeux bleus avait à lui dire. Elle ne pensait qu'à lui répondre, qu'à se justifier.
« V-vous êtes déjà mes amis, sanglota-t-elle, vous êtes déjà ma famille... C-c'est pour ça que je ne supporte pas que l'on puisse vous éloigner de moi... qu'il ait put vous arriver malheur, que ce soit maintenant, ou dans le passé. ( Elle baissa la tête, serrant les poings sur ses collants filés par ses contorsions de douleur. ) Oui, c'est bien moi qui ai jeté le portefeuille dans la friteuse ! J'étais jalouse ! Jalouse de cette fille qui avait tout ce que moi, je n'avais pas ! Jalouse de cette fille qui semblait vouloir me prendre tout ce qu'il me restait ! J'étais jalouse... jalouse parce qu'elle s'approchait trop de toi, Yukine... ( À ses mots, elle leva vers ce dernier une mine confuse, puis détourna les yeux vers Yato, s'étant rapproché du centre de la cours au côtés d'Hiyori. ) M-mais par dessus tout, Yato, malgré tes avertissements et tes tentatives de dissuasion, j'ai continué à n'en faire qu'à ma tête ! Je t'ai désobéis, j'ai volé, j'ai caché la vérité et j'en suis désolée... Je vais me rattraper ! Je t'écouterais, je ne te ferais plus souffrir ! Et je ne forcerais plus Yukine à mentir pour moi... P-pardon ! Je suis désolée ! »
Alors que tous soufflaient enfin leur soulagement, les frontières de lumières laissèrent leur éclat s'estomper dans la pénombre, les laissant dans une obscurité à peine éclairée par les lampes jaunes de la maison non loin. La douleur disparu en même temps que la clarté, mais à cet instant tout de même, Kabune laissa son corps percuter le sol gelé. Le froid l'envahit alors que sa force semblait s'en aller. Grelottant, elle laissa ses paupières se fermer sous leur étrange et soudaine lourdeur.
Avant de sombrer dans le néant, elle entendit des voix affolées affluer autour d'elle, et des visages, des visages flous, mais familiers et inquiets se pencher tout prêt. Elle était pâle, très pâle. Les couleurs chaudes habitant sa peau en temps normal, semblaient avoir quitté son corps en même temps que son sang, s'éparpillant toujours sur le sol, décollant toujours ses bandages.

Un Second Shinki [Noragami]Where stories live. Discover now