Les Bêtes d'Eldritch, première partie

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Elle tentait de fuir le monstre, poursuivie dans un couloir obscur, tandis que la tempête sifflait, lui vrillant les tympans. Sur les murs, les barbelés rampaient comme des milliers de serpents. Quelque chose lui attrapa la cheville, la faisant tomber à terre. Elle se retourna et se retrouva face à face avec le monstre, leur deux visages à quelques centimètres l'un de l'autre...

Elizabeth cria en se redressant brutalement sur son lit, et regarda frénétiquement autour d'elle. Pas de monstre, pas de barbelés, juste une chambre dans la pénombre, malgré la lumière du Soleil traversant les rideaux. Elle pouvait deviner la forme de ses meubles et les murs de la large pièce. Pas de barbelés ni de tempête, rien de menaçant.

Encore un cauchemar. C'était le troisième en trois nuits, depuis qu'elle avait survécu à l'horreur et quitté ce château. Rien de surprenant à ce qu'elle ne s'en soit pas encore remise. Elle releva sa chemise de nuit et regarda la marque grise en forme de cercle sur son ventre, signe que sa vie ne lui appartenait désormais plus.

La porte face à son lit s'ouvrit, et une jeune fille aux cheveux bruns entra, et s'approcha du lit, puis s'assit à côté d'Elizabeth.

"Je t'ai entendue crier, c'est encore un cauchemar ?" demanda Janet.

La jeune fille se contenta d'acquiescer. Alors sa camarade la prit dans ses bras.

"Tout va bien ma chérie, c'est fini. Tu sais que, malgré notre maître, tu es en sécurité ici ".

En même temps, Alicia entra dans la pièce, suivie de Kyoko. En voyant le visage encore pâle de leur nouvelle camarade, les deux jeune filles lui firent de grands sourires et vinrent la rejoindre. Elizabeth était devenue la plus jeune de toutes les servantes du Faiseur de Larmes, avec au moins deux ans de retard sur toutes les autres et lors de son arrivée, trois jours plus tôt, elle était en larme, paniquée, ses vêtements tâchés de sang. Pour ces deux raisons, les autres filles l'avait prise en affection, la considérant comme une sorte de petite sœur. De plus, le statut d'esclaves d'Eldritch créait un lien très fort entre elles et elles considéraient toutes comme normal, voire indispensable, de dorloter les nouvelles. Elles l'avaient fait pour Kyoko, pour Camille, pour Lila, et maintenant, elles le faisaient pour Elizabeth.

Un Sans-visage entra dans la pièce, portant un plateau avec un petit déjeuner. Les Sans-visages étaient les domestiques d'Eldritch Castle. Ils étaient humanoïdes, habillés en laquais, portaient un masque blanc inexpressif sur le visage et obéissaient à tout les ordres. Ils ne parlaient pas, ne réagissaient qu'à certains ordres, ne semblaient pas avoir besoin de manger ou de se reposer, et étant donné qu'ils étaient tous identiques, leur nombre même était inconnu. Les filles n'avaient jamais pu savoir s'ils étaient des êtres conscients, juste des pantins de chair ou même des machines. Dans le doute, elles s'abstenaient de les maltraiter.

Les autres jeunes filles attendirent qu'Elizabeth aie fini son petit-déjeuner, puis descendirent dans la salle principale. Elizabeth se surprit à comparer ce château avec celui dans lequel elle avait failli laisser la vie. Celui-ci était clairement plus beau, avec ses murs de cristal, parfois teinté, qui coloraient la lumière du Soleil, ses meubles ciselés, ses sols de bois clair... C'était littéralement un palais de conte de fée, mais celui qui l'occupait n'en était pas une, loin de là.

Dans l'un des salons, les filles retrouvèrent Lila, en train de lire un journal venu de France, son pays natal. Eldritch avait des journaux venant de treize pays différents, et souvent avec un seul jour de retard, aucune de ses servantes ne savaient comment il se les procurait.

"Où est Camille ?" demanda Alicia.

"Je crois qu'elle dort encore", répondit Lila en levant les yeux, et en souriant à ses camarades.

Le Faiseur de larmesWhere stories live. Discover now