Chapitre 17: Emporté par le vent comme de la fumée de cigarette

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Lorsqu'au petit jour les doux rayons du soleil vinrent se profiler au travers des branches broussailleuses des arbres qui maintenaient Briarcliff dans son petit écrin de verdure, les deux amants étaient toujours enlacés, l'un contre l'autre serrés dans leur canapé trop étroit et trop usé. Ils s'étaient endormis là, incapables d'aller plus loin, ne désirant pas se séparer ni briser le lien qu'ils avaient tissé et qui les avait uni ce soir là, durant cette soirée si... magique. Cette dernière soirée passée ensemble, ils l'avaient savouré jusqu'au dernier moment, profitant de chaque seconde pour ancrer dans les profondeurs de leurs esprits ces dernières sensations, avant leur séparation définitive et plus qu'imminente. C'était à la fois beau et tragique, comme dans les vieux films en noir et blanc où on pleure à la fin, c'était beau comme un jour de pluie qui défile à travers la fenêtre un dimanche d'automne, tragique comme la mort de la dernière rose du bouquet posé en évidence sur la table dressée d'un repas de famille. Ces petites choses parfois anodines, ces petits rien auquel on ne prête pas d'importance mais qui d'une manière ou d'une autre rythme notre quotidien et nos vies..

Et dans cette douce matinée de mi-avril, ces deux jeunes hommes semblables à deux anges tombés du ciel, dégringolant d'une ribambelle de nuages, s'éveillèrent en simultané alors que la clarté du dehors venait baigner leurs visages aux yeux clos. Il leur fallut quelques secondes pour se remémorer tout ce qui s'était passé le soir dernier, et quelques autres de plus pour se détacher doucement du corps de leur vis-à-vis afin de se relever de leur lit improvisé.

Leurs membres encore ankylosés par l'effort de la veille semblaient luirent sous la pâleur des rayons, ils firent craquer les articulations de leurs doigts, s'étirèrent en baillant et frottèrent leurs yeux assaillis par la luminosité. Aucun mot n'était sorti de leurs lèvres pâteuses, sans doute leurs voix cassées par les cris et les gémissement peinaient à franchir la barrière de leurs bouches. Ils n'osaient se regarder droit dans les yeux tant leur séparation leur pesait, leurs cœurs semblaient écraser leurs cages thoraciques.. Quelque chose avait changé dans leurs yeux, ils semblaient être plus nuageux, moins rayonnants, l'étincelle avait comme disparu.

-Ellipse-

Quelques heures s'étaient écoulées depuis leur lourd réveil, Thomas avait laissé son âme-sœur faire ses valises pendant que lui allait prendre l'air dans le grand jardin, il avait besoin de se recueillir quelque part avant le grand départ, il avait besoin de ce calme environnant pour ne pas craquer quand le moment viendrait.. Alors qu'il semblait lutter intérieurement pour faire le vide en lui, Maxime sortit lui aussi dans la cours et s'approcha à grandes enjambées du petit bouclé occupé à faire le tris dans ses pensées. Il vint s'assoir à ses cotés alors que le plus petit n'avait même pas encore remarqué sa présence, avec une approche mesurée il posa lentement sa main sur l'épaule de son ami. Ce dernier eu un violent sursaut et sortit immédiatement de son état second, regardant de ses yeux trop grands son vis-à-vis, effaré. Celui-ci paraissait profondément désolé, meurtri même de l'apitoiement du garçon à qui il faisait face, avec un triste sourire il parvint à articuler quelques mots brisés par une certaine émotion :

« Je suis désolé Thomas, sincèrement désolé pour tout ce qu'il t'arrive.. Je pourrais te dire que je comprend ce que tu ressens mais..

-Non tu ne sais rien ! Rien du tout de ce que j'éprouve, rien du tout de ce que j'endure, tu ne connais pas cette douleur, pas cette souffrance, pas cette rage qui te dévore et qui pourtant t'empêche de faire quoi que ce soit ! Tu ne sais pas ce que c'est de se sentir au pied du mur, impuissant et seul au monde ! Putain mais arrête de faire comme si tu t'intéressais réellement à moi bordel ! JE SUIS PLUS RIEN TU M'ENTENDS ?! PLUS RIEN ! s'emporta le bouclé, un torrent de larmes dévalant sa peau blanche et livide. »

Ils se dévisagèrent longuement, impassibles, et puis, dans un élan de tendresse et d'affliction, Maxime entoura doucement les épaules frêles de son ami et le serra contre lui, Thomas ne su comment réagir, et à l'entente des mots qui s'en suivirent il se sentit encore plus désemparé.

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