La Fille Et Le Meurtrier

19. Retour à la maison

La semaine passe lentement. Très lentement. Ni Lenny, ni Zack ne daigne montrer le bout de son nez. C'est normal pour le premier mais je ne comprends pas la fuite du second.

Aurais-je fait quelque chose de mal ? Je ne pense pas mais comment savoir ? Si seulement je savais lire dans les esprits...

Je fais les cent pas à chaque fois que je rentre de cours. C'est insupportable, cette attente.

Pdv : Lenny

Je me demande ce qu'elle fait. Je ne m'inquiète pas. Je sais qu'elle peut se débrouiller. C'est ce qu'elle faisait avant. Mais je me demande comment elle supporte la solitude.

-Lenny ? Tu te sens bien ?

-Je serais mieux dehors Gray.

Il me regarde avec compassion. Il est là depuis un mois. Pile dans la cellule d'en face.

-Tu sais, la gamine qui t'a rendu visite, fait-il sans avoir l'air d'y toucher.

-Oui ?

-Elle est plutôt mignonne. C'est quoi son p'tit nom ?

Je soupire bruyamment. Autant il est sympathique, autant, dés qu'il est question de filles, il devient malsain.

-Rachel.

Il passe sa langue sur ses lèvres et je ne peux empêcher mes poils de se hérisser.

-Tu crois que j'ai une chance ?

Je serre les dents et retient une insulte. À la place, je murmure :

-Elle a 12 ans.

Aussitôt, ses yeux, qui brillaient quelques secondes plus tôt, redeviennent ternes.

-Trop vieille...

Un frisson me parcourt. Sérieux, ce mec me fait peur.

-Pourquoi t'es là déjà ?

Il sourit et il met un doigt sur ses lèvres. Il ne veut pas me le dire. Ça fait déjà quelques temps que j'essaye de savoir et chaque fois c'est la même chose. Il ne dit rien et se contente de sa mimique.

-C'est dommage, lâche-t-il. Elle était quand même mignonne. Je passerais lui dire bonjour à l'occasion.

Putain, toi mon coco, tu t'approcheras pas de Ray de sitôt.

-Faudrait déjà que tu sortes d'ici.

J'ai dit ça sans réfléchir. À vrai dire, je suis un peu trop loin de la conversation. Je suis déjà reparti vers Ray. Elle est toute seule à la maison. Il faut que j'arrête de boire...

-Lenny, encore une visite ! La même fille que la dernière fois.

J'essaye de regarder à travers les barreaux. Elle est là, ses cheveux blonds se baladant de chaque côté de ses épaules.

-Salut, fait-elle.

Elle prend ma main. Je voudrais la prendre dans mes bras. Si seulement je pouvais sortir.

-Tu sortiras ce soir, déclare Ray.

-Quoi ?

-Tu sortiras ce soir. J'ai demandé au gardien.

-Hé miss ! Est-ce que tu peux me faire partir aussi ?

Ray se retourne vers Gray. Et merde.

-Et en quel honneur monsieur l'enflure ?

Il est médusé. Moi aussi il faut dire. Depuis quand est-elle devenue aussi vulgaire ?

-Qui t'es toi ? Tu sais pas qui je suis !

-Non mais je sais ce que tu as fait.

Je suis toute ouïe ! Dis-moi ce qu'il a fait !

-Tu ne mérites pas de vivre. Les gens comme toi ne méritent pas de vivre...

Son corps tremble mais pas sa voix. Elle est sur le point d'éclater en sanglots, je le sais. Bon sang, saletés de barreaux !

-Lenny, c'est fini pour le moment ! Tu vas pouvoir reprendre ton job dans un ou deux mois.

Ok, sauvé ! Viens vite ouvrir gamin !

Pendant ce temps, Rachel est toujours face à Gray et marmonne.

-Toi... Tu es vraiment de la pire espèce... Si je le pouvais, je te tuerais de mes mains.

Le gardien, un nouveau sans doute, reste figé en la voyant dans un tel état d'énervement.

-Fais-moi sortir, je crie un peu trop fort.

Au moins, ça l'a réveillé. Il ouvre machinalement la porte et je sors en trombes pour enlacer Ray. La vache, elle tremble comme une feuille...

-On y va ma puce. C'est fini.

Une larme dégringole de sa joue pour finir sur ma main.

-Il va rester longtemps ici, hein Lenny, demande-t-elle.

Je hoche la tête. Je ne sais pas ce qu'il a fait mais c'est assez grave pour que Rachel se mette en colère. Elle est si calme d'habitude...

-On rentre d'accord ? Tu ne le reverras plus.

Je la prends par la main et la tire vers la sortie.

Une fois dehors, Ray avait retrouvé son calme habituel.

-Euh... Lenny ? Je peux te demander quelque chose ?

-Quoi ?

Elle me fait un grand sourire et des yeux suppliants

-Une amie m'a invité à une soirée pyjama dans deux semaines. Je peux y aller ? S'il te plaît !

Je souris à mon tour. Elle est tellement mignonne !

-Il y aura beaucoup de monde à cette soirée ?

-Seulement des gens de ma classe. On sera 5. Et puis les parents de mon amie évidemment.

Je ne peux pas refuser et elle le sait. L'argument des parents est imbattable. Et puis avec son visage d'ange, c'est difficile de ne pas fondre...

-Très bien, tu as gagné. Mais je t'emmène pour voir si les parents sont vraiment là.

-Merci Lenny, je t'adore !

Elle me saute dans les bras et m'embrasse sur la joue. C'est vraiment un phénomène !