Chapitre 21: Je t'aime

440 21 0
                                    

Les larmes d'Ashley ne s'arrêtent pas de tomber. Les minutes passent mais rien à faire : je ne parviens pas à la calmer. Je ne l'ai jamais vue dans cet état. Ce sourire qu'elle ne quitte pourtant jamais a aujourd'hui disparu de son visage. Son regard dans lequel j'arrive habituellement à lire chacune de ses émotions, a laissé place à une expression vide, dénudée de tout sentiment. Sa mère était tout pour elle, elles ont toujours vécu toutes les deux ; le père d'Ashley est parti à sa naissance. Sa mère est la seule famille qu'elle n'aie jamais eu. Elle avait une relation que très peu de mères et filles ont. Elles savaient lire l'une dans l'autre comme dans un livre ouvert. Elles n'avaient pas besoin de parler pour se comprendre. Au diagnostic de la maladie, Ashley ne voulait pas y croire. Elle a soutenu sa mère beaucoup mieux que l'aurait fait n'importe quelle fille. Elle l'accompagnait à chacun de ses rendez-vous, à chacune de ses opérations, à chacune de ses chimiothérapies. Les mois passaient mais Ashley ne l'avait jamais lâché. Elle était persuadée que sa mère allait s'en sortir. Son état se dégradait de jour en jour, elle avait des hallucinations, oubliait beaucoup de choses et le pire arriva un matin. Ashley arrivait toujours, son sourire rayonnant au visage, elle entra comme d'habitude dans la chambre de sa mère mais celle-ci ne la reconnu pas. Elle la prit pour une infirmière ou pour un médecin. Ashley s'était efforcée de ne pas y prêter attention, sachant que c'était dû à la maladie. Elle était arrivée en pleurs chez moi, se rendant compte que la maladie était incurable. Elle avait repris espoir quelques semaines plus tard en voyant le sourire réapparaître sur le visage de sa mère. Mais les semaines passaient et le comportement de sa mère changeait. Elle pouvait très bien être de bonne humeur et raconter pleins de choses intéressantes et drôles. Mais la plupart du temps, elle était absente, comme dans un autre monde. Les questions que lui posaient Ashley obtenaient rarement des réponses. Les moments de joie s'étaient fait de plus en plus rares depuis déjà un bon mois. Moi aussi je pensais qu'elle allait s'en sortir. Cette femme a toujours eu une grande force intérieure. 

La porte qui s'ouvre me sort totalement de mes pensées. Le médecin passe sa tête dans l'embrassure de la porte.

- J'aurais besoin de vous pour quelques papiers.

Constatant que Ashley ne serait pas d'une très grande aide, je lui répond :

- J'arrive dans une minute, attendez-moi dehors.

Le médecin sort de la salle.  

- Je m'occupe de ces papiers et après je te ramène chez-toi, murmuré-je à l'orpheline.

Elle secoue la tête de gauche à droite, je lui demande :

- Pourquoi non ? 

- Je ne veux pas être toute seule.

- Tiago va t'attendre et il ne sera sûrement pas d'accord pour que tu viennes à la maison. 

- Il part pendant quelques jours dans le royaume d'Osman, il ne sera même pas au courant que je suis partie. 

- Il part quand ? 

- Dans la matinée. 

- Ok. Je vais appeler Steven pour lui demander si ça ne le dérange pas que tu viennes quelques jours. 

- Merci. 

- De rien. Bon, je vais voir le médecin et je reviens, dis-je en lui embrassant le front. 

Elle me serre une dernière fois dans ses bras avant de me laisser m'écarter d'elle. Je récupère mon téléphone resté dans la poche de ma veste avant de me diriger vers la porte. Je lui lance un dernier regard, elle s'est assise sur la chaise et s'est recroquevillée sur elle-même. En la voyant dans cette état je me rends compte de beaucoup de choses. Voir son sourire, entendre son rire, essuyer ses larmes, croiser son regard, écouter sa voix, sentir son souffle, frôler sa main, toucher ses lèvres, sentir son odeur... Toute ces petites choses, tous ces petits détails qui font que je l'aime de plus en plus, qui font qu'aujourd'hui la voir dans cet état me brise le cœur. Sa mère avait raison : la vie était trop courte. J'étais bien trop amoureuse de cette fille pour la laisser sortir de ma vie un jour. Perdue dans mes pensées je n'ai pas remarqué que son magnifique visage s'est tourné vers moi et qu'elle me regarde maintenant d'un air interrogateur. 

- Kaylee ça va ? 

- Oui, je reviens. 

Je sors enfin de la chambre, me détachant de son regard rougi. Le médecin m'attend dans un bureau dans la pièce juste en face. J'entre à l'intérieur et m'installe sur la chaise face à lui. Après avoir rempli divers papiers dont je ne comprenais pas vraiment l'utilité, je pu enfin sortir du bureau. J'en profite pour appeler Steven qui comprend parfaitement que je ne veuille pas laisser Ashley seule et qui accepte qu'elle vienne à la maison. Je retourne dans la chambre où je retrouve Ashley assise en tailleur sur le lit, sans aucune expression sur le visage. Les larmes ont séché le long de ses joues laissant ainsi de légères traces. Ses yeux sont encore rougis et gonflés mais à part ça, ils fixent un point devant elle sans dégager la moindre émotion. Je m'approche d'elle et pose ma main sur sa cuisse. Son regard se détourne enfin du point qu'elle fixait pour se poser sur moi. 

- Je t'aime Kaylee. 

- Moi aussi je t'aime mon cœur, murmuré-je en lui faisant un petit sourire. 

- Je refuse de te perdre toi aussi. 

- Tu ne me perdras pas, je te le promets, réponds-je en prenant son visage entre mes doigts. 

- Je veux profiter de chaque seconde à tes côtés. Je ne veux plus vivre sans toi. 

Son regard n'a pas lâché le mien depuis qu'elle a commencé à parler. Mon cœur bat de plus en plus fort dans ma poitrine. Cette fille je l'ai dans la peau. Moi non plus je ne peux plus vivre sans elle. 

Et si sa mère avait raison ? Et si l'on devait juste arrêter de nous compliquer la vie ?

Amour InterditWhere stories live. Discover now