Chapitre 6

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Ma mère n'était pas encore rentrée du travail, alors mon père s'occupait du dîner pendant que je faisais mes devoirs dans ma chambre. Des coups assez forts se firent entendre sur la porte d'entrée.

- Emeraude, va ouvrir !

Je levais les yeux au ciel, c'est lui le plus proche de la porte, mais c'est à moi d'y aller... Va comprendre quelque chose...
Mais je ne fis plus aucune réflexion, jugeant que mon père a sûrement trop de travail à faire dans la cuisine, puis au moins ça me donne une bonne excuse pour sortir ma tête de ce manuel d'histoire.
Je trainais alors mes pieds emmitouflés dans des chaussons ridiculement roses, accoutrée de mon pyjama avec écrit dessus «bonne nuit », et mes cheveux mouillés tombant en cascade dans mon dos. J'espère qu'il ne s'agit pas de quelqu'un que je connais !
Une fois la porte ouverte, la personne qui se tenait faxe à moi me procura une colère noire.

- Leo, qu'est-ce que tu fous là ?

- Je sais que tu dois penser que je te harcèle, mais ce n'est pas le cas. C'est ta mère qui m'a demandé de passer.

- Ma mère n'est pas là. Pourquoi est-ce qu'elle voulait te voir ?

- Elle n'est pas encore rentrée, tu dis ? me demanda-t-il, soudain inquiet.

- Bien vu, Einstein. Bon, ce n'est pas que ta compagnie me déplaît, mais je vais te claquer la porte au nez.

Aussitôt dit, aussitôt fait, la porte se referma violemment. Mon père arriva dans l'embrasure de la porte séparant la salle à manger du salon, et me demanda :

- C'était qui ?

- Leo.

- Il te voulait quoi ?

- D'après lui, maman lui a demandé de passer. Il m'a énervée alors je lui ai refermé la porte au nez.

Ma mère entrait dans la maison, une égratignure dessinée sur son front. Mon père la devisageait, attendant qu'elle explique son retard et sa blessure.

- J'ai été retenue au boulot, dit-elle, et je me suis faite cette égratignure en tombant. Maintenant, si votre interrogatoire est terminé, j'attends un invité.

- Leo ? Tu l'as loupé de cinq minutes, pas de bol, répliqué-je.

- Il n'a pas dû recevoir mon message...

Cette fois-ci, c'en est trop, le fait de ne rien comprendre, toutes ces cachotteries... Alors je lance un regard noir à ma mère et m'éclipse dans ma chambre. Je m'affale sur mon lit et fixe mon plafond. J'ai beau me creuser les méninges, je n'arrive pas à tisser le moindre lien entre ma mère, Leo, Yeleen et Brett. Tout ce que je sais, c'est que Leo me reproche de ne pas connaitre Brett, et l'accuse d'être un type dangereux. Pourtant, personne ne veut me dire ce qui leur fait déblatérer de telles choses, ils s'imaginent donc peut-être que je vais les croire sur parole, sans me poser de questions ! C'est mal me connaître !
Dès que mon père m'a appelé pour descendre, j'ai tout de suite compris que ma mère ne se joindrait pas à nous pour le repas.

- Je vais parler avec ta mère, je vais essayer d'avoir les réponses qu'elle refuse de te donner, tente-t-il de me rassurer tandis que je jouais avec mes pâtes.

- Elle est où ?

Il soupira avant de me dire :

- Dehors, avec ce Leo.

On dirait que Leo n'a pas sa place dans le coeur de mon père, ce qui l'arrange en un sens. Je m'approchais de la porte d'entrée et colla mon oreille à celle-ci.

- Emeraude...

- Chut !

Je tentais de discerner les voix de ma mère et Leo, mais le seul bruit que j'entendais était celui des voitures qui passaient.

- J'entends rien ! râlé-je.

- Emeraude, reviens manger s'il te plaît.

N'ayant pas envie de me battre avec lui, je fis ce qu'il me dit et m'installais à ma place. Je veux vraiment ces réponses, j'en ai besoin ! Car je commence à me faire toute sorte de scénarios, tous moins rassurants les uns des autres.
Ma mère entrait dans la pièce, suivie de Leo. Ma mâchoire se crispa, et mes poings se resserrèrent.

- Nous avons un invité, dit ma mère.

- Super...

Ma mère n'avait pas l'air d'avoir fait attention à ma remarque, elle rajouta même :

- On peut parler deux minutes dehors, s'il te plaît ?

Je relevais la tête et vis que c'était à moi qu'elle parlait. Alors je reposais mes couverts sur la table, provoquant un bruit assez strident qui fit se crisper mon père.
Je la suivais jusqu'à l'extérieur de la maison. Notre allée débouchait sur la route, qui était assez large pour laisser passer des tracteurs, d'ailleurs, je crois que c'est fait exprès. Les oiseaux ne chantent plus à cette heure ci, et c'est bien dommage, car j'avoue qu'à ce moment j'aurais voulu, ça aurait peut-être détendu un peu l'atmosphère...
Ma mère s'avançait vers moi, ses Brad refermant son gilet. Elle prit une profonde inspiration et dit :

- Tu sais, Leo est quelqu'un de bien.

Je n'ai pas répondu, n'en ayant pas envie. À quoi bon ?

- Tu dois te poser un tas de questions, notamment sur le lien entre Yeleen, Leo et moi.

- L'idée ne m'avait même pas effleurée l'esprit, mentis-je.

- Je te connais assez pour savoir que si. Le problème, c'est que je ne peux rien te dire.

- Et je peux savoir pourquoi ?

- Tu ne supporterai pas. N'importe qui ne pourrait pas supporter.

- Mais vous trois, si.

- Ces enfants ont été confronté à des choses dont tu n'as même pas idée !

Ce que ma mère est en train de me dire ne fait que s'embrouiller encore plus. Je ne comprends rien à ce qu'elle déblatère, et je ne suis même pas sûre que ça ait un sens.

- Et au sujet de Brett... reprit-elle.

- Quoi ? Il fait partie de ces "choses" dont je n'ai pas idée ?

- Je sais que tu ne vas pas me croire, mais...

- Laisse moi deviner : il fait partie d'un gang, et vous êtes ses ennemis !

Je riais, mais mon rire n'était pas naturel, mais forcé, comme si je devenais folle.

- Tu n'es pas loin de la vérité, même si ça te semble fou... Écoute, à partir de maintenant, Leo te ramènera à la maison tous les soirs, et il gardera toujours un œil sur toi.

- C'est presque du harcèlement, lui fis-je remarquer.

Elle soupira. Ça ne sert à rien que je proteste, voire même que je me batte pour ça, car une fois qu'elle a pris une décision, impossible de l'en dissuader. Une brise frappa mon visage de plein fouet, et quelques gouttes d'eau commencèrent à tomber. Je levais la tête vers le ciel, comme pour être sûre que la pluie tombera sur mon visage.
Ma mère se dirigeait vers la porte d'entrée. Avant de rentrer, elle se retourna vers moi et me dit :

- Tu rentreras, je n'ai pas envie que tu tombes malade.

Je restais là, quelques secondes afin de profiter encore un peu des clapotis de la pluie et de l'odeur de la nature. Maintenant que Leo va me servir de baby-sitter, je profite de mes derniers instants de liberté.

Before the PackTempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang