Pour Une Seule Clope

Chapitre 2: Un seul regard pour sceller l'éternité,

Hélène

La voiture démarre et je m’enfonce un peu plus dans mon siège, j’allume mon téléphone, branche mes écouteurs et lance le dernier album de Twenty One Pilots. J’adore ce groupe. Aujourd’hui je déménage, comme disent mes parents « du renouveau ça ne nous fera que du bien !» ou alors « une nouvelle vie commence! » . Mais je n’avais pas envie de quitter Angers au fond… (Moi je ne suis pas comme les autres, ouais moi j’ai deux papas, j’ai été adoptée par un couple d’homos lorsque j’avais 4 ans, et j’adore notre famille ) Je vais avoir 17 ans dans deux mois… Que j’ai hâte ! Une image se façonne dans mon esprit, je vois un oiseau, plus spécifiquement un corbeau, j’adore les corbeaux. J’ai lu pleins de livres où les corbeaux sont les héros. Pourquoi cette bête si noire ? Je ne sais pas, j’ai beau avoir une vie tranquille et heureuse, j’aime la mort et la fin de tout, j’aime la poésie dramatique ainsi que les films drames, j’aime la tristesse, j’aime les pantalons noires qui cachent mes formes, j’aime les chansons qui donnent envie de pleurer… Bref .

-Ça va ma puce ?

Papa Laurent me dévoile ses belles dents blanches en me regardant.

-Oui,merci.

Il se retourne et allume la radio, alors je monte le son de mes écouteurs. Je pense beaucoup trop, c’est mon principal défaut. J’imagine pleins de scénarios qui finissent souvent mal. Je sais pas pourquoi, je suis comme ça depuis que j’ai compris que je ne vivais pas dans le monde des bisounours, ce qui date du début du collège. D’un coup je sens la voiture ralentir, alors j’abandonne le tableau sombre du dessous de mes paupières pour la lumière. Nous sommes coincés dans des bouchons et bien sûr la file d’à coté est plus rapide. Soudain elle s’arrête et je vois qu’un garçon me regarde. Il est étrangement beau… Qu’est-ce que je raconte moi ? Il a des cheveux bruns courts mais c’est son regard qui attire toute mon attention. Je ne vois pas très bien mais on dirait qu’il a les yeux de toutes les couleurs. Je n’arrive pas à détourner mon regard… Il me fixe aussi, je me sens rougir mais il y a aussi cette sensation de chaleur dans mon ventre. C’est super agréable. Puis d’un coup notre voiture démarre et je m’éloigne de ses yeux perturbateurs. De toutes façons je ne le reverrai jamais, ce garçon. Et là, d’un coup, j’ai envie de pleurer. C’est nul de pleurer, les fées ne viennent pas voir les pleurnicheurs… Pourtant je sens des larmes se former au coin de mes yeux et mon ventre se comprimer. Quelle idiote haha… Je réprime mes pleurs et souris en voyant des oiseaux passer au-dessus de la voiture.

Romain :

Ses cheveux, sa frange, ses yeux marrons… Tout ça forme un visage magnifique. Elle m’a regardé elle aussi… Qu’a-t-elle pu penser de moi ? En général les filles m’aiment. Je ne suis pas à plaindre. Mais n’empêche que quand ELLE m’a regardé j’ai senti quelque chose vibrer en moi. Maintenant notre voiture est coincée dans les bouchons tandis qu’elle est déjà loin…

-Romain ! Romain ! Regarde ! crie Sirius derrière moi.

-Sirius, crie pas ! dit ma mère, irritée.

-Ouais, mais regarde, Romain, par la fenêtre !

Je tourne la tête et vois un groupe de moineaux passer à côté de la voiture… Il doit y en avoir des centaines.

-C’est beau, souffle mon p’tit frère.

Je me retourne et regarde ma mère qui maintenant sourit en regardant la route. Je remonte le son de la radio, c’est La Corrida de Francis Cabrel. Je n’aime pas cette chanson.

-Ton père adorait cette chanson…

Je sens de la tristesse dans la voix de ma mère. Alors je ne dis rien car comme l’égoïste que je suis, je ne veux pas qu’elle pleure. Je ne veux pas pour les p’tits et aussi parce que ma mère est forte. Je ne sais pas comment réagir à ses larmes. Ma mère m’a appris pleins de choses mais jamais à avoir la bonne réaction face à son malheur.