36 - le martyr d'uagadou

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Ejiro allait rarement à l'infirmerie de son école, aussi était-elle toujours impressionnée par le silence et le calme qui planaient dans la grande pièce

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Ejiro allait rarement à l'infirmerie de son école, aussi était-elle toujours impressionnée par le silence et le calme qui planaient dans la grande pièce. Ce matin là, la lumière du soleil levant se reflétait sur les murs orangés, renforçant cette impression de douceur. Le lit d'Oona se trouvait près des fenêtres. En fait de lit, il s'agissait plutôt d'un matelas recouvert de couvertures et séparé des autres couchages par de grandes tentures bariolées.

- Comment ça va ? s'enquit l'africaine en s'approchant de son amie.

La rouquine sursauta. Elle était de dos, le visage tourné vers le paysage montagneux qui s'étalait au delà des fenêtres. Elle se retourna vers Ejiro et sourit.

- Désolée, j'étais perdue dans mes pensées. Mais je vais bien. Qu'en est-il d'Ahmad ?

Des rescapés du combat contre les Mangemorts, le jeune sorcier était probablement celui qui avait le plus gardé de séquelles. Il avait tout de même été torturé avec le sortilège Doloris, puis avait manqué de se faire tuer.

- Il s'en sort, soupira Ejiro. Mais il dort très mal, à cause de ses cauchemars. Et il n'a presque aucune force.

- Je l'entend crier, parfois, la nuit, confirma Oona. J'espère sincèrement que ça va s'arranger.

- Chike dit que oui, et la guérisseuse le dit aussi. Il a juste besoin de temps, apparemment.

- C'est compréhensible.

- Et toi ? Tu commences à aller mieux, pas vrai ? Tu penses sortir bientôt ?

- Normalement oui. Ce qu'il me reste est plus psychologique que physique. Je n'en reviens toujours pas que Palesa ait pu basculer de leur côté. Je pensais qu'ici j'étais hors de danger, et finalement, j'ai failli terminer comme Scott.

Ejiro se mordit la lèvre. Il semblait, en réalité, que ce qui perturbait le plus l'irlandaise n'était pas sa prise en otage, mais plutôt la mort de son frère, arrivé un peu plus tôt dans l'année.

- Il n'aura même pas le droit à un enterrement, Eji'. Pas tant que la guerre ne sera pas terminée, en Angleterre.

- L'Angleterre est en guerre ? s'alarma l'africaine.

- Oh, pas de manière officielle, ironisa l'irlandaise. Hier, j'ai lu le dernier exemplaire de la Gazette du Sorcier que j'ai reçu. Un nouveau ministre a été élu pour remplacer l'incompétence de Fudge, mais ça ne les empêche pas de continuer à faire de la propagande. Le Ministère clame que tout va bien, mais l'on ne peut pas dire que tout va bien quand de nombreux sorciers se font enlever, torturer ou tuer. L'Ordre du Phénix a perdu beaucoup de membres, récemment.

- Je suis désolée, mais je ne comprends pas tout.

- Excuse-moi, j'oublie que tu n'es pas du tout au courant de tout ça. L'Ordre du Phénix, c'est l'organisation qui lutte contre Tu-Sais-Qui. Les ennemis des Mangemorts, en somme.

- Je vois. Alors tu penses que la guerre est proche ?

- Non, Eji'. La guerre est là. Tu l'as bien vu, ces fanatiques sont prêts à tout, même à assassiner un élève de cinquième année à Uagadou qui n'a rien à voir avec le conflit...

La voix d'Oona s'était faite plus faible, en évoquant Kamau. Cela ne faisait même pas une semaine que le jeune sorcier avait été tué, et personne ne s'en remettait, encore moins les quelques étudiants qui avaient assisté au drame. L'école était en deuil.

- A ce propos, tu as parlé à Akim ? relança Ejiro. On s'inquiète pour lui. Les gens de sa classe disent qu'il ne parle plus à personne dans le dortoir et les cours, qu'il vit seul et s'arrange pour croiser le moins de monde, tout au long de ses journées.

- Il n'est pas venu me voir, soupira la rouquine. Mais je sais qu'il a dit à la guérisseuse qu'il ne voulait pas de suivi psychomagique, sauf qu'il continue à venir régulièrement lui demander des potions de sommeil.

- Ahmad n'est pas le seul à faire des cauchemars, alors.

- Oh, que non. Mais c'est normal. Qui n'en ferait pas, si son meilleur ami se faisait assassiner devant ses yeux ?

Pensive, Ejiro se mordit la lèvre. Evidemment, la mort de Kamau avait traumatisé tout le monde, mais Akim encore davantage. En vérité, tous avaient gardé des séquelles de leur combat, et ils ne s'en remettraient pas si facilement. Elle s'assit à côté de son amie, et suivit son regard, dirigé vers les sommets au-delà des fenêtres.

- Il faudrait lui parler, décréta-t-elle alors. On ne peut pas le laisser dans la solitude, il a besoin de nous. Et surtout de toi, Oona. Tu le connaissais mieux que Njeri, Am' ou moi.

- J'essaierai de le voir le plus rapidement possible, assura l'irlandaise. Quand est prévu l'enterrement, déjà ?

- Après-demain.

- Je serais sortie d'ici là. Tu as raison, il faut que je reste présente pour Akim.

Ejiro se mit à envier la force de caractère de sa camarade. Elle avait vécu des épreuves horribles, ces derniers mois, et pourtant, elle arrivait toujours à rester solide et à apporter son soutien à ceux qui en avaient besoin. L'africaine n'avait aucune idée de comment elle aurait agi à sa place.

Un silence plana pendant un long moment entre les deux jeunes filles.

- Je repense à ce que tu m'as dit, lâcha finalement Ejiro. A propos de la guerre.

- Oui.

- Tu vas faire comment, à la fin de l'année, quand tout le monde rentrera chez soi ?

- J'espérais que tu aurais pu m'héberger.

- J'aurais adoré, mais... En fait, j'en ai parlé à ma mère, par courrier. Je ne sais pas si je te l'avais dit, mais Cézar m'a invité à venir lui rendre visite au Brésil, en décembre. J'ai accepté, mais c'était avant que Palesa tente de te tuer. J'ai écrit à ma mère que je ne voulais pas te laisser seule pendant les vacances d'été, et que j'allais sûrement devoir rester dans notre appartement de Lagos avec toi...

- Oh non, Eji', je ne veux pas gâcher tes plans ! Ce serait tellement bien si tu pouvais aller au Brésil ! Tu pourras sûrement découvrir plein de choses au niveau culturel, et puis... il y aura Cézar !

Ejiro leva les yeux au ciel.

- Excepté le couplet sur Cézar, c'est ce que ma mère m'a dit. En plus, elle a ajouté qu'elle risquerait d'avoir du travail tout l'été et qu'elle ne resterait pas beaucoup à l'appartement, donc qu'elle ne pourrait pas veiller sur toi. Et c'est là qu'elle m'a proposé une solution.

- Laquelle ?

- J'ai une marraine, qui est aussi la meilleure amie de ma mère. Elle habite à Kampala, où elle tient un restaurant de spécialités ougandaises. Elle s'appelle Akinyi, et c'est une femme adorable. Un très bonne cuisinière et une sorcière hors pair. Elle adorerait t'accueillir, et avec elle, tu serais en sécurité.

- Ça me semble être une bonne idée.

- C'est vrai ? Tu ne m'en veux pas trop de t'abandonner ?

- Non ! Je comprend que ce voyage te tienne à cœur, je m'en voudrais de t'en priver. Et puis, je serais ravie de rencontrer ta marraine.

- Fantastique ! Je la contacterai tout à l'heure, alors ! Et puis, je pense que si tu passes l'été là-bas, je te rejoindrai dès que je serai revenue du Brésil. Ça fait une éternité que je n'ai pas vu Akinyi.

- Ce serait super. Maintenant, j'ai hâte d'être à cet été !

Les deux jeunes filles se sourirent. La discussion terminée, elles enchaînèrent sur des paroles plus joyeuses, et bavardèrent jusqu'à ce que ce soit l'heure pour Ejiro d'aller en cours. En quittant Oona, cette dernière se surprit à se sentir plus légère. Certes, leur petit groupe avait souffert, mais il semblait que le pire était maintenant derrière eux.

Toutes les nuits ont une fin | fanfiction HPOù les histoires vivent. Découvrez maintenant