17. Erreur

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Le lendemain
7h40
Lorélia Roden

Voilà maintenant une vingtaine de minutes que je fixe mon plafond. Je n'ai pas la motivation de me lever, mais je dois le faire. Je dois aller chercher les réponses dont j'ai tant besoin, pour m'ôter certaines pensées malsaines qui hantent mon esprit depuis plusieurs semaines maintenant. Qu'est-ce qu'Antoine peut encore bien cacher ? Je compte bien le découvrir et le forcer à parler. Fini de se cacher derrière ces sentiments, je suis déterminée à obtenir des réponses.

Je finis par me lever et je marche lentement vers la douche. Je reste une petite dizaine de minutes sans réellement me laver, juste à laisser les gouttes d'eau frapper mon corps. Je finis par bouger et terminer rapidement cette douche. Je passe encore un bon quart d'heure dans ma salle de bain avant de filer m'habiller, pour finalement rejoindre la villa. Oui, je vis encore dans la dépendance. J'attends qu'Antoine me propose de le rejoindre, mais la situation ne semble vraiment pas s'y prêter pour le moment.

J'entre dans la villa, qui étonnamment, n'est pas plongée dans le silence. J'entends l'eau d'une douche couler à l'étage : Antoine. Je décide de le prendre par surprise, en allant directement dans sa chambre en attendant sa sortie. Il ne pourra pas m'échapper. Quelques instants après, il fait son apparition, et sursaute lorsqu'il me voit

Mais qu'est-ce que tu fais là ? me demande-t-il en fouillant dans son armoire

Je viens pour parler, et avoir des réponses

Il laisse ses bras tomber le long de son corps et se retourne vers moi.

Attends-moi dans la cuisine, j'arrive, me dit-il bien plus sèchement qu'à son habitude

Je m'exécute et l'attends pendant de longues minutes. Il finit par pointer son nez, en avançant jusqu'à l'îlot central avec une démarche de prisonnier. Il a l'air fatigué, triste, mais surtout enragé.

Je suppose que c'est par rapport à mes antécédents

Bingo

Il marque une pause et s'appuie sur le bord de l'îlot, ce qui fait ressortir ses muscles, mais surtout sa colère.

Il y a deux ans de cela, j'étais très alcoolisé après une soirée d'anniversaire. Je n'étais pas moi, je ne me contrôlais pas. Une remarque d'Erika sur mon comportement m'a fait vriller et j'ai pété les plombs. Je l'ai frappée. Ça n'a été qu'un coup, mais ça a été suffisant pour la police qui m'a embarqué après son appel. J'ai été mis la nuit en cellule de dégrisement, j'ai été jugé : 31 jours de travaux d'intérêt généraux, et une interdiction d'approcher Erika à 500m pendant 2 mois. C'était le début de la chute de notre relation. Et je ne suis pas fier. C'est pour ça que c'était un argument de poids dans le jugement, j'ai un casier judiciaire avec des violences conjugales, m'explique-t-il la mâchoire serrée, les mots peinant à sortir

Je ne te pensais pas comme ça Antoine, je suis déçue

Et comment est-ce que tu m'imaginais ? me demande-t-il très agressivement, tout en serrant les poings

À cet instant, j'ai peur. J'ai peur qu'il refasse la même erreur, qu'il soit violent à nouveau contre une femme. Son regard est intensément noir et empli de haine, ses bras et mains sont crispées, on pourrait croire que ses veines vont exploser.

Je ... Je ne te pensais pas violent, ni aussi sombre

Il frappe un grand coup sur l'îlot, faisant trembler la pièce entière.

Oublie tes putains de préjugés et écoute moi bien ! crie-t-il en se rapprochant de moi

Il s'approche de plus en plus. Dans quelques pas, il me bloquera entre un plan de travail, et lui. Son regard ne désemplit pas de rage, son corps entier est maintenant serré. Il est en colère noire, il est inarrêtable. J'ai peur. Je tente malgré tout de lui envoyer toute mon empathie par un regard, mais cela fait mouche.

Nous avons tous notre côté sombre, et ça, c'est le mien. Il n'y a rien à faire, ce sont mes démons qui me font ces sauts d'humeurs, qui me font faire ces actes irréparables

Antoine ...

Laisse-moi finir ! hurle-t-il à quelques centimètres de mon visage en levant sa main

On ne lève pas la main sur moi. Je me sens en danger plus qu'immédiat, alors je décide d'agir et d'utiliser la manière forte car il ne me laisse pas le choix. Je décale ma jambe droite, et la lève avec une grande impulsion. Mon genou vient frapper ses parties intimes, le faisant tomber à la renverse sous la douleur.

Personne ne lève la main sur moi. Personne, répondis-je, en le regardant geindre au sol

Ses yeux ont perdu de leur noirceur. Le bleu éclatant qui occupe habituellement ses iris est revenu. La haine et la rage a disparu laissant place à la douleur et la détresse. Je ne peux pas comprendre sa douleur, mais elle est méritée. Aucun homme ne devrait frapper une femme, d'autant plus quelqu'un en qui il disait avoir confiance et déclaré son amour.

Je décide de quitter la villa, dépassée par les évènements. Je le laisse au sol, toujours à se plaindre de la douleur. C'est actuellement le dernier de mes problèmes. Je m'enferme dans la dépendance et je tente de me changer les idées. Il n'est même pas dix heures et je ne veux plus sortir de la journée. Je ne veux pas le recroiser après ce qu'il a fait. Il saura bien se débrouiller tout seul pour aujourd'hui.

Je me pose toute la journée devant mon ordinateur, à passer des réseaux sociaux à des séries, pour tenter au maximum de me libérer l'esprit. J'avais vu juste dans l'histoire d'Antoine, c'était des violences conjugales. J'étais prête à le pardonner, mais il m'a malheureusement montré qu'il était capable de réitérer l'erreur. Dommage pour lui, je ne suis pas Erika et j'ai du répondant.


21h10
Lorélia Roden

J'entends toquer très doucement à ma porte, pas besoin d'ouvrir pour savoir de qui il s'agit.

Va-t'en

Lorélia s'il te plait ... dit une voix faible accompagnée de sanglots

J'hésite longuement, mais je finis par céder. Sa voix ne me dit rien qui vaille. J'ouvre la porte et découvre un Griezmann en larmes, fatigué et détruit. Il se jette dans mes bras, avant même que je ne puisse bouger. Il empeste l'alcool. Il lâche tout son poids sur moi et me force à m'asseoir sur mon lit, qui est proche de la porte. Il pose non délicatement sa tête sur mes cuisses, et s'allonge sur le lit. Il continue de pleurer. Il est complètement soûl, mais au moins il est calme. Je lui caresse les cheveux, cela m'apaise, et lui aussi. Il ne tarde pas à s'endormir paisiblement.

Son état me fait beaucoup de peine. Il est vraiment détruit, brisé, et il va avoir besoin de tout mon soutien pour traverser cette difficile passe. Je ne sais pas si je suis prête à lui pardonner, mais ce qui est sûr, c'est que je suis prête à l'aider.

Entre deux services | Antoine GriezmannWhere stories live. Discover now