Chapitre dix-sept

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PDV REX.

Je ne sais pas pourquoi je mange, ni même pourquoi je bois. Mon corps tente de survivre tandis que ma conscience essaie de quitter ce monde. Les jours passent et se ressemblent invariablement. Je me réveille en maudissant le ciel de m'avoir permis de vivre une journée de plus que lui. Nous n'avons pas fêté nos un an. Il m'a quitté avant. Il m'a quitté sans le vouloir, la vie ayant décidé pour lui. Mais qui est-elle pour reprendre les êtres qu'elle a fait naître ? Qui décide de ceux qui continuent à souffrir et ceux qui trépassent ? Je lui en veux, à la vie, mais aussi à la mort. Elle que je croyais mon amie, que je pensais comprendre. Elle m'a trahie et volé le seul être que j'aimais.

Elsie et Malia se tiennent à côté de moi. Elles m'aident à m'alimenter, me content des choses censées m'aider. Rien ne pourra jamais remplir ce rôle. Je déteste la vie plus encore qu'avant l'entrée d'Alastair dans la mienne. Elle est mon ennemie, elle que j'avais fini par dompter. Un coup de poignard dans le dos, juste assez pour atteindre mon cœur mais sans jamais le percer. Condamné à souffrir.

Je n'ai plus parlé depuis l'annonce. J'ai crié, j'ai pleuré, et j'ai fini par assécher mes canaux. Je suis incapable de verser la moindre larme. Ma bouche ne s'ouvre que par automatisme, parce que ce putain de corps veut guérir. Je le déteste, lui aussi. Lui qui raconte l'histoire d'un garçon qui s'en sort, qui ne vit que pour l'amour. Ce n'est qu'une enveloppe qui raconte un mensonge. Aujourd'hui je ne vis que grâce aux tubes implantés dans mes bras. La surveillance est constante. Tous les médecins sont au courant de ce que je traverse et des troubles qui créent ma personnalité.

Aucune de mes mères ne pourra me pousser à rester sur Terre. Malheureusement, elles l'ont compris et je ne serais pas surpris d'être interné quelque part « pour mon bien ». Sauf que je me fous de mon bien. J'arriverai à mourir, j'y arriverai. Jamais je ne resterai ici sans Alastair. Ça n'en vaut pas la peine.

Mon petit ami repose déjà sous une dalle de pierre. Son enfoirée de famille a déjà procédé à l'enterrement. Je n'ai rien pu dire pour l'accompagner dans cette étape, je n'ai pas pu être à ses côtés. Alors, je veux être enterré à côté de lui, tout près. Si près que nos mains pourront se rejoindre et se serrer. Ou brûlez-moi je m'en fous. Je veux simplement le rejoindre et rester avec lui pour l'éternité, celle que l'on nous promet à la seconde même où l'on ouvre les yeux. Je n'aurais peut-être même jamais dû naître.

- Tu vas pouvoir sortir dans quelques jours, me dit Elsie, visiblement enchantée.

Sauf que je ne montre aucun signe de gaité. Ce que je veux, c'est mourir. Je veux rejoindre Alastair, le serrer dans les bras et l'embrasser, encore et toujours. Mais les jours défilent. La pluie s'arrête pour laisser place à ce putain de soleil radieux. Je n'ai pas consulté mon téléphone. Il paraît qu'il s'est brisé dans la collision, mais qu'on a pu récupérer ma puce. Malia s'est empressée d'acheter un autre iPhone, le tout dernier sorti, évidemment. Comme si j'en avais quelque chose à foutre.

Je le vois parfois s'allumer sur la table mais je ne prends jamais la peine de répondre. Maintes fois pourtant, je suis allé sur son profil Facebook. J'ai inspecté les photos Instagram. J'ai lu les commentaires de tous ces gens qui le pleurent. A chaque fois, une douleur sourde prend place entre mes viscères et gronde jusqu'à faire trembler chacun de mes muscles.

Debout, appuyé sur des béquilles, je le glisse dans la poche du jean que je porte. J'ai perdu beaucoup de poids et je flotte complètement à l'intérieur. Tous mes vêtements me paraissent fades. Les couleurs me filent la gerbe. Je ne veux que du noir. Je veux sombrer, mais des ficelles me tirent de toute part, m'obligeant à avancer. Aujourd'hui, je quitte l'hôpital. Juin est terminé depuis un bout de temps. Juillet a déjà fêté plusieurs de ses jours. J'ai passé beaucoup de temps, à arpenter les différents services. Il paraît même que j'ai pris une ambulance pour être transféré dans un autre hôpital, mais je ne m'en souviens pas.

Inébranlable (T3 AVIFic - BxB)Wo Geschichten leben. Entdecke jetzt