Chapitre 2

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À quelques kilomètres de là, Adeline lisait tranquillement Notre-Dame de Paris de Victor Hugo sur un canapé. Elle était assise dans le coin détente de la caserne aux côtés de Luc qui s'informait sur l'actualité avec la télévision.

- Tu ne pourrais pas baisser un peu le son Blanchet ?

- Oh ça va, Riou.

Adeline s'apprêtait à riposter quand soudain l'alarme retentit.

- Échelle 3, caserne 21, équipe 6, ambulance 1

Les deux collègues se regardèrent pendant deux secondes, puis se levèrent en même temps que les autres pour rejoindre leur véhicule.

***

Trêve de plaisanterie et place à l'action.

Les camions concernés arrivèrent à destination au bout d'un petit quart d'heure de route.

Bastien Forster commandait les équipes depuis quatre ans maintenant. Le bâtiment qui se trouvait en face de lui était rempli de flammes. L'enjeu était de taille, mais il n'y avait rien d'inhabituel à cela.

- Riou, Blanchet et Aurel vous passez par l'entrée de l'immeuble. Taris et Lorcy vous attendrez mon signal pour faire monter la grande échelle.

- Entendu, chef ! répondit l'un d'entre-eux.

Tandis que les ordres continuaient d'être donnés, Adeline entra en premier sur les lieux du danger suivie par Luc et Christophe.

Quand vous mettez de la farine dans un saladier, vous vous retrouvez parfois saupoudré. Le spectacle qui s'offrait aux pompiers était similaire à quelques points près. De la fumée grisâtre envahissait le hall et bientôt, la distance de visibilité fut réduite à 2 mètres.

Plusieurs familles avaient réussi à sortir avant l'arrivée des pompiers, mais il en restait encore quelques unes à certains étages. Plus ils avançaient, et plus l'air devenait irrespirable. Des enfants pleuraient en compagnie de leur peluche, mais grâce à leur cri, les pompiers purent les localiser et les emmener loin des flammes.

***

Cinq minutes s'étaient écoulées depuis que l'équipe 6 était sortie de l'immeuble, et il manquait Adeline à l'appel.

- Où est Riou ? demanda Bastien agacé.

- Je ne sais pas. Je ne comprends pas. Elle tenait la petite Chloé dans ses bras, et puis lorsque je me suis retourné, elle avait disparu. rétorqua Luc.

Cette réponse déplut fortement à Bastien, mais il fallait agir vite. Il ordonna à Luc et Christophe de chercher avec prudence Adeline. La situation se dégradait avec les chances de la retrouver.

Masques enfilés, ils étaient parés pour les recherches.

Les secondes passèrent et ce sans qu'il y ait la moindre bonne nouvelle... Quand soudain, Luc la vit au troisième étage.

- Elle est là ! Chef, je la vois. annonça Luc à son talkie walkie.

- Très bien. Faites vite, l'immeuble menace de s'effondrer.

Luc se rapprocha d'Adeline qui était coincée sous une poutre.

- Luc... Luc, c'est toi ? demanda Adeline en toussant.

Il ne la voyait pas bien à cause de la fumée noire trop présente.

- Oui, c'est moi. Je vais te sortir de là. Tu verras, tout ceci ne sera bientôt qu'un mauvais souvenir.

À peine Luc avait dit ces mots qu'ils entendirent un craquement.

- C'était quoi, ça ? s'inquiéta Adeline.

- Je ne sais pas. Argh. Cette poutre est beaucoup trop lourde pour moi. Aurel, viens vite, j'ai besoin de renfort !

- J'arrive, répondit-il dans le talkie.

Aurel arriva dans la pièce une minute plus tard. La fumée devenait de moins en moins respirable ce qui n'améliora en rien la situation.

Adeline luttait pour ne pas montrer sa douleur, mais alors que les deux pompiers avaient réussi à soulever la poutre qui la bloquait pour la mettre à côté d'elle, le plancher émit un bruit qu'ils n'étaient pas près d'oublier.

- Les mecs, je vous aime. articula Adeline toujours assise.

- Adeline ?!

- Luc, je t'en supplie, tu diras à Paul que... commença-t-elle les yeux brillants de larmes.

- Attrape ma main !

Les mots manquèrent. Le plancher, lui, s'écroulait sous les yeux impuissants de Luc.

- Adeline ! Adeline ! Non ! hurla Luc.

La jeune rousse tenta d'agripper sa main dès qu'elle sentit le sol se dérober, mais sa main glissa. Luc n'avait pas été assez rapide et malheureusement, sa force l'avait cruellement lâchée.

Sans perdre une seconde, Luc et Christophe descendirent d'un étage pour la retrouver. Le cauchemar continuait. Les flammes grandissaient à vue d'œil. Ils ne tardèrent pas à la voir étendue sur le sol. En deux trois mouvements, Adeline, inconsciente, fut transportée par Luc.

Christophe lui servait de guide pour sortir du bâtiment. Une seconde plus tard, l'immeuble s'effondra derrière eux.

Après avoir placée Adeline dans l'ambulance, les infirmières tentèrent le tout pour le tout de la sauver.

***

Lorsque Priscilla, l'une des infirmières de l'ambulance 1 s'avança vers ses collègues la mine sombre, Luc l'arrêta.

- Non. Non, tu as réussi à la sauver. Elle va se réveiller.

Un silence lourd de réponse se passa puis la nouvelle retentit.

- Je suis désolée. Elle a fait un arrêt cardiaque et nous n'avons pas pu la... réanimer.

Les larmes aux yeux, Luc tomba à genoux.

- Noooon ! Pas Adeline ! Ce n'est pas possible ! Pas elle.

Son amie et coéquipière était morte. Il commença alors à frapper le sol comme si plus rien d'autre ne comptait. Il voulut se faire mal jusqu'à faire saigner ses jointures, mais le chef Forster le ramena à la raison.

- Blanchet. Arrêtez. Calmez-vous tout de suite. Cela ne la fera pas revenir. Et puis, vous vous donnez en spectacle.

Luc rit amèrement puis sans dire un mot, il partit.

- Chef, vous n'y êtes pas allé de main morte. nota Aurel.

- Je sais, mais avec ce qu'il l'attend, il doit se relever très rapidement.

- Oui.

Il avait suffi d'une seconde, rien qu'une seule pour que leur vie change à jamais.

Le bonheur n'est pas à un nuage prèsWhere stories live. Discover now