Chapitre 21 - LUI

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— Une heure plus tard et me revoilà, ai-je dit lorsque mon invitée m'a ouvert. J'ai tenu parole.

— Et pas qu'un peu, a répondu Oxane.

La télécommande à la main, elle a baissé le son des enceintes du salon.

— Ta playlist est top. Tu as bon goût ! Je m'attendais à des musiques d'opéra, à des mélodies jazzy... Je suis agréablement surprise. Tu écoutes de tout, a-t-elle lancé en augmentant le son.

Power du groupe Heavy a animé l'endroit.

Oxane, une coupe à la main, s'est mise à se dandiner en me tirant dans le salon.

— Quelle divine odeur ! Tu sens très bon, Marin.

Elle a humé mes vêtements avant que son flair ne s'attarde autour de ma nuque. Je l'ai laissée m'entraîner au beau milieu de la salle à manger pour une danse distrayante. Me déhancher avec Oxane m'a permis d'oublier les faucheurs malmenés quelques instants auparavant.

— Tu as le sens du rythme ! s'est-elle égayée.

La belle a gloussé en posant son verre d'eau sur un meuble. Elle a ensuite dansé contre moi sans arrière-pensée. Je ne pouvais pas en dire autant. Oxane m'émoustillait. Elle inspirait mes sens, éveillait ma concupiscence. Contrairement aux autres êtres de mon rang, je n'aspirais pas à me composer un harem. Éloigné des humaines, isolé de tous, je me concentrais sur l'écriture de mes romans quand je ne sortais pas mettre des raclées aux abominations qui hantaient la forêt. Les faucheurs de Beaupuy n'avaient pas été des enfants de chœur durant leur existence d'anges ou d'Archanges. Certains avaient violé, d'autres tué, abusant de leurs pouvoirs sur les plus faibles. Ils se retrouvaient donc condamnés à une longue vie d'errance.

— Marin, reviens !

Je me suis éloigné pour m'empêcher de ressentir de drôles de sensations. Le Marin humain n'existait plus. Pourtant, les vices des hommes étaient aussi les miens. Je réagissais aux gestes tendres, aux passions fusionnelles et fougueuses.

Oxane a éteint la musique pour me rejoindre au premier. Je me déshabillais dans la chambre quand elle a pénétré dans la pièce.

— Je vais prendre une douche.

— OK, a-t-elle opiné en me regardant m'éloigner.

Je me suis immobilisé à l'entrée de la salle de bains. J'ai lancé mon pull, mon jean et mes chaussettes dans la panière à linge et je me suis retourné pour être contemplé par mon invitée.

— Tu n'as pas sommeil ? me suis-je renseigné.

— Pas vraiment.

— Il y a tellement de choses que j'aimerais réaliser. Dormir n'en fait pas partie.

Une affirmation lourde de sens.

Oxane a quitté la pièce pour atteindre la chambre d'amis.

Ayant besoin d'orienter mes pensées vers une thématique peu épicurienne, j'ai pris une douche glacée. Je n'ai constaté qu'un léger picotement sur ma peau, qui n'a eu aucun impact sur mon esprit. Je culpabilisais à l'idée d'éprouver l'envie de fusionner avec celle qui amenait avec elle des tas d'interrogations. Je ne connaissais pas sa véritable nature. Je percevais ce « plus » provoquant en moi cette obsession et ce besoin d'être auprès d'elle.

Oxane n'était pas comme les autres. Plus qu'humaine sans être un ange. Plus qu'humaine sans être quoique ce soit que j'ai connu en l'espace de deux mille huit cents ans d'existence.

Je craignais que Katalina ait raison. Que son ressenti soit le bon. Et si Oxane incarnait, sans le savoir, l'exceptionnel, l'Immortel dans toute sa splendeur ? Je balançais d'un revers d'aile l'idée qu'elle puisse être une Immaculée ou une Intemporelle. Impossible. Je l'aurais su au premier regard. J'aurais deviné cet aspect de l'essence si particulière qui la composait.

Bleu Magnétique (EN PAUSE)Where stories live. Discover now