De souffrances en souffrances

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FA-TI-GANT !! J'en pouvais plus. La séance venait juste de se terminer, j'étais en sueur dans mon kimono, j'haletais comme un chien qui venait de courir un marathon, la langue pendue, et je tenais à peine debout. Deux heures de sport intense, ça faisait longtemps que je n'étais plus habitué à ça. Au moins, ça m'avait fait oublié mon père quelques temps...

Durant l'entraînement, où il y avait environ une vingtaine d'enfants et ados, on avait commencé par s'échauffer soi-disant "gentiment", en enchaînant des séries de pompes, squats et abdos pendant vingt minutes. J'avais découvert des muscles dont je ne soupçonnais même pas l'existence auparavant. Alors que j'aurais bien accepté une petite pause, on avait continué en faisant des séries de "chutes avant" et "chutes arrière". Je n'arrivais à faire guère mieux que des galipettes qui devaient sans doute me ridiculiser. Ensuite, Kiki nous avait montré un enchaînement rapide de deux techniques que je ne comprenais absolument pas, mais elle m'avait ensuite pris à part avec un petit de neuf ans pour apprendre des techniques plus simples. C'était ainsi que j'avais appris ma première technique de judo, Ō-soto-gari ("grand fauchage extérieur" en français), qui était une technique en arrière où on doit faucher la jambe pour faire tomber le partenaire.

Après avoir fait une démonstration aux autres pour qu'ils puissent s'entraîner, la prof était revenue me voir pour me faire un petit cours théorique sur les termes employés au judo. J'avais alors appris que les techniques et les termes d'arbitrage étaient en japonais. Par exemple, je savais désormais que pour faire saluer avant un combat, l'arbitre disait Rei, pour le commencer Hajime et pour l'arrêter Matte. Elle m'avait aussi expliqué le système de points, mais je n'avais pas encore tout compris. J'avais juste retenu quelques mots par ci par là, comme Waza-Ari ou Ippon. Enfin, elle m'avait dit que celui qui faisait les techniques était appelé Tori tandis que celui qui chutait s'appelait Uke.

Nous avions terminé le cours sur des Randori, autrement dit des combats au sol ou debout afin que l'on puisse s'entraîner sur les techniques et enchaînements vus pendant la séance. J'avais alors fait deux combats contre des ceintures jaunes qui devaient avoir huit ans où je m'étais distingué par ma non-réactivité aux attaques de l'adversaire. Je m'étais alors retrouvé contre Alicia, que je n'avais pas vu de la séance, trop fatigué pour regarder autour de moi. Je m'étais alors rendu compte qu'elle avait les yeux si clairs, gris, qui semblaient exprimer tant de choses à eux seuls. J'étais fasciné par ces yeux si purs, je ne pouvais m'y défaire et étais en train de m'y noyer...

"- T'es prêt Marc ? dit-elle avec un petit air malicieux.

- Quand tu veux."

Après avoir entendu la prof dire Rei au loin, j'avais perdu toute notion de temps, envoûté par ces deux globes luisants. J'avais à peine eu le temps de réfléchir que je m'étais déjà retrouvé par terre, les deux jambes balayées. Alicia avait pris le combat très au sérieux et visiblement, elle n'aimait pas perdre. J'avais la tête qui tournait et j'arrivais plus à me repérer dans l'espace. Heureusement, juste avant qu'elle commence à m'étrangler, le chronomètre avait sonné, ce qui annonçait la fin du combat mais aussi de la séance. Alicia m'avait souri et m'avait aidé à me relever, avant de me saluer.

"- Alors, tes impressions ?

- Euh... Je suis un peu perdu, je sens plus mes muscles, mais j'ai bien aimé. Je regrette pas de m'être inscrit, dis-je en souriant, alors qu'elle rigole. Et sinon, j'ai l'impression que je t'ai déjà vue quelque part. T'es dans quel collège ?

- Je suis à "Alain Fournier", c'est pas loin du cimetière du Père Lachaise, et toi ?

- Je suis à Anne Frank, c'est à côté de ton collège je crois, c'est sûrement pour ça que je t'ai déjà vue quelque part.

- Oui, peut-être. Il faut qu'on aille se remettre en place pour aller faire le salut, tu viens ?

- Ouais, j'arrive.

******

- Salut M'man.

Pas de réponse. Je venais de rentrer à la maison, fatigué de l'entraînement, avec des courbatures partout. Il était 19h30 et j'avais super faim. Sans même passer par le salon, je m'étais précipité dans ma chambre en balançant mon sac sur mon lit et j'avais filé directement à la douche.

Les cheveux tous doux, une peau lisse et un léger parfum de noix de coco dans les narines, je me suis dirigé vers la cuisine pour aller rejoindre Maman.

- Coucou Maman, on mange quoi ce soir ? Maman ? Maman t'es o...

Je venais alors d'apercevoir un mot sur la table de la cuisine.

"Salut Marc, j'ai dû me rendre en urgence à l'hôpital, c'est ton frère. Il reste une boîte de lasagnes dans le frigidaire. Je t'appelle quand j'ai des nouvelles.
Bisous, Maman"

Quoi ? Non, pas encore...

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^_^

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