Chapitre 5 : Le chêne.

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Aiden, jour de la rentrée :

        J'ai beau me tourner et me retourner, changer de position toutes les deux minutes, il m'est impossible de trouver le sommeil. Je regarde furtivement le réveil. 5h du matin. Cela fait trois heures que je tente de m'endormir. Sans succès.

        Je suis sorti du hangar vers 1h mais le temps de rentrée jusqu'ici, je n'ai pas pu retrouver la chaleur approximative de mon vieux lit avant 2h. Je n'ai pas croisé Kyle, il devait très probablement encore être chez l'une de ses conquêtes, il les enchaîne depuis quelques mois. Je crois qu'il ne supporte plus l'ambiance sinistre qui s'émane de l'appartement. Je ne peux que le comprendre. À chaque fois que je passe le pas de la porte un sentiment profond d'inconfort, de solitude et de rage prend possession de mon corps. Il n'y a pas de remède, la passé reste le passé et ce n'est pas demain que nous aurons la possibilité de sortir de ce trou à rat insalubre. Prendre son mal en patience. C'est ce que je dois faire jusqu'à pouvoir survivre seul.

         Mon corps se met en mouvement pour sortir du lit, je ne vais de toute évidence pas réussir à rejoindre Morphée. Le sol crasseux me donne envie de vomir et l'aspect délabré de notre salle de bain n'arrange pas la chose. Je décide pourtant d'oublier ces détails pour pouvoir sortir de ce taudis sans fondre en larmes.

         Mes membres sont tout ankylosés, mes hématomes ne se sont pas résorbés, la faute à ma qualité de vie plus que médiocre certainement. L'eau qui ruisselle sur mes épaules pour terminer sa course à mes pieds prend une couleur rougeâtre qui m'annonce qu'au contraire de ce que je pensais, mes bandages n'ont pas survécu à l'effort d'hier soir.

          Je finis de me doucher le plus vite possible, l'eau, au lieu de me détendre, brûle mes plaies. Je refuse de regarder mon corps dans le miroir, mon aspect apathique et mes muscles secs me refilent la nausée. J'enroule donc une serviette autour de mon torse, elle est très large et cela me déprime encore plus qu'à l'habitude. Naïvement, je pensais que cet été aurait pu changer la donne. Je me tiens toutefois au même endroit qu'il y a un an, et encore plus dans la merde. Je ne peux malheureusement pas cacher mon visage au miroir qui me renvoie un reflet douloureux de mon état. Mes cernes sont plus creusés, tout comme mes joues. C'est pire qu'il y a une semaine, mais mieux que demain.

          Je sors précipitamment de la pièce, les larmes au bord des yeux. Je ne peux plus rester une minute de plus. J'enfile en vitesse une paire de jean à peu près propre, un t-shirt troué et des Van's, seul souvenir d'une ancienne vie. Mon sac lancé à l'aveugle sur mon épaule, je ne prends pas la peine de fermer à clé mon appartement. De toute façon, il n'y a rien à voler. Vu le quartier, personne n'est assez abruti pour laisser ses économies dans des clapiers pareils.

         Je dévale les marches mais me fait subitement arrêté par ce qui me semble être Kyle, ma tête inclinée vers le bas ne peut pas m'apporter de confirmation. Les chaussures de l'individu me paraissent cependant familières.

         La poigne forte qui encerclait mon bras se dessert et j'entends un simple souffle ennuyé couper l'air. Je sais que c'est Kyle. Nous ne prononçons pas un mot et il se dirige tranquillement vers le dernier étage.

          Nous ne nous apprécions pas. C'est un fait. Sa poigne est une de ses manières pour me démontrer sa force, son emprise sur moi. Mais son souffle m'indique qu'il est usé. Il est fatigué de devoir porter ce rôle qu'il s'est lui-même attribué. Je sais que nous nous tiendrons à deux à l'arrêt de bus dans quelques minutes, mais moins nous nous voyons mieux nous nous portons. Je ne peux m'empêcher de ressentir une tristesse pure me traverse le cœur. Voir notre relation se détériorer fut une des choses les plus dure de ma vie. Mais rien ne changera plus désormais.

In Love With A GangsterWhere stories live. Discover now