Falling for you : Through your eyes - Tome 1 [SOUS CONTRAT D'ÉDITION]

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A L L I S O N

M'inscrire au cours de sport, tous les lundis et mercredi, était vraiment une mauvaise idée. Même si cela permet de diversifier un peu mon dossier, en plus de m'apporter une activité physique manquante à mon quotidien, je regrette mon choix...

Tout d'abord, il y a l'épreuve que j'ai toujours redoutée : les vestiaires. Comme à chaque fois, je me change dans les douches pour ne pas exposer mon corps au vu et au su de toutes. Je déteste me sentir épiée et si vulnérable dans ces vêtements. Mon jogging et mon tee-shirt large à l'effigie de l'école sont agréables à porter, mais je me sens emprisonnée quand je les enfile dans ce contexte.

Dans une tenue de sport, je me vois comme une fraude. Parce qu'on nous donne l'impression que seulement les gens minces sont en droit d'utiliser ces fringues pour leur usage premier ; que les personnes comme moi n'arborent ce type d'habits que pour traîner chez eux ou par manque d'envie de s'habiller convenablement. Et je ne parviens pas à m'enlever de la tête que les autres savent : je suis déguisée pour deux heures.

Après tout, si ce n'était pas la vérité, je ne serais pas en surpoids, n'est-ce pas ?

Si seulement c'était aussi simple...

Une fois changée, je m'arme de courage pour retourner dans la fosse aux complexes. Quelques filles se cachent comme elles peuvent, tandis que d'autres s'exposent comme si c'était la chose la plus naturelle du monde. Ces filles-là, je les admire et les envie. Si je venais à retirer mon haut devant elles, j'aurais l'impression d'être au milieu d'une scène, seule, éclairée par une unique lumière face à un public équipé de jumelles pour mieux voir mon ventre trop rond, mes hanches trop marquées, les fossettes dans mon dos... et le mot « grosse » écrit partout sur mon corps, pour que je n'oublie jamais à quoi ressemble mon reflet. Heureusement, les douches existent et me protègent de cette épreuve quand elles ne sont pas prises par d'autres qui ressentent le même besoin de s'éloigner de tout ça.

Melissa, aussi inscrite dans ce cours, m'attend devant la porte une fois changée. Nous quittons les vestiaires et je respire un bon coup loin des autres, même si le répit est de courte durée.

Maintenant, je dois me préparer à la seconde épreuve : le sport en lui-même. J'ai choisi la course pour éviter les sprints que certaines activités demandent, qui mettent à mal mon asthme. Mais durant ces deux heures, je sais que toutes mes difficultés respiratoires ou d'endurance ne seront expliquées par les autres que par mon poids. Ils ne penseront pas à mon asthme, qui m'empêche d'atteindre les mêmes attitudes qu'eux, non. Ils sont persuadés que ce n'est dû qu'à ma mauvaise hygiène de vie, rien d'autre... Et je le sais, car lorsque les cours de sports étaient encore obligatoires, certaines personnes se sont senties obligées de me balancer ce genre de remarques en pleine figure, comme si leur regard était détenteur de toute la vérité. Comme si je n'étais pas consciente de mon propre corps et qu'ils étaient là pour m'ouvrir les yeux.

Une bande de connards moralisateurs dont la minceur ne les a pas épargnés de la connerie pure.

En arrivant sur le terrain de course, j'ai un instant l'impression que mes yeux me jouent un mauvais tour. Lucas est là, planté à côté de la blonde avec laquelle il a quitté le lycée la dernière fois. Et je ne comprends pas ce qu'il fout ici ?

— Oh, ton poulain, lance Melissa en pointant du menton le concerné, qui ne tarde pas à capter notre attention sur lui.

Je me détourne d'un coup, trop vite pour paraître naturelle, mais je m'en fiche. J'étais persuadée que Lucas et moi nous verrions seulement pendant les heures de soutien, pas ailleurs. Déjà que le croiser chez Elly m'a donné l'impression d'une mauvaise blague, devoir partager un cours – de sport qui plus est ! – avec lui me paraît être le résultat d'un karma bien pourri.