Chapitre 1- Svetlana

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Assise derrière le grand bureau de verre dont les baies vitrées livrent une vue magistrale sur Lower Manhattan, je tente quelques tours avec le confortable fauteuil de cuir noir dans lequel je suis assise.

Tout est beaucoup trop masculin pour moi ici mais pour ce poste de chirurgien cardiaque au centre new yorkais de One Heart, j'aurais accepté du papier peint à fleurs moutarde et orange.

Avec même une petite touche de marron en plus.

Un petit tour supplémentaire, yeux clos, pour remercier une fois encore mon chef et surtout ami, Raphaël Lemarquand, d'être tombé amoureux d'une de mes amies au point d'en oublier un peu la chirurgie, le temps de l'aimer dans tous les endroits paradisiaques du globe.

Et croyez-moi, malgré le réchauffement climatique et autres sujets désolants, lorsqu'on a les moyens, on arrive encore à en trouver.

Enormément, semble-t-il, puisqu'aucune date de retour n'est prévue.

Un dernier tour pour le bénir de m'avoir fait confiance au point de m'imposer à ce poste, moi la jeune Serbe sans réseau, en utilisant ses connexions de privilégié pour me permettre d'opérer aux Etats-Unis sans y avoir étudié, avec mon seul diplôme européen de chirurgien.

Ce poste de ouf, comme l'a si bien dit mon amie Charlotte, lorsque je lui ai annoncé la raison pour laquelle j'allais, moi aussi, quitter la France après Romy.

Mon sourire est aussi béat, même deux mois après mon arrivée à New York, mais je me ressaisis, ma journée de consultations ne fait que commencer et j'ai plutôt intérêt à être concentrée. Je viens de commencer à prendre connaissance du dossier de mon prochain patient lorsque la voix tonique de Kimberley retentit à travers l'interphone posé sur mon bureau.

— Désolée de te déranger Svetlana.

— Pas de souci Kim. Un problème ?

— Pas vraiment, non !

La voix de Kimberley me semble quand même nettement plus aiguë que d'habitude. — C'est juste que...

— Que quoi ?

— Tu sais qui est ton prochain patient ?

— Monsieur Steadman (je lis le dossier ouvert sous les yeux à l'écran de mon Mac) est âgé de 68 ans et au vu des résultats des examens prescrits par son cardiologue, je vais devoir l'opérer d'une valvulopathie. Probablement cette semaine, j'imagine, si les créneaux de bloc le permettent encore. Tu sais quand il doit voir un anesthésiste ? Rien d'anormal a priori, si ?

— Noooon... Sauf (démentant son propos, la voix de Kim atteint des sommets insoupçonnés. D'autant plus impressionnants qu'elle essaie de chuchoter) qu'il est venu accompagné de son petit-fils.

J'avoue ne pas comprendre où Kim, d'ordinaire plutôt directe, veut en venir.

— Et ? Qu'y a-t-il de particulier, à part que cet homme a de la chance de ne pas avoir un petit égoïste comme descendance ? Ce n'est pas comme si j'avais une fascination pour les hommes, si ?

Un piaillement me répondit. Suivi d'une logorrhée en mode hystérique et probablement pas aussi discrète que le pensait mon assistante.

Hélas.

— Punaise Svetlana, je ne peux pas trop parler, il est presqu'en face de moi. Je n'ai pas mes lunettes mais je suis certaine que c'est le guitariste des K-A9 ! Et crois-moi, vu l'attitude dans la salle d'attente de la gamine qui accompagne le patient suivant, je pense que c'est vraiment lui. Même toi tu ne peux pas être insensible à sa présence ici !!

TRY BABYWhere stories live. Discover now