Chapitre 1 : On ne peut plus être ensemble !

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En toute franchise, je crois être la personne la plus cruelle que je connaisse. Un monstre. Oui, ce mot me définit assez bien je trouve. À vrai dire, peu importe l'opinion que je peux avoir de moi, c'est bientôt ce qu'Il pensera, de même que tous nos amis lorsqu'ils apprendront la nouvelle... Une fois mon secret avoué, ébruité, amplifié, jamais il ne me pardonnera. De toute façon, il serait égoïste d'attendre de lui une autre réaction...

Je ne serais pas dans cette situation si j'avais eu le courage de le rejeter directement le jour où il m'a avoué ses sentiments. Mais je suis faible, je ne supporte pas de blesser les autres. Lorsqu'il a planté ses yeux francs et anxieux dans les miens, je me suis sentie prise au piège. L'enthousiasme qui l'a saisi après mon « Oui » légèrement timide a achevé de refermer la cage où je m'étais moi-même enfermée, incapable que j'étais d'assumer mes envies. Il sautait de joie devant moi, heureux. Je ne pouvais décemment pas briser net son enthousiasme, strier de larmes son visage, ternir l'éclat de ses yeux et éteindre son sourire comme une brise caressant fatalement la flamme d'une bougie... Impossible, ça me paraissait le pire des crimes. Pourtant, je savais déjà que ces sentiments ne seraient jamais réciproques.

Malgré ça, j'ai pris mon courage à deux ce matin et je l'ai invité à me rejoindre au parc pour parler. Je le vois arriver vers moi, son sourire solaire toujours accroché aux lèvres, les yeux éclairés d'un éclat de bonheur que je ne lui avais jamais vu. Ma résolution vacille un instant avant que je ne me ressaisisse. Je ne peux pas plus longtemps lui donner de faux espoirs.

- Salut, Ino !

Sa voix a des accents que je ne lui ai jamais entendus.

- Salut... Naruto.

Il reste planté face à moi, un sourire embarrassé, son bras en équerre pour gratter ses cheveux d'or. Il est nerveux ?

- Écoute, je sais que c'est toi qui m'a donné rendez-vous, Ino, mais j'ai moi aussi quelque chose d'important à te dire...
- Euh... D'... D'accord, je t'écoute, je bafouille, prise au dépourvu par le retournement de situation mais surtout son attitude inhabituelle.

Il regarde autour de nous, mais le parc est désert à cette heure-ci. Son visage prend des accents inquiets et lorsqu'il se tourne à nouveau vers moi, c'est pour scruter ses pieds. Je fronce les sourcils, être si timide n'est pas dans ses habitudes. Son corps se tend d'un coup, il semble se décider et lance son regard droit dans le mien tout en prenant une inspiration avant de lâcher, sans doute plus fort qu'il ne souhaitait :

- Ino ! On peut plus être ensemble !

La stupeur me projette au fond du banc et mon dos heurte le dossier. Vraiment ? Il se méprend sur ma réaction et se tortille en baragouinant des excuses que je ne suis pas en état d'entendre. Mes lèvres s'étirent doucement et j'éclate d'un rire libérateur. Il se fige et m'observe comme si j'étais démente. Je finis par me reprendre et entre deux hoquets, je tente de le rassurer.

- Ne t'en fais pas, tout va bien. C'est l'ironie de la situation qui me fait rire...
- L'ironie ? Quelle ironie ? fait-il, incertain.
- Je voulais qu'on se voie pour rompre, dis-je simplement en remettant ma mèche de cheveux en place.

Il reste là, déconcerté et reprend d'une petite voix.

- Mais... Mais pourquoi ?
- Je suis vraiment désolée Naruto, j'aurais dû te le dire plus tôt mais... Le jour où tu as fait ta déclaration, je n'ai pas pu... J'espère que tu ne m'en voudras pas trop de ma lâcheté, je t'aime beaucoup, mais je n'ai jamais pu t'envisager comme autre chose qu'un ami.

Il regarde ses pieds puis finalement hoche la tête.

- Oh, d'accord, je comprends...

Je saute sur mes pieds et lisse ma jupe d'un geste souple avant de lui mettre une tape sur l'épaule.

- Je suis contente qu'on se soit parlé ! J'y vais, j'ai des choses à faire.
- Mais... Attends, Ino ! Tu n'as rien dit à propos de Sasuke ! me crie-t-il alors que je suis déjà loin.

Que vient faire Sasuke dans tout ça ? Je hausse les épaules, peu importe, je finirais bien par l'apprendre tôt ou tard. Pour le moment, ce qui m'importe est de regagner mon lit le plus rapidement possible. J'étais tellement angoissée par ce rendez-vous que je n'ai pas fermé l'œil de la nuit... Je bâille ostensiblement en arrivant chez moi. Je rentre par la fenêtre entrouverte pour éviter de passer devant ma mère qui me donnerait sûrement une énième tâche à effectuer pour la boutique. J'ai tout juste le temps d'enlever mes chaussures avant de m'écrouler sur le lit et sombrer dans un sommeil profond et sans rêves.

Chacun à sa placeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant