35.
Le courage de RowenaBrésil, 1985
La première réflexion que se fit Rowena était qu'elle n'était pas censée sentir le vent faire onduler ses cheveux si elle était à l'intérieur de l'école. Elle ouvrit les yeux, et un hoquet de stupeur franchit la barrière de ses lèvres. La seconde était qu'elle n'avait aucune idée de comment elle était arrivée au beau milieu de la forêt amazonienne.
Autour d'elle, les arbres et le paysage vert ne laissait pas de place au doute quant à sa position. Elle tourna sur elle-même, le cœur serré. Elle était sortie de Castelobruxo sans en avoir conscience et même si elle n'avait pas envie d'y penser, cela lui rappelait l'incident qui s'était produit lors du cours de potion. La peur dans le regard de Tao alors qu'elle pointait un scalpel sur la gorge du péruvien la hantait. Une fois encore, elle avait perdu le contrôle de son esprit pendant un temps et cela la terrifiait. Qu'avez-t-elle fait ? S'était-elle contentée de marcher en direction de la forêt ou avait-elle, encore une fois, fait du mal à l'un de ses amis ? Elle frissonna. Elle préférait ne pas y penser.
Ses yeux s'arrêtèrent sur une masse sombre à quelques mètres d'elle et ils s'écarquillèrent de stupeur lorsqu'elle l'identifia.
— Azalée !
Lorsque Rowena arriva au chevet de son amie, elle frémit. La sorcière était inconsciente, mais vêtue des mêmes vêtements sombres qu'elle portait lorsqu'elle avait disparu. Elle ne semblait pas blessée, mais son visage était d'une pâleur maladive et complètement gelée. Wyna déglutit. Elle eut beau secouer sa camarade dans tous les sens, cette dernière restait plongée dans les bras de Morphée.
Alors qu'elle regardait autour d'elle, cherchant quoi que ce soit qui pourrait lui être utile ou lui venir en aide, son regard se posa sur le bloc de pierre qui se dressait sur sa droite. Elle reconnue sans peine la stèle qu'elle avait déjà vu lors de leur première expédition dans la forêt. Elle sentit ses poils se hérisser sur ses bras à mesure qu'elle prenait conscience de la situation et que la peur s'insinuait sournoisement entre ses pensées emmêlées.
— Merde, jura-t-elle à voix basse en lâchant les épaules d'Azalée, toujours inerte. Par Morgane, je suis dans le pétrin...
Elle ne se souvenait plus exactement combien de temps ils avaient mis la dernière fois pour se rendre jusqu'à la stèle. Ils avaient été attaqué par des Caipora et forcés de se séparer, mais Rowena était à peu près certaine que la distance à parcourir restait conséquente. Elle abandonna l'idée de retourner à l'école en portant Azalée sur son dos, elle savait qu'elle ne dépasserait pas quelques mètres avant de s'écrouler. Néanmoins, elle ne pouvait se résoudre à abandonner la jeune femme, seule et inconsciente dans la forêt amazonienne. Les élèves avaient beau avoir l'autorisation de s'y rendre la journée, les professeurs leur avaient répété toute leur scolarité de ne jamais sous-estimer la forêt et ses dangers. Laisser Azalée inconsciente ici, c'était risqué qu'il lui arrive quelque chose d'encore plus grave.
— Réfléchit, Rowena, réfléchit... se murmura-t-elle à elle-même pour se donner du courage.
Elle se massa les tempes dans l'espoir que ce geste fasse naître une idée de génie dans son cerveau. Plongée dans ses réflexions, elle sursauta violemment lorsqu'un son brusque, comme un tambour, s'éleva de nulle part pour résonner dans la forêt.
Rowena sortit sa baguette qu'elle brandit devant elle, par réflexe. Le son semblait venir de partout et nulle part à la fois. Un mauvais pressentiment accompagné d'une sensation de déjà vu lui tordit l'estomac. Impression qui se vérifia quelques secondes plus tard, alors que des voix chantantes s'élevaient. De nulle part, encore une fois. Sans doute n'était-ce même pas des voix du présent.
La sorcière frissonna. Elle connaissait ce chant, même si elle était incapable d'en comprendre les paroles. Elle l'avait enduré, forcée de l'écouter, car il avait martelé son esprit pendant des jours et des nuits, l'empêchant même de fermer l'œil. Ces voix qu'elle entendait s'était estompées d'elles-mêmes, avant qu'elle ne se soit décidée à aller parler à un professeur.
Elle s'était longtemps demandé ce que signifiait ces voix et son hypothèse comme quoi ces dernières avaient un lien avec le mystère de l'école prenait tout son sens à l'heure actuelle. À nouveau, elle ressentait la tristesse et la peur contenue dans ces voix chantantes, comme si elles chantaient à contrecœur. Avec une telle intensité que cela faillit la faire fléchir.
Elle se souvenait des propos de Tartarugas sur les sacrifices incas, de véritables cérémonies dédiées à tel ou tel culte. Elle comprenait, à présent. Ses paroles incompréhensibles qu'elle imaginait sans peine être chantées alors qu'une innocente s'avançait vers l'autel sacrificiel. Cette sensation de peur, de tristesse, et à la fois d'une grande fierté, pure fruit de cette victime tuée au nom d'un dieu, et pour qui, en tant que croyante, cela devait revêtir une forme de fierté.
C'était limpide, leur enquête s'éclaircissait à mesure que le son martelait ses tympans.
Elle jeta un regard vers l'adolescente blonde, toujours inconsciente. Rowena inspira profondément, dans l'espoir de calmer les battements de son cœur qui s'emballaient sous l'effet du stress et de la peur qui commençait à monter. Elle n'était pas seule. Elle ne pouvait pas se permettre de flancher, car si elle s'écroulait, Azalée en pâtirait. Elle déglutit et balaya tous les souvenirs des différents qu'elle avait pu avoir avec la sorcière.
Rowena n'était peut-être pas la meilleure des amie, mais elle était incapable d'abandonner un camarade.
Elle sentait la magie noire tout autour d'elle, même si elle était incapable de la voir. Elle redoutait le moment où cette dernière tenterait encore une fois de prendre le contrôle de sa conscience pour assouvir ses sombres desseins, mais elle était forte. Ou du moins, elle allait l'être. Dans un souffle, elle se campa fermement sur ses deux jambes, baguette levée devant son ennemi invisible. Sa main tremblait. Ses genoux s'entrechoquaient, et un coup suffirait à la faire basculer. Elle ne savait pas quel sort utiliser, elle ignorait quel type de magie lancer, mais qu'importe. Elle ne se laisserait pas contrôler une troisième fois.
— Allez, amène-toi ! lança-t-elle pour se donner du courage. Essaye seulement de t'en prendre à Azalée ou à moi, et je vais vite te renvoyer d'où tu viens !
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Les fantômes de Castelobruxo ❊ HP FANFIC
FanfictionÉCOLE DE SORCELLERIE : CASTELOBRUXO Brésil, 1985 Masqué par la forêt amazonienne, le quotidien des élèves est rythmé par l'étude des créatures magiques et la classification de plantes étrangères. Après une énième dispute entre Tao et son botruc de c...