De Six A Neuf

Chapitre 3

Le jour a pris la relève, et ils sont sortis de leur soirée. En fait, ils n'en sont pas tout à fait sortis... Ils débriefent. Et cela consiste à compter les points. Ils sont partis de chez Xavier parmi les derniers. Heureuse surprise, d'ailleurs, cette soirée. Et surtout pour eux, les deux garçons, Diallo et Vincent, qui, quelques heures plus tôt, s'y rendaient à reculons !

Le jour a chassé la nuit, et ils se racontent leur soirée. Samedi matin, le balcon de l'appartement de Sophie ouvert sur un Paris qui dort encore. Nos trois amis sont enflés chacun sur un bout de canapé ou de fauteuil, enfonçant leur fatigue dans les coussins.

La nuit est passée trop vite ; ils ont bu, ils ont ri, et ils ont aimé, quelques heures, même si parfois ils ont fait semblant. Et finalement, avec ces gars de la fac, ils auront réussi à sympathiser.

Diallo et Vincent sont même parvenus à discuter avec quelques-uns de leurs anciens camarades, Olivier, Philippe, Tom, en l'occurrence, ce qui ne s'était quasiment pas produit pendant une année. La conversation s'est engagée sur le foot. Sur la finale de dimanche, bien entendu, chacun se livrant à son pronostic. Un bon début se disent-ils, jusqu'à ce que cette discussion se dévoie sur leurs perspectives d'avenir : « Alors, vous avez déjà pensé à votre troisième cycle ? », et qu'ils s'échappent de ce petit groupe. À ce moment, Diallo et Vincent ont retrouvé dans les yeux de leurs interlocuteurs cet air qui les avait tenus à distance pendant une année : trop sérieux ! Pour leur soirée leurs objectifs étaient tout autre, bien plus basiques : remplir leurs verres jusqu'à la fin, et trouver quelqu'un avec qui la finir.

Ils ont fui, prétextant une excuse bidon pour se réfugier à quelques mètres de distance où se dressait le bar, et ils y ont retrouvé Sophie, conformément à leur promesse faite en début de soirée de se retrouver à intervalles réguliers pour faire le point dans la nuit.

« How goes your night young lady? demanda Diallo.

— I think not so bad! Sophie en tournant le regard sur Xavier.

— Tu parles anglais maintenant ? demande Vincent à Diallo.

Et avant que ce dernier ne lui réponde :

— Some people who speak English! leur adresse un inconnu.

— Just because he drunks! reprend Vincent »

Ils se tournent, et face à eux se dresse un type aux larges épaules, et qui a sans doute osé le déguisement le plus osé de la soirée : Tarzan, pieds nus, perruque aux cheveux long, et un bout de tissu en guise de short ! Osé ! Car avec les trois mousquetaires, ils sont les seuls ce soir à avoir joué le jeu du déguisement. Une solidarité se crée immédiatement avec Tarzan, jeune italien ami de Xavier. Ils se croiseront à plusieurs reprises, se tapant dans la main, lui lançant un « Tarzan !!! » amical. « Les mousquetaires ! », leur répond-il. « Toi, tu es d'Artagnan ?! », à l'adresse de Diallo.

Quelques heures plus tard, il finira ivre, allongé au milieu de la pelouse, sa copine, elle aussi italienne, le veillant, et rassurant les regards inquiets. « J'ai l'habitude », répondra-t-elle à plusieurs reprises en posant un œil bienveillant sur son compagnon dont les mouvements montants et descendants de la cage thoracique étaient pour l'heure la seule preuve de vie.

Quant à Xavier, rien à redire ! Dans son jardin aux frontières de Paris, il a su donner une fête inattendue. Diallo s'est même étonné de retrouver quelques connaissances qu'il croyait perdues et qu'il ne s'attendait pas à retrouver chez un type comme Xavier. Paris, ce tout petit monde... Reda par exemple, un homme on ne peut plus vif, aux histoires pas toujours claires. Avec lui, écouter et ne pas renchérir. Jusqu'à ce que Diallo se dise qu'il était temps de commencer à attaquer. Fini les discussions entre mecs !