Chapitre 1

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Paris, été 2000

Il est six heures, un peu plus, ce vendredi de la fin juin. En cette heure du jour, une douce chaleur flotte sur le Bois de Vincennes. Nos trois amis, Sophie, Diallo et Vincent sont à la rame sur le lac. Pour tous les trois, c'est le début de la liberté, les examens étant finis depuis la veille. Plus de contraintes, ils peuvent enfin vaquer, selon leur bon plaisir, à leurs occupations.

Sophie et Vincent mènent la barque depuis un petit quart d'heure. A l'arrière, Diallo est obnubilé par sa dernière acquisition, un téléphone portable. Il en essaie toutes les fonctions, s'émerveille quand il en découvre une nouvelle, insoupçonnée, et ne manque pas d'en faire profiter ses deux compagnons. Mais en ces derniers instants de la journée, une même question les habite : que vont-ils faire ce soir ; pour profiter de leur premier moment de liberté depuis si longtemps ?

« Alors, pour ce soir ? demande Sophie tout en ramant.

— Pour ce soir... ? Il est encore trop tôt pour se poser ce genre de question, lui répond Vincent en face d'elle.

— Mais tu as très certainement une bonne idée ? lâche Diallo en continuant de tapoter sur son téléphone.

— J'ai..., commence-t-elle d'une voix hésitante. Oui, cette soirée avec des gars de la fac, finit-elle par confesser. »

Froncements de sourcils, et regards complices entre Diallo et Vincent : d'accord, comme ils le disent eux-mêmes, ils ont la dalle, et rien ne se profile pour le moment ; mais de là à endurer une soirée avec des mecs qu'ils ne peuvent pas encadrer... Non ! Ce serait...? Capituler. Des crevards d'accord, mais avec une certaine idée d'eux-mêmes ; de bons crevards. Pas question de donner un tel plaisir à ces gars-là.

— Je ne comprends pourquoi vous ne les aimez pas ?

— Pourquoi ? Parce qu'ils se la pètent grave !

— Et pour rien, avec leur supers stages, leurs plans de carrières. Ils sont gonflants ! Et, c'est bon l'année est finie. Basta !

Comment a-t-elle pu leur proposer un tel plan ? Arrivée cette année pour la troisième année à la fac, et fraîchement débarquée dans la capitale, se disent-ils intérieurement, ignore-t-elle les subtilités des nuits parisiennes. On ne se jette pas sur le premier plan venu. On attend, on louvoie, et l'on se décide tard.

Au-delà de ces considérations de style, les deux amis ne souhaitent pas se lier les mains si tôt. Chacun est en attente d'une réponse pour mieux procrastiner. Le soleil a quant à lui à peine renoncer, pourquoi se presser ?

Et, après près plus d'un mois de révisions et d'examens, Vincent comme Diallo sont à la recherche d'une soirée qui leur permette enfin de serrer, sans trop de difficultés si possible. Oui, ils ont la dalle ! Et ces mecs de la fac, par leur obsession à parler de plans de carrière, ne collent pas à l'esprit de ces premiers jours de liberté retrouvée. Diallo et Vincent souhaitent pour ce soir un taux d'amusement élevé, de la légèreté et une abondance de plaisirs ! Voilà ce qu'ils attendent de la soirée à venir.

Il est six heures, le soleil s'empourpre, crie et déchire le ciel. Il est six heures, peut-être un peu plus, et le temps paraît suspendu. Ils sont sur l'eau, les examens derrière, trois mois de vacances devant, et en cet instant en parfait accord avec eux-mêmes : ils ont fait ce qu'ils avaient à faire, certes péniblement, mais pour en fin de compte valider leur troisième année. Reste à présent à profiter de leur premier week-end de vacances. Moment délicieux et unique.

Sur la rive, on voit des gens courir, certains avec des contractions sur le visage qui laissent à penser que cela n'est pas qu'une partie de plaisir. Plus calmes, sur l'herbe, des groupes se sont formés : des familles, des jeunes gens et quelques couples ; ils discutent, se renvoient le Frisbee, ou tout simplement lézardent. On tape aussi le ballon, porté par les belles performances de l'équipe de France. N'oublions pas que dans quarante-huit heures aura lieu la finale de l'Euro, France-Italie !

De Six A NeufWhere stories live. Discover now