Chapitre 34

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Il est devant sa porte avec ses valises à l'heure convenue. Les vacances sont enfin là, et après avoir salué ses deux amis une dernière fois, il s'est rendu directement là, attendant qu'elle ouvre la porte. Draco attend patiemment quelques minutes, jusqu'à ce qu'elles se transforment en une heure, et qu'il pose la main sur la poignée, pour la tourner.

A sa grande surprise, la porte s'ouvre. Et il peut s'engouffrer à l'intérieur de ce qu'il semble être le bureau au Ministère. Oubliant encore une fois la notion d'intrusion dans un espace qui n'est pas à lui, il pose sa valise, referme la porte, et fait quelques pas dans la pièce pour mieux la regarder.

Ce n'est pas qu'une pièce aussi grande que l'infirmerie, qu'il découvre. Il remarque que c'est un endroit tout aussi encombré qu'il est possible de mettre du bazar dans une boite, en dépit des moulures de bois superbes qui tendent à orner la rambarde d'un escalier, lequel mène, de ce qu'il en voit, à une portion d'étagères remplies de livres.

- Déjà là ? demande Helena en arrivant, un carton plein dans les bras.

Elle le lâche à quelques centimètres du sol avant qu'il n'ait eu le temps de lui proposer de l'aide, et elle s'essuie le front d'un revers de bras.

- Je suis plutôt en retard, en principe, répond-il distraitement.

Elle sort une montre de sa poche, les sourcils froncés, la secoue, sans grand succès de fonctionnement supplémentaire, et termine par la jeter dans le carton avec un soupir contrarié.

- Je n'ai pas fait attention. Désolée. Tu as pu ouvrir la porte ?

- Oui, ça m'a un peu surpris, d'ailleurs.

- Et tu es arrivé en entier ? demande-t-elle comme si elle n'avait pas entendu sa remarque. Pas de nausées, vertiges... ? Tu as biens dix orteils ?

Par incertitude, il le secoue dans ses chaussures avant de répondre :

- Tout me semble normal.

Elle frappe des mains, ravie :

- Alors ça a fonctionné. Tu pourras me retrouver par ma porte, si tu as besoin. Tu pourras l'ouvrir jusqu'à ce que j'annule le sort ! Bon, la porte de mon bureau privé sera peut-être fermée, mais tu auras toutes les autres. Sauf celle de ma salle de bain, aussi, dit-elle avec réflexion. Mais voilà ! Bien dormi ? Prêt à travailler ? enquille la sorcière sans plus cesser de sourire.

- Oh, euh, oui, ça va. J'ai laissé ma valise près de la porte...

- C'est l'endroit le plus sûr pour elle, je pense, tu devrais la laisser là-bas, dit-elle avec sérieux. Sinon... j'ai surtout beaucoup de livres à ranger, ce serait le moins lourd pour toi, tu arriverais à me retrier tout ça ? J'en ai dans tous les coins. Et j'ai pas mal d'objets inutiles, aussi. Plusieurs personnes vont passer dans la semaine pour acheter des objets que je jette. Si tu ne veux pas les voir, tu pourras toujours lire dans un coin, ou écrire, ça te fera une pause digne de ce nom.

Il acquiesce, prenant note de toutes les informations qu'elle lui donne :

- Oh, et tous les livres ne se rangent pas ici. J'espère que tu sauras les reconnaitre. Et ceux là, tu pourras, en passant par cette porte...

- Les remettre dans ta bibliothèque.

Elle sourit.

- C'est ça ! Méfies-toi, certains sont un peu sauvages... je te laisse te familiariser avec les rayonnages.

Elle ramasse son carton, prête à repartir dans l'autre sens quand il l'interpelle :

- Euh... par contre, je ne pense pas pouvoir y accéder avec tout ça...

Il montre l'empilement de ce qui semblerait être des cadeaux qui n'ont pas été déballés.

- Oh, eh bien, si tu peux les descendre, près de la table, là. Je vais m'en occuper. Je crois qu'il y a des livres dedans, en plus.

Elle vient l'aider quelques minutes plus tard, et en moins d'une heure, il peut monter l'escalier pour descendre le reste.

- Pourquoi tu ne les ouvre pas ?

- Parce que je n'ai pas le temps. Et que même si ça me fait plaisir, je ne n'ai pas besoin de tout ça.

- Mais tu ne sais même pas ce que c'est.

Elle hausse les épaules.

- Si j'en avais besoin, je saurais de quoi je manque. Il ne me manque rien, je ne pense pas que ces cadeaux me soient utiles. Mais on va regarder ensemble, si tu veux, des fois que tu trouve un truc que tu veuilles garder.

Il acquiesce, se disant qu''il n'y aurait sans doute là que des babioles, et ravise son jugement au cours des heures suivantes. Bon nombre d'objets sont inutiles à Helena, mais valent une véritable fortune ou ne serait-ce qu'un investissement pour Draco : des carnets à feuilles mobiles, une cape imperméable brodée de fil d'argent, des encyclopédies originales de sorciers dont on ne parle que trop peu pour leur œuvre, des instruments de musique enchanté, deux baguettes magiques, une épée de parade, les clefs d'un appartement, des chaussures en cuir de dragon, et d'autre trésors encore.

Et quand quelques heures encore plus tard, des premiers acheteurs se présentent au bureau, il fait ce qu'ils ont convenu : il se retranche dans la bibliothèque, pour ranger les livres trouvés, et faire une pile des livres qu'il peut emporter, sidéré par le manque de valeur aux yeux de la sorcière, qui lui a dit honnêtement : « Mais je l'ai déjà lu dans une autre version. A quoi peut bien me servir une deuxième ? ».

L'étudiant les pose proprement sur le coin d'une table, les mains fébriles. De la conversation qu'il entend au travers de la porte ouverte, le dernier invité est toujours là. Et puisqu'il a terminé de ranger ce qu'il a apporté ici, il glisse affectueusement ses doigts sur la première couverture, et ouvre doucement l'ouvrage.

Les enluminures sont d'une qualité remarquable, et il frissonne en regardant les légères irrégularités dans l'écriture, prouvant que l'objet de feuilles entre ses doigts a bien été écrit à la main. Et sans plus se soucier de l'heure, alors qu'il ne pensait que jeter un œil, Draco se replonge dans ce livre qu'il a découvert à Poudlard, et qu'il se faisait un point d'honneur à relire tous les ans depuis. Comme une habitude secrète, il se souvient des fois où il fermait ses rideaux pour re-consulter cette histoire fantaisie, dans laquelle l'héroïne, sans origines ni famille, tentait d'accomplir son rêve. Et lorsque le livre s'achevait, il avait toujours cette sensation d'avoir découvert quelque chose de nouveau, comme une routine calmante.

La main qui se pose soudain sur son épaule le fait sursauter, et il se retourne en se tenant à la table, pâle comme un linge, le livre serré contre sa poitrine d'un bras. S'il ne s'était pas mordu la joue, il aurait sûrement crié.

- Tout va bien ? s'inquiète Helena. Je venais te chercher... ils sont partis. Je ne voulais pas te faire peur, excuses-moi.

Draco secoue la tête.

- N-non, ça va. J'ai juste... j'étais dans l'histoire, c'est tout.

Elle hoche lentement la tête et regarde la petite pile de livres.

- S'il y en a d'autres que tu veux regarder, ou garder, dis-moi. On a encore pas mal de paquets à ouvrir.

- Oui, d'accord. Mais j'espère que je ne vais pas en vouloir de trop. Je vais avoir du mal à tout emmener, dit-il en essayant encore de calmer les battements disparates de son cœur.

Elle sourit doucement.

- Les livres... ils demandent beaucoup d'attention. Et de place. On croirait qu'ils sont presque des enfants capricieux.

- Mais ceux qui sont capricieux en réalité... ce sont les gens comme nous, pas vrai ? demande-t-il. C'est nous qui voulons tous les garder, après tout.

Helena pose doucement sa main sur la pile de livre, songeuse, mais souriant avec nostalgie.

- C'est vrai...

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