2.

390 64 247
                                    

Le combat ne dura que quelques minutes. Un moment rapide et sanglant, où la mort ne cessa pas un seul instant de tenter de nous attraper.

Deux épées contre cinquante. La qualité contre le nombre. Le courage contre le repos sur ses compagnons.

Qui aurait cru que les deux femmes en cuir souple brun où reposaient précédemment capes et armures étaient aussi efficaces ? Qui aurait cru qu'un simple clignement des paupières suffise pour que les souffles ne rentrent plus dans les poumons ?

Toutes les deux, nous le savions depuis le début. Dès lors où nos regards se croisèrent pour s'offrir un sourire mutuel, moqueur.

Ils n'avaient aucune chance.

Nous nous déplaçâmes alors, avec vivacité et efficacité.

J'hésitai d'abord à dégainer les lames dans mon dos, mais l'ampleur du nombre ennemi m'avait vite rattrapé. Une dizaine de mètres nous séparaient ; distance propice à un arc à flèche.

Je ne tardai pas, ouvrai le cylindre haut de dix centimètres à ma ceinture, en sortis l'engin rétracté noir de bois et de métal. Il ne me fut pas nécessaire de lui jeter un coup d'œil pour trouver le bouton qui déclenchait le mécanisme. Un geste habituel, monotone. Mon doigt glissa sur la fente et appuya. L'arc se déploya alors de toute sa grandeur, prenant de nombreuses dizaines de centimètres par la même occasion. La corde se tendit, les différentes parties se stabilisèrent par de petites lames intérieures. J'ouvris ensuite le carquois entre les fourreaux dans mon dos et sortis trois premières flèches pour les encocher.

Un regard à peine fut jeté sur la foule adverse, et les premiers traits furent tirés. Mon père avait longuement appuyé sur ma précision, alternant entre une cinquantaine puis plusieurs centaines de distances avec mes cibles. Tout cela à six ans à peine.

Ce combat n'était donc pour moi qu'une partie de plaisir.

Un jeu, un amuse-bouche.

Chaque tir atteint une artère vitale précise.

Le cou, principalement ; les casques et armures adverses m'empêchaient la variété.

Si cela me retira une certaine partie du plaisir, voir mon amie danser avec la mort à la recherche des soldats dont je ne me chargeais pas combla ce vide.

Elle valsa sur la droite tandis que je me chargeais de l'opposé, glissa en plein cœur tandis que je m'occupais des extrémités. Une complémentarité que nous avions mise au point au fil des années. D'abord en s'entraînant ensemble, puis en décidant d'aligner nos points forts pour devenir nous-mêmes l'arme ; celle qui liquiderait quiconque se dressant sur notre route.

Trois hommes, deux femmes.

Je tire.

Deux hommes, deux femmes.

Le sang gicle de la cuisse du plus baraqué sous la lame d'Athéna ; celui du cou ensuite.

Un homme, deux femmes.

J'encoche cette fois deux flèches, profitant pleinement des dernières secondes d'adrénaline suite à l'excitation montante de ce combat.

Une femme.

Mon amie prit un profond plaisir à se charger du dernier souffle de vie ; qui prit fin, sans la moindre pitié. Faiblesse dont nous avions depuis bien longtemps appris la fatalité.

Trop de fois, nous avions subi les conséquences de cette stupidité ; aujourd'hui n'en fera pas partie.

— C'est ce qu'on appelle du bon boulot, commenta-t-elle en essuyant sa lame baignée de rouge sur le pantalon d'un cadavre gisant non loin d'elle.

Warck - SurvivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant