Réapprendre à aimer : Mila ( Histoire terminée)

Chapitre 33

     Les desserts sont apparus sur la table au moment où Ethan a passé la porte d'entrée, le grand gaillard a rappliqué dès qu'il a pu raisonnablement s'éclipser de chez ses grands-parents maternels. Son arrivée a déclenché des cris de joie chez son frère et sa sœur ainsi que chez ma fille qui lui a littéralement sauté dans les bras. Théo pourrait  se montrer jaloux mais il reste parfaitement serein face à la complicité de ces deux-là. Je me demande comment il fait, je n'aurais pas la même réaction face à une situation similaire surtout quand on sait que Camille, à huit ans, a eut son premier baiser avec Ethan. Mais il dit que ça ne compte pas que c'était une autre époque, qu'elle ne le connaissait pas encore.

     Les cookies de Mila ont énormément de succès, bizarrement les enfants ont à nouveau faim au moment des desserts. Ethan s'est assis à gauche de Camille, sa petite sœur, pas si petite que ça d'ailleurs vu qu'elle va avoir douze ans en début d'année, sur les genoux. Avec ses anecdotes hilarantes il occupe si bien Camille qu'elle en oublie un peu notre présence. 

     Maintenant remise de ses émotions Mila discute tranquillement mais malgré son sourire je sens, à sa façon de s'agripper à mes doigts, que son masque est fragile. Elle pourrait craquer à tout moment même si pour le moment elle tient plutôt bien le coup. Ça me fait mal de la voir ainsi.

     Avant le dessert, alors que les autres s'activaient, je lui avais discrètement proposé de partir mais elle n'a pas voulu m'assurant qu'elle allait mieux mais je sais que ce n'est qu'une façade. Mon dessert, une part de tarte et deux cookies dérobés dans une boîte qui passait à portée de ma main, engloutit je fais comme un peu plus tôt, je tire sa chaise en biais entre mes jambes, son dos délaisse le dossier pour se poser contre mon torse et je passe mon bras autour de sa poitrine. En douceur, j'embrasse sa tempe, mes jambes et mes bras l'enserrant afin qu'elle ne puisse douter du soutien que je lui apporte. 

     Petit à petit je sens la tension de son corps se relâcher. Machinalement elle a posé sa main sur mon poignet, celui qui barre sa poitrine, et s'appuie contre moi tout en discutant avec Marjorie, la femme de Pierre assise près d'elle. Il est question d'une robe, pour un futur mariage. Mila lui propose de venir à son atelier pour qu'elles voient ensemble ce qui conviendrait le mieux à Marjorie.

     Pour ma part je discute avec les gars de la fin de saison de rugby. Notre équipe n'est pas dans les phases finales cette année alors nous parlons des nouveaux joueurs et des autres changements qui pourraient modifier la donne l'année prochaine.

     — Je peux vous prendre en photo ? Vous êtes tellement mignons, s'extasie Camille.

     Je tourne vivement mon visage vers celle qui nous regarde avec une lueur étrange en allumant son téléphone portable. Mila a légèrement sursauté face à l'exclamation joyeuse de ma fille, renforçant par la même mon besoin de la protéger.

     — Camille, tu exagères un peu là.

     La réprimande atteint son but car ma fille baisse la tête et replace posément son téléphone à côté de son assiette. Mila se tourne pour me regarder avec un sourire élargit. Je me penche et elle attrape ma nuque pour murmurer à mon oreille.

     — On a pas de photo de nous deux.

     Surpris de ce que ces mots laissent entendre je me recule légèrement et plante mes yeux dans les siens.

     — Tu es sûr que tu veux faire ça maintenant ?

     Je murmure aussi même s'il y a peu de chance que nous ne soyons pas entendu.

     — Ce serait l'occasion. 

     Cette femme me surprendra toujours. Mes sourcils se défroissent alors que mes lèvres s'étirent largement.