ÉPILOGUE

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[JULIEN SCHWARZER]Cimetière des Accates, Marseille, 14 février 2015

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[JULIEN SCHWARZER]
Cimetière des Accates, Marseille, 14 février 2015

Je cherche la fameuse tombe, au milieu des allées.

Les parents de Laura ont décidé, quelques mois après son accident, de la débrancher. En tant que médecins, ils savaient peut-être qu'elle se ne réveillerait pas, ou alors ils en avaient rien à foutre de leur fille. Je crois qu'on ne saura jamais.

J'ai été averti de la situation par Clara, qui a insisté auprès de la famille endeuillée, pour que je puisse assister aux obsèques. Mais malheureusement, je n'ai pas pu venir. Parce que je savais d'ores et déjà que le daron allait taper un scandale, et que ce n'était ni le lieu ni le moment pour faire des remous.

Apparemment, c'était une belle cérémonie. Et je souris doucement quand je me dis qu'au moins, de là haut, elle doit être fière de l'hommage que ses proches lui ont rendu.

Je dépose un bouquet sur la plaque de marbre, et j'essuie une larme quand je vois son nom sur la pierre. Elle avait à peine 27 ans, j'en avais même pas 22.
Le crachin humidifie mon manteau de laine, et commence à tremper mes cheveux longs.

-salut... je... je sais pas si Clara ou quelqu'un d'autre est venu te voir. Je mords ma lèvre. J'ai voulu venir à l'enterrement, mais tes parents ont pas voulu. Ils disent que c'est moi qui t'es rendu comme ça. Et j'avoue que je suis totalement perdu. Je commence à pleurer. Je sais plus quoi penser, j'ai l'impression d'être une merde. Tu me manques énormément Laura. Je relève la tête vers la plaque, là où une photo de ma blonde en compétition, souriante, est accrochée. Et j'te jure que je t'mentais pas quand j'te disais que j'étais sincère et amoureux. J'fais des cauchemars de cette nuit, et j'me refais le scénario, en essayant de voir ce que j'aurais pu changer. Peut-être que tu serais toujours vivante aujourd'hui, si j'avais pas joué au con. Je marque une pause, le temps de souffler et de reprendre un peu de contenance. J'imagine ce que tu as dû ressentir, et ça m'ronge de m'imaginer ta douleur. J'ai essayé de lire ton journal intime, pour savoir ce que tu pensais de moi, et si tu avais écrit après notre dispute. Mais j'ai pas pu. Lire tes écrits, ça m'arrachait le cœur. Alors j'ai jeté les cendres dans l'eau du vieux-port, pour que tes écrits te reviennent. Je commence à jouer avec mes mains. Tu sais, quand je regarde le ciel, j'ai l'impression qu'il a changé. Qu'il est plus beau qu'avant. Je souris légèrement. Peut-être parce que je sais que tu en fais partie. Je parle souvent à l'étoile qui brille plus fort que les autres. Parce que j'ai l'impression que c'est toi. Je m'arrête de parler, et je fixe l'horizon droit devant moi. Au fait, je vais encore à notre café. Je brise le silence quelques minutes après. Et j'me promène sur les quais la nuit. Près de l'eau. Mes larmes redoublent d'intensité. Quand j'parle à la lune, dans l'espoir que tu m'entendes, j'ai l'impression de voir ton reflet dans l'eau, et j'ai envie de sauter pour te rejoindre. Mais je peux pas faire ça à ma mère, elle est déjà suffisamment endeuillée par ta perte. Elle t'aimait tellement. Je lève la tête vers le ciel, pour ravaler mes larmes. J'ai écrit une chanson pour toi. Je sors un papier de la poche de mon manteau, et le déplie. Elle s'appelle « Fusil ». Je souris légèrement. J'peux te la lire ? Je penche ma tête vers la feuille, et me racle la gorge avant de commencer.

Elle voit la taille de mes jouets
Évidemment qu'j'suis joueur
J'ai plus peur d'échouer
Noyé dans des larmes de douleur
Tes diamants, sèchent-les
Quand elle brille tout là-haut
Elle nous voit j'réalise à quel point l'ciel est beau
J'ai les mains sur une crosse, le teflon sur le dos
Dans le 'vent et la braise on a grandi
Mais j'veux mourir près de l'eau
Hein, faut qu'j'la sorte du coma
Avec ou sans love
Stoppés par l'temps, l'égo, l'amour du mauve
J'cause au murs j'entends dans ses murmures qu'j'ai mis son cœur en lambeaux

Hier encore t'avais mon nom sur les lèvres
Depuis l'aube t'es plus la même
Où qu'on aille tu m'as dit aimer c'est pas le tout
Rien n'est à moi, rien est à nous
Ma santé pour un SMIC, j'préfère crever riche et solo
Teille j'zone ivre, crosse celui qui s'met devant
Ma vie dans un disque, mon son dans ton bando
A nos morts, à nos restes en photo
Tetés haute nés pour mourir debout
On affrontera quand même

J'ai oublié comment vivre
Tant qu'le soleil s'lève avec ou sans love
Tant qu'mère n'est pas sauve
J'suis parti j'ai pris des risques
Mais j'vais pas revenir pauvre

J't'e l'ai dit j'tiendrai promesse
Tu m'as pas vu changer l'fusil d'épaule
J'ai du temps j'ai peu sommeil
Ma gorge nouée, mes peines en chiffre
Si tu m'entends j'suis entier
J't'ai dit chérie attends moi j'suis en guerre
Tu m'attends, tu m'perds
D'puis longtemps j'le savais j'ai vu clair
Laisse tomber j'ai plus mal
J'parle à la Lune j'vois ton reflet dans l'eau

Tu m'as pas vu changer l'fusil d'épaule
Tu m'as pas vu changer l'fusil d'épaule
Tu m'as pas vu changer l'fusil d'épaule
Tu m'as pas vu changer l'fusil d'épaule

Quand les regrets reviennent
J'repense et j'tourne en rond
Jamais plus je n'te dirai bébé reviens
Tant pis pour le reste j'ai pas tourné ma veste
Tu t'es sentie seule dedans
Quand le temps passe les plaies s'estompent
On oublie on vit avec
A nos morts, à vous
Gouache sur les phalanges violent
J'ai grandi j'ai plus les mêmes hantises qu'avant
J'ai choisi de l'e faire à leur détriment

Tu m'as pas vu changer l'fusil d'épaule
Tu m'as pas vu changer l'fusil d'épaule
Tu m'as pas vu changer l'fusil d'épaule
Tu m'as pas vu changer l'fusil d'épaule

J'affronterai quand même
Tant qu'le soleil s'lève
Avec ou sans love
Tant qu'mère n'est pas sauve
J'suis parti j'ai pris des risques
Mais j'vais pas revenir pauvre
J't'e l'ai dit j'tiendrai promesse
Tu m'as pas vu changer l'fusil d'épaule
J'ai du temps j'ai peu sommeil
Avant d'm'avoir dit je t'aime
M'as tu dis je t'aide
Va de l'avant réalise tes rêves
Père et mère vieillissent
La meilleure ou la pire chose qui m'arrive
Ce qu'elle me donne
J'en veux plus j'en allais mal t'as joué l'aveugle

Je range la feuille, après avoir fini de lui lire les paroles, et sèche ensuite mes joues, trempées par la pluie et les larmes.
C'est à ce moment que la pluie a cessé, remplacée par un grand soleil.

Et j'ai perçu ça comme un signe de sa part

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Et voilà l'histoire derrière le son « Fusil » !
J'espère que l'histoire vous a plu

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