Chapitre 15

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" Cette personne est peut-être plus près que tu ne l'imagines."

Je reste devant mon écran, pétrifiée. Je relis son commentaire espérant m'être trompée, mais non. C'est bel est bien le lecteur de mon blog qui a écrit ces mots.

Quelle est l'ampleur de la possibilité ? En réalité, ce ne serait pas non plus impossible. Mais comment a-t-il découvert mon blog ?

Il n'y a qu'une façon de le découvrir. Je déplace le curseur jusqu'à son nom d'utilisateur. Mon cœur omet un battement lorsque une fenêtre d'erreur apparaît devant mes yeux.

Utilisateur introuvable.

Encore une fois, il disparaît lorsque je suis à deux doigts de le démasquer. Il sème des indices que je récolte après lui. Une sensation de malaise envahit mon corps. Que suis-je censée faire ? Quand fera-t-il sa prochaine apparition ?

Je vérifie une cinquantaine de fois ma page. Chaque message, chaque commentaire, tout s'est dissipé. C'est comme s'il n'avait jamais existé. Étais-je en train de rêver durant tout ce temps ?

Non, ce n'est pas possible. Je suis sûre de ce que j'ai vu, mais... dans des cas de désespérance extrême, notre subconscient peut créer un allié imaginaire. Quelqu'un spécialement conçu pour nous soulager de nos peines, porter ce poids qui nous empêche d'avancer et nous dire tous ces mots que l'on rêve d'entendre.

Ou autrement dit, je suis devenue complètement dingue. La charge de travail ayant été trop élevée ces dernières semaines, j'ai peut-être imaginé des choses.

Pourtant... je l'ai senti. Je me souviens de sa chaleur, de son parfum. Je conserve encore la note que j'ai trouvée dans sa veste. Il existe, c'est une certitude.

J'envisage la deuxième possibilité, qui semble moins plausible après mes interminables hypothèses liées à l'identité de ce mystérieux homme : il se peut que le lecteur anonyme de mon blog et l'homme qui m'a sauvée ne soient pas la même personne. Mais alors, pourquoi ce commentaire ? Et pourquoi disparaître juste après ?

Ma tête hésite mais mon coeur en est sûr. C'est lui. Et je remuerai terres et mers pour le trouver.

Jusqu'à présent, j'ai plus ou moins réussi à élucider toutes les pistes qu'il m'a laissées. J'en ferai de même pour les suivantes. Je le chercherais et je le trouverais.

J'ouvre mon blog, prise d'une légère nostalgie. J'ai écrit sur cette même page il y a à peine quelques heures. Mais le fait de savoir qu'il ne me lira pas rend la tâche moins passionnante. Je me suis efforcée durant tant d'années de devenir une femme indépendante, suivant la fameuse citation de Maria Montessori, qui dit une fois que l'essence de l'indépendance est de pouvoir faire quelque chose pour soi-même. Je suis fondamentalement d'accord. Écrire est un acte personnel. Nous dénudons notre âme sur papier, nous transmettons nos pensées les plus intimes, partageant nos émotions à l'aide des mots.

Cependant, même en sachant tout ça, je n'arrive pas à me défaire du manque d'avoir une forme d'audience. Une seule personne suffisait à donner vie à mes écrits. En y repensant, je me voile sûrement la face. Ce n'est pas un public dont j'ai besoin. C'est lui que je veux.

L'aurai-je un jour ?

Effrayée de répondre à cette question, qui semble en principe rhétorique, mais qui ne l'est pas, je me concentre sur mon écrit.

Ce soir, nous étions plus près que jamais, uniquement séparés par la symphonie d'une mélodie. C'est toi qui a choisi la musique et c'est moi qui ai dansé. Tu m'as sûrement vue, attendue, guettée... moi, je t'ai senti.

Un pas plus près...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant