Chapitre 9

257 33 32
                                    

Les lèvres d'Andy étaient sur celles de Julien. Ses mains puissantes maintenaient son visage alors qu'il aspirait la lèvre du moine. Il refit le même geste plusieurs fois, mêlant sa langue à l'action pour essayer d'animer Julien qui était comme figé. Ses yeux étaient si écarquillés qu'ils menaçaient de tomber. Son cerveau et son corps l'avaient abandonné.

Andy, n'obtenant aucune réponse de la part de Julien, s'écarta. Il relâcha le jeune homme. Son regard, d'habitude si vibrant d'émotions, paraissait vide.

- P-Pourquoi ?

- Est-ce qu'il y a vraiment besoin que j'explique ce que je viens de faire ? Je sais que tu n'es pas coutumier de ce genre d'interaction mais... Je te l'ai dit, je tiens à toi, beaucoup.

- Tu ne peux pas... On ne peut pas...

- Pourquoi ? Parce ce qu'on est deux hommes ?

- Oui ! C'est contre nature !

- Tu le penses vraiment ? Demanda Andy d'une voix blanche en se levant.

- Andy, je... Ce n'est pas normal de ressentir ce genre de sentiments... ce genre d'attirance pour quelqu'un du même sexe, ce n'est pas ce que Dieu nous apprend. Répliqua l'ancien moine en se levant également.

- Si tu restes bloqué sur des idéaux préhistoriques, c'est ton problème mais il faudrait peut-être que tu évolues, tu ne vis plus dans ton monastère.

- N'insulte pas ma religion.

- Alors ne m'insulte pas. N'insulte pas les personnes comme moi.

Les deux hommes se firent face, Andy respirait fort, sa poitrine se soulevant rapidement alors qu'il fulminait. Julien était tout aussi énervé mais il maîtrisait mieux ses émotions, et surtout, il ne pensait pas être en tort. C'est Andy qui détourna le regard le premier. Il se détourna de Julien, portait sa main à son visage qui était baissé. Julien attendit patiemment. Finalement, le judoka se redressa, inspira profondément et se tourna pour faire face à Julien. Ses yeux paraissaient humides mais son regard assassin.

- Okay, je n'aurais pas dû faire ça. Mais il est hors de question que je m'excuse d'être qui je suis. Bonne nuit, Julien.

Andy tourna les talons avant même que l'ancien moine puisse n'ajouter quelque chose, il resta là, à regarder Andy disparaître à grands pas dans les couloirs de l'auberge. Il attendit d'entendre le bruit de la porte de leur chambre commune se fermer mais cela ne vient pas.

L'inquiétude laissa place à la colère résiduelle. Il ramassa les bières qui étaient sur la table et s'empressa de les jeter. Il remonta ensuite les couloirs en direction de la chambre qu'il partageait avec l'asiatique. Comme il le craignait, cette dernière était vide. Il vérifia la salle de bain mais Andy n'était pas là. Vraiment inquiet, il sortit son téléphone de sa poche et essaya de joindre Andy. Il tomba sur la messagerie de ce dernier, ce qui lui tira un juron. Il essaya une nouvelle fois de la joindre avec le même résultat. Il balança son téléphone sur son lit avant de s'y laisser tomber et de s'allonger, son bras en travers des yeux.

- Dieu, dîtes-moi ce que je dois faire...

Le lendemain matin, Julien était fatigué. Il n'avait pas réussi à dormir, beaucoup trop inquiet pour Andy. Il se prépara et se rendit dans la salle commune pour boire un café avant de réveiller les jeunes judokas. Il sursauta quand il tomba nez à nez avec Andy qui traversait la salle commune de l'auberge d'un bon pas.

- Andy ! Où étais-tu ? Le judoka l'ignora, remontant les couloirs de l'auberge en direction des chambres. Julien finit sa tasse de café et courut à la suite de ce dernier. Andy ? Andy !

Mais Andy l'ignora. Une à une, il alla dans toutes les chambres pour réveiller les enfants. Julien n'eut pas le loisir de se torturer plus longtemps l'esprit alors qu'il devait aider les enfants à se préparer afin qu'ils aillent au petit-déjeuner.

Pendant que tous déjeunaient dans la joie et la bonne humeur, impatient d'entamer cette nouvelle journée placée sous le signe du sport, Julien observa Andy. Ce dernier s'était installé au milieu d'un groupe d'enfants, rigolant et faisant le pitre. De prime abord, il semblait aller parfaitement bien mais Julien commençait de le connaître un peu et il voyait bien qu'il n'était pas aussi bien qu'il le laissait paraître. Ses yeux étaient cernés, son visage gris et régulièrement, son humeur devenait maussade. Julien était torturé par ses propres émotions.

La journée passa plutôt rapidement. Malheureusement, ils ne parvinrent pas à trouver un moment pour discuter. D'autant plus qu'Andy semblait redoubler d'inventivité pour lui échapper. Andy agissait comme s'il n'existait pas, allant jusqu'à utiliser les enfants pour faire passer des messages ou faire des demandes en lien avec l'accompagnement du groupe. A la fin de la journée, Julien était blasé de la situation. Il trouvait Andy quelque peu puéril dans sa façon d'agir. Il était prêt à reconnaître ses torts... Si seulement on lui laissait l'occasion de s'expliquer.

La route de retour à la maison ne fut guère mieux. Il était tard, tout le monde était fatigué de la journée. Les enfants étaient silencieux, chuchotant pour certains, dormant pour d'autres. Julien était à la même place qu'à l'allée. Andy se trouvait sur le siège de l'autre côté de l'allée. Après deux heures de route, Julien se décida à se lever et s'asseoir à côté de l'asiatique, bloquant toute tentative de fuite de sa part.

- Est-ce qu'on peut parler comme des grands garçons ? Ou tu vas te murer dans ton silence et bouder comme Elie ? Julien rigola légèrement, espérant ainsi soulager la tension. Ce fut un échec. Je... Je pense qu'on doit en parler.

- Je n'ai pas envie. J'ai compris ton point de vue.

- Moi je veux qu'on en parle.

- Parles-en avec ton Dieu, il te donnera les bons conseils.

- Andy... Pourquoi tu agis comme ça ?

Andy lui envoya un regard noir bien senti, se tournant face à la vitre. Julien le saisit par le poignet pour le forcer à lui faire face. Le judoka arracha violemment son bras de sa prise, surprenant Julien qui le lâcha.

- Fiche-moi la paix !

- Andy...

- Non, Julien. Je ne veux plus en parler. Je ne veux plus. Oublie-moi. Oublie ce que j'ai fait. Laisse-moi tranquille.

- Andy, je-

- S'il te plait... Laisse-moi tranquille. Supplia Andy tout en se levant et enjambant le siège devant lui pour échapper à Julien. 

NO controlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant