Chapitre 52

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— Bonjour Théo. 

Madame Jean est déjà assise devant une table lorsque je la rejoins dans le café après les cours. Elle porte le même tailleur bleu vif que le jour de notre arrivée.

Je me laisse tomber sur la chaise devant elle, n'ayant pas la moindre idée de la façon dont va tourner la conversation. Je ne sais même pas ce que je suis censé ressentir envers cette femme qui m'a mise au monde avant de m'abandonner sur le pallier de mes parents avec une lettre mystérieuse, comme si on était dans un roman.

— Bonjour, je marmonne du bout des lèvres.

J'ignore comment l'appeler. "Madame Jean", comme avant ? Je me vois mal lui donner du "Maman". Dans le doute, je vais éviter d'avoir à m'adresser à elle plus que nécessaire. C'est un bon plan.

— Que veux-tu boire ? me demande Mme Jean en levant le bras pour attirer un serveur. Un jus d'orange ? Un chocolat chaud ?

— Euh... je veux bien un chocolat chaud.

Nous restons silencieux en attendant nos commandes. J'aperçois Martin à travers la vitrine du café. Il surveille la rue, attentif comme un chien de garde. C'est ridicule, mais sa présence me rassure. Et me déconcentre en même temps. Pourquoi faut-il que j'ai tout le temps envie de coller mon nez contre sa poitrine ?

— Je te dois des explications et des excuses, dit soudain Mme Jean, me faisant sursauter.

Je tourne les yeux vers elle. Elle m'observe avec intensité. Ses cheveux roux virvoltent, comme électrisés.

Elle s'interrompt un instant tandis que le serveur (qui est entre parenthèse un loup de je ne sais quelle meute) dépose devant nous deux tasses fumantes. Il nous jette des regards remplis de curiosité, apparemment au courant des récents événements. Mme Jean fronce légèrement les sourcils et il s'empresse de déguerpir.

Le chocolat est brûlant. Je souffle sur sa surface pour le refroidir. Des volutes de fumée s'en échappent. Je les observe tournoyer vers le plafond plutôt que de devoir regarder la femme devant moi envers qui je ne sais pas comment me comporter. Aurait-il fallu que je me jette dans ses bras ? J'espère que non !

Mme Jean boit une petite gorgée de son thé, apparemment insensible à la chaleur.

— J'espère que tu as compris pour quelles raisons je ne t'ai pas élevé moi même ? demande-t-elle.

Je hoche la tête sans grande conviction.

— Hum... hum..., je réponds.

Je trempe mes lèvres dans la boisson chaude avec une extrême prudence, craignant de me brûler. Le liquide fume toujours. Il sent bon. Presque autant que Martin. Enfin non, quand même pas.

— Je ne voulais pas que l'on puisse remonter ta piste à partir de moi, insiste l'agente immobilière (enfin, la fausse agente). Et puis, c'était mieux ainsi. Je n'aurais pas fait une très bonne mère, à ce moment-là.

Elle pousse un soupir et boit à nouveau son thé.

Je tapote le bord de ma tasse et jette un nouveau regard embarrassé vers mon alpha de garde. Finalement, j'aurais peut-être dû accepter qu'il vienne avec moi à l'intérieur. J'aurais été peut-être plus à l'aise.

— J'ignorais que les loups chercheraient à tuer un demi-humain de ton âge, assure Mme Jean en frissonnant. Je ne voulais pas te mettre en danger, je t'assure.

Je gigote sur ma chaise.

— Hum... Je vous crois, je marmonne.

Sans cette femme, je serais resté tranquillement à Paris, avec Vincent et mes autres amis. Aucun pervers ne s'en serait pris à moi et je n'aurais pas eu à risquer ma vie face à une bande de loups-garous excités.

Le loup et moi (bxb) [terminée]Where stories live. Discover now