Les mots

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– Il faut qu'on parle.

Lucy plaque les mots avec brutalité. Natsu se pétrifie, il ressent la violence de la phrase jusque dans son corps. Ses mains, avant de devenir pierre, s'éloignent de la chaleur corporelle de Lucy.

Il se laisse aller sur le canapé et prend cet air que Lucy déteste. Celui de la neutralité. Dans ces moments là, il est impossible de savoir ce qu'il pense. Ses yeux ne sont ni pétillants ni énervés, sa bouche ni crispée ni détendue. Il devient statue. Lucy déteste lorsqu'on ne peut pas deviner ce que l'autre pense. Elle trouve que tout de suite, ça fausse la discussion.

– Parce que t'arriverais toi, à parler ? Dit-il.

Il trouve qu'il n'y a pas d'issue à leur situation. Il trouve qu'il est coincé. Il a déjà essayé de décortiquer le tout. De comprendre qui fait quoi, pourquoi son numéro est toujours dans son téléphone, pourquoi ils continuent à se voir alors qu'il est avec Sorano. Rien. Il n'y a pas d'explication à ce truc entre eux.

Lucy fait tout brusquement. Elle se rhabille en vitesse, met son sac sur son épaule et enfile ses chaussures. Natsu ne bouge pas et perturbée par son immobilité, elle se mord la lèvre inférieure parce que toutes les émotions grandissent et risquent de la bouffer. Ses faux ongles brillants tapotent nerveusement ses avant-bras.

– Faut arrêter.

Elle le dit. C'est la première fois depuis qu'ils se connaissent que Lucy dit ces mots. Victoire. Natsu lâche son masque, il ricane. Ses lèvres s'étirent en un sourire perdu, angoissé et impuissant. Il passe sa main dans sa nuque un peu moite.

– Tu sais très bien comment ça va finir, Lucy. Tu vois, j'vois même pas pourquoi t'as pris la peine d'engager la conversation.

Il sait très bien que les mots ne sont que des mots. Les actes ne suivront pas, Lucy continuera.

La colère explose. Lucy a envie d'insulter tout ce qui l'entoure. Natsu d'abord. Puis cette plante achetée ensemble. Les bouteilles de bière au sol. Cette odeur familière et bien trop renversante qui plane dans l'appartement. Tout.

– Toxique. C'est putain de toxique ce qu'on fait.

Elle choisit le mot toxique et elle trouve que c'est le mot parfait. Elle pense « définition de notre relation : toxique ». Le problème de Lucy, c'est que ce mot, elle le trouve séduisant. Que l'idée que renvoie ces lettres a un truc qui la fait tripper, qui la fait vouloir plus alors qu'il en faudrait moins.

Natsu est énervé. Faible, la colère le dévore en un clin d'œil. Son genou tressaute nerveusement et encore torse nue, il enfile son teeshirt. Là, tout de suite, il a envie de virer Lucy de chez lui.

– Ça on le sait. On le sait depuis le premier jour.

Lucy perd presque pieds, elle a l'impression de tomber de plusieurs étages. La chute est terrible. Elle avait la naïve sensation d'avoir découvert ce qui coinçait. Elle pensait que mettre un mot sur ce qu'ils vivaient pourrait faire avancer la situation. Mais Natsu dresse un mur avec cette remarque, comme elle, il aime ça.

– Putain, mais alors pourquoi on continue ?

La question de Lucy est enragée. Elle s'énerve autant contre elle-même que contre Natsu.

– Mais j'en sais rien moi. Sérieux tu fais chier Lucy là, tout allait bien.

Lucy s'esclaffe de rire.

– Mais oui tu as bien raison. Tout va bien. On ment à tout le monde et tout va super bien.

Elle insiste sur quelques mots et Natsu trouve ça agaçant. Il rêve que Lucy abandonne ce vain combat contre eux-mêmes.

– C'est pas ce que j'voulais dire..., t'as toujours cette fâcheuse manie là, de tout déformer.

Lucy s'avance d'un pas vers lui, elle n'est pas décidée à s'en aller. Aujourd'hui, elle veut des réponses et ça, même si Natsu ne les a pas.

– Il y a une différence entre déformer et changer de point de vue, Natsu. Si t'utilises le mot déformer ça montre bien que t'es égoïstement coincé là, dans ta petite version des choses.

Natsu se retient de l'insulter. Il contient de nombreux mots en lui. Des mots terribles qu'il risque de regretter. Il se contente de soupirer, la voix légèrement plus douce :

– Tu comprends pas. C'est comme..

Il se perd dans ses pensées, à la recherche du mot le plus juste.

« Vital » finit-il par dire. Lucy est sensible à ce mot. Frissons. Petit pas en arrière. Il perce son attaque.

Son cœur commence à battre trop fort. C'est la tachycardie de ses angoisses. C'est cet handicap qui la traque à chaque obstacle.

C'est peut-être ça finalement la définition de la toxicité. Un autre mot lui vient à l'esprit. Dépendance. Elle inspire plus longtemps qu'elle n'expire avant de lui faire comprendre :

– Non c'est pas vital, pas du tout. C'est une habitude Natsu. Une très mauvaise habitude.

C'est la première fois que la discussion va si loin. Natsu ne répond pas. Désaccord. Il se lève brusquement du canapé pour aller fumer une cigarette sur le petit balcon. La baie vitrée claque dans son dos. Lucy s'énerve. Elle l'insulte depuis le salon puis à son tour, elle claque la porte d'entrée derrière elle.

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Coucou! Voici le troisième chapitre, j'espère que vous aimez !

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