N & J

𝟜𝟙

Le lendemain matin, je me réveille avec des courbatures dans tout le corps. Nex et moi n'avons pas arrêté de bouger pendant la nuit pour nous mettre dans des positions toutes les plus désagréables les unes que les autres, mais nous voulions avant tout sentir le corps de l'autre, nous toucher. Maintenant, sa main repose derrière mon cou.

- Nex, je fais en le secouant.

Comme il ne réagit pas, je répète son prénom un peu plus fort. Mais une fois encore, je n'obtiens aucune réaction de sa part. Je soupire un bon cou, prends une bonne inspiration et crie :

- NEX !

Il se réveille brusquement en s'éloignant de moi.

- T'es conne, fait-il en retirant son teeshirt tandis que je me moque de lui.

À ce moment-là, Aymeric toque à la porte. Parfait timing. Je vais lui ouvrir et il nous salue en bayant.

- Vous savez que vous passez vraiment partout à la télé ? Sur pratiquement chaque chaîne.

- Oui, on avait cru comprendre, fait Nex.

- Oui, on le sait maintenant que nous possédons un post de télé en bon état. Heureusement qu'il n'y a pas de bâte de baseball dans le coin.

Aymeric hausse un sourcil, tandis que Nex se tourne vers moi.

- J'ai des courbatures à cause de toi, dit-il.

- Euh, je ne veux pas savoir, dit Aymeric. Non j'déconne, racontez-moi tout.

Un petit rire m'échappe et tandis que Nex se rhabille, nous sortons du motel et nous accoudons à la barre qui nous sépare du vide. Ça sent la pluie, là dehors.

- Qu'est-ce que nous allons bien pouvoir faire maintenant ? je demande en réajustant ma perruque.

- Je crois que j'ai une idée, dit Nex. Mais c'est risqué.

Je me tourne vers lui tandis que l'espoir renaît.

- Sur une échelle de psychopathie, tu la noterais combien de 1 à 10 ?

- 20.

- Je crois que t'as arrêté l'école trop tôt, comment ça 20 ?? C'est quoi ton plan foireux ?

- Mon plan foireux est aussi notre seul plan, mademoiselle j'aime me faire plotter le cul dans le noir.

- Eh ! je fais en lui donnant une légère tape sur le bras, faussement vexée.

- Et alors, ce plan ? demande Aymeric.

- On va aller chez les Gimenez, lâche-t-il d'un coup.

- QUOI ?? fait Aymeric.

- Euh c'est qui ?

- T'es complètement barjot ! Et elle, ils vont en foutre quoi d'elle ? retentit Aymeric en me désignant de la main.

- Ce sont les seuls qui peuvent nous protéger, et tu le sais.

- Mais c'est qui ??

- Ce n'est même pas un plan foireux, c'est un plan post mortem à ce niveau là, commente Aymeric, toujours aussi ahuri.

- Et tu vois une autre option toi ? Ça ne sera certainement pas mieux de rester ici !

- Merde mais ce sont qui les Gimenez ? je m'exclame, et ils se tournent tous les deux vers moi.

Nex lance un regard alentour, et m'indique la porte de notre chambre de la tête.

- Rentrons. On va discuter.

Je le suis sans broncher et une fois qu'il a refermé la porte derrière nous, il pousse un grand soupire en se passant une main sur le visage.

- Tu commences à me faire flipper là Nex.

- Les Gimenez sont une famille bolivienne constituée de 4 frères vivant dans le nord de l'Amérique.

- Eh bah dans ce cas c'est génial s'ils peuvent nous accueillir, non ?

- Laisse-moi finir.

Je ne l'avais jamais vu aussi sur ses gardes depuis que je le connais. Alors, je me tais et le laisse poursuivre.

- Les Gimenez tiennent aussi le plus gros réseau de tueurs à gage du monde entier

Je fronce les sourcils.

- Et... alors ? Ce n'est pas très beau, mais il me semble que vous avez également du sang sur les mains...

- Aymeric et moi travaillions pour eux avant.

- Tu veux dire avant d'être réquisitionné par le gouvernement et rencontrer mon père ?

- Ouais. Et si nous retournions là-bas, il pourrait se placer pleins de trucs plutôt merdiques.

- Quel genre de trucs merdiques ?

- Vouloir que nous retravaillons pour eux pour une durée indéterminée. Trouver mille manières de se venger chaque jour pour nous faire regretter d'être partis du jour au lendemain, et... ces 4 frères sont les plus gros chiens que je n'ai jamais rencontré. Si tu les rencontres sans personne autour pour être témoin, ils n'hésiteront pas à te tomber dessus...

Il est hors de question qu'un homme n'abuse de mon corps une fois de plus. Malheureusement, je pense que nous n'avons pas vraiment plusieurs possibilités.

- Le seul mais quand même non-excluable point positif, c'est qu'ils possèdent un immense QG où nous pourrions loger, et où personne ne nous trouvera jamais.

- C'est complètement débile de vouloir retourner là-bas, commente Aymeric, que je vois soucieux pour la première fois depuis que je le connais.

- C'est notre meilleure chance. Et je sais qu'au fond, tu le sais. Jamila, t'en es ?

Je hoche la tête, pas tellement sûre de moi.

- D'accord, très bien. Par contre une fois là-bas, tu ne t'éloignes jamais plus de deux mètres de moi. Il est hors de question que je laisse un de ces sales types te poser la main dessus.

Je hoche la tête. Même si j'ai l'impression qu'on me prive de la liberté que je recherchais justement en décidant de m'échapper le jour de la fusillade, je ne vois pas d'autre option pour le moment. Alors il va falloir que je suive et que je fasse confiance.

- Aymeric, t'en es ? demande Nex en se tournant vers moi.

Il soupire.

- D'accord, très bien. Mais à la moindre merde, t'auras intérêt à sauver nos culs.

Nex hoche la tête.

- Alors on s'en va déjà d'ici ? je demande.

Il hoche à nouveau la tête. Tant mieux, cet endroit ne va pas manquer.

- Ce n'est pas l'opulence qui manque là-bas, ça va te plaire, dit Nex.

Un rire m'échappe.

- Tu me connais maintenant. Je pense que tu as compris que tous ces trucs superficiels n'étaient qu'une couverture.

- Pour moi, tu es et resteras toujours cette petite bourgeoise pourrie-gâtée que j'ai épargné le jour où j'ai tué tous ses camardes de classe. D'ailleurs j'aurais dû me douter à ce moment-là que tu aurais une aisance pour tuer, tu n'as eu aucun mouvement de dégoût en voyant tous les corps des autres élèves. Au final je suis persuadé que tu aurais pu et été capable d'orchestrer cette fusillade toi-même.

Je lève les yeux au ciel.

- Et si on se mettait en route, au lieu de t'entendre déblatérer des conneries ?