Chapitre 1: Monotonie

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Je regardais par la grande fenêtre de la salle d'arts plastiques, ennuyée par le cours. Les gouttes s'écrasaient comme de vulgaires mouches sur la vitre et j'attendais impatiemment la fin de ce cours pour rentrer chez moi et me plonger dans un bon vieux classique français sous un plaid. Puis quelqu'un m'a tapoté l'épaule me sortant de mes pensées. Je me suis redressé et je suis retournée. Evan me regardait un sourire en coin. C'est un garçon que j'ai rencontré il y a 2 ans, c'est-à- dire en seconde, il s'est assis à côté de moi en cours de français et depuis c'est le coup de foudre. Je parle bien sûr d'un coup de foudre amical. Entre Evan et moi il ne se passera jamais rien. C'est un mec plutôt grand, 1m75 environ, châtain clair aux yeux noisettes. La peau bronzée grâce à ses étés passés au bord de la mer. Il dégage une énergie très chaleureuse et réconfortante. Sa voix est douce tout comme son corps, ni musclé ni maigre. Je le compare souvent à un café au lait, ni trop sucré ni trop amer.

-Le cours est fini mais je suppose que ton canapé a encore envahi tes pensées et tes oreilles. a-t-il annoncé suivi d'un rictus gentil.

-T'as tout compris. ai-je soupiré en m'affalant sur la table.

-Tu veux aller boire un café? a-t-il proposé avec une once de pitié.

-C'est pas de refus.

Ces derniers temps, les cours sont intensifs et je suis épuisée. A la fin de l'année je passe le bac et si je veux être accepté dans l'école d'arts de Madrid je dois redoubler d'effort. Et pour l'instant je suis mal barrée.

***

-Evan je veux pas te laisser mais je dois y aller j'ai encore plein de travail et il se fait tard. ai-je annoncé en regardant mon portable.

-Pareil. Et puis mon père va gueuler si je rentre trop tard. a-t-il répondu.

Alors on s'est pris dans les bras et je suis partie prendre le métro: ligne 5. Je suis arrivée 45 minutes plus tard devant la porte de chez moi sur laquelle ma mère avait laissé un mot "je serais de retour vers 5h. Il y a du poulet au frigo et il faut nourrir le chat. Gros bisous". Ma mère est infirmière depuis bientôt 7 ans, elle travaille souvent de nuit dans le service pédiatrie. Je pousse un long soupir de fatigue. Je serais incapable de tenir si j'étais a sa place. J'ouvre la porte et jette les clés dans le vide poche de la commande en bois clair dans l'entrée. Puis j'enlève mes chaussures que je laisse sur le coté et je retire mon manteau de cuire noir que j'accroche sur le porte manteau ainsi que ma vieille écharpe rouge vin. Puis j'allume les lumières du salon et retrouve Gribouille allongé sur le canapé sur un plaid laisser en vrac par ma mère probablement. Je lui un moment caresses et gratouilles derrière les oreilles avant d'aller dans la cuisine. Suivie de près par Gribouille qui saute sur ses croquettes. J'ouvre ensuite le frigo dans lequel je prend le tuperware que j'enfourne au micro-ondes. Je me sors une fourchette et un verre que je remplis d'eau et que j'avale d'une traite. Plus aucun bruit à présent, juste le micro-ondes et les croquettes qui résonnent dans la gamelle. Quand le micro-ondes sonne, j'attrape le bol et je traverse le couloir, au fond à droite j'ouvre la porte et me voilà dans ma chambre, ma grotte, mon repère. C'est à ce moment que je réalise à quel point je suis bordéliques: Des livres un peu partout, des feuilles orphelines, dans un coin, des palettes de peinture sèche et une toile en cours, mon lit près de la fenêtre et en face, une tringle remplis de vêtements et à côté un commode blanche recouverte de maquillage, de bijoux, d'encens ou encore de pierres. Je m'assois sur mon lit et je pique ma fourchette dans le plat. Puis j'attrape mon sac de cours et j'en sors une pochette noir, je l'ouvre et prends une nouvelle page sur laquelle je présente: Hailey Nowak, terminale 5, 25 octobre 2022, Rédaction.

***

C'est seulement vers 23H16 que je me rends compte de l'heure qu'il est. Mes yeux piquent et mon dos me fait mal. Je range la feuille dans la pochette noir que je remet dans mon sac avant de jeter le tout a coté de mon lit. Je me lève et m'étire poussant un petit cri de douleur. Je retire mon pull embarquant mon tee-shirt en même temps, puis je fais glisser mon pantalon le long de mes jambes, je jette le tout au pied de ma commode, accompagné de mon soutien gorge. J'enfile mon tee-shirt de nuit bleu marine avec une lune blanche sur chaque seins, je vais fermer ma porte et éteindre ma lumière, Gribouille parvient à rentrer avant la fermeture et se rue sur mon lit. Enfin je laisse tomber mon lit et je savoure le contact de mes jambes contre les draps frais, mon dos se détend sur le matelas et ma tête se repose sur le moelleux coussin.

***

Lorsque l'alarme de mon réveil retentit, ma première pensée fut "déjà!?". Mes paupières étaient encore lourdes et je n'avais aucune envie de quitter la chaleur et le confort de mon lit. J'ai éteint mon réveil car cette foutue sonnerie me donne le mal de crâne. Puis j'ai enfoui ma tête dans mon oreiller avant de maudir cette terre sur 5 générations. Qui donc avait eu cette fabuleuse idée de faire débuter les cours a 8h. J'ai fini par me résoudre à sortir de mon lit. J'ai d'ailleurs manqué de me casser la gueule a plusieures reprise, mes jambes étaient aussi lourdes que des briques. J'ai ouvert doucement ma porte de chambre pour ne pas réveiller ma mère qui dormait depuis seulement 1h. Je suis allé dans la salle de bain juste en face, refermant la porte derrière moi.

J'ai eu un moment d'arrêt quand j'ai vu apparaître ma tête dans le miroir, mon visage était marqué de cernes bleuâtres et mon teint était pâle. Il ne m'a pas fallu plus d'une minute pour détourner le regard de cette vision d'horreur, retirer mes vêtements et enjamber la baignoire. J'ai pris le pommeau de la douche que j'ai mis en direction de mes pieds puis j'ai réglé la température.

-Merde! ai-je grogné réalisant que je n'avais pas attaché mes cheveux.

J'ai coincé le pommeau de douche entre mes cuisses puis j'ai tenté d'attacher mes cheveux correctement, avant de reprendre la douchette en main. J'ai passé le jet d'eau partout sur mon corps puis j'ai attrapé mon gel douche que j'ai savonné partout. J'ai éteint l'eau et enjambé de nouveau la baignoire avant de m'enrouler dans ma grande serviette grise, usée par le temps. De là, je me suis nettoyé le visage et j'ai mis une crème pour paraître moins... morte. Puis je suis retournée dans ma chambre pour me préparer. Aujourd'hui je devais aller à la bibliothèque pour étudier et finir ma rédaction. J'ai enfilé mon manteau, mes chaussures et mon écharpe, j'ai laissé un mot à ma mère: " je vais à la biblio' je reviens vers 15h. Gros bisous." et je suis partie. On dit qu'en Espagne il fait chaud et beau mais pourtant il fait déjà un froid infernal à Madrid. J'ai enfilé mon casque, j'ai allumé ma musique et je me suis rendue à l'arrêt de métro pour prendre le bus jusqu'à la bibliothèque. Je me retrouvais devant un grand bâtiment de pierre tout droit sorti de l'antiquité, il y avait de grandes fenêtres et des colonnes plus hautes, "Biblioteca Nacional" était gravé au-dessus de la porte. J'y ai passé au moins 3h, ensuite, avant de repartir, je me suis accordé un petit tour au rayon littérature française. Je suis née un livre entre les mains, j'ai commencé a lire avant même de savoir parler et je me souviens avoir été la seule de ma classe de 4eme a ne pas avoir de téléphone autre qu'un vieux nokia pour joindre mes parents. Mais je l'ai plutôt bien vécue, passant des journées entière la tête dans un bouquin. A mes 8 ans, mon père m'a offert un superbe carnet noir en cuire et un stylo, ensuite j'y ai écrit des tas de petites histoires et de commentaires sur des lectures que j'avais faites. L'odeur des livres et du papier m'apaisais. J'effleurais du bout de mes doigts leur tranche. Puis quelqu'un m'a heurté me faisant tomber à la renverse je me suis cogné la tête contre une des étagères. L'inconnu s'est arrêté puis il s'est tourné en ma direction. Il portrait un costard bleu nuit, avec une chemise blanche et une cravate noir. Ses yeux étaient d'un vert presque aveuglant et ses cheveux noirs descendaient dans sa nuque, quelques mèches aussi descendaient sur son front. Il était immense, imposant, musclé et glacial. Il m'a dévisagé avant de tourner les talons et de repartir sans un mot. Quant à moi j'étais toujours par terre, les lèvres pincées. Abasourdie par ce qu'il venait de se passer.


U̸s̸...Where stories live. Discover now