Chapitre 3 - Louis

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"Alors gamin, mon banc, tu le trouves confortable ?"


Augustin vient me rejoindre, faisant rouler son déambulateur devant lui. Plutôt que s'installer à mes côtés, il s'assied sur son petit engin face à moi. Je lui offre un sourire avant de lui répondre.


"Il me va bien, oui.

- Je suis content de te voir sortir un peu plus ces derniers jours, me dit-il affectueusement.

- J'ai eu besoin d'un peu de temps, mais j'ai pris un peu plus confiance.

- C'est bien. C'est bien. A ton âge, je gambadais dans la campagne. Avec les enfants, le dimanche matin, nous allions à l'étang pêcher..."


La voix d'Augustin se fait lointaine lorsque j'aperçois mon inconnu descendre le chemin qui mène à la plage. Il y a passé un peu plus de temps aujourd'hui, sûrement parce que la météo est clémente ; le soleil pas trop chaud et une brise agréable.


Nos regards s'accrochent lorsqu'il passe devant moi. Je ne détourne pas le regard mais me fait houspiller par mon vieux compagnon.


"Tu m'écoutes pas gamin !

- Quoi ? Bien sûr que si Augustin, je vous écoute. Vous alliez au marché le dimanche...

- Pas du tout. C'est ma dame qui faisait les commissions !"


Je me sens rougir et alors que je m'apprête à lui présenter des excuses, je le vois se tourner lentement et suivre du regard le jeune homme.


"Oh oh ! C'est pour lui que tu sors tous les jours à ces heures régulières...

- Absolument pas ! je m'offusque.

- Mais si ! Bien sûr ! Et je vais te dire, tu as bien raison. Peu importe l'objectif tant que tu progresses."


Augustin est incroyable. Il se redresse et reprend son déambulateur, prêt à rentrer au centre.


"Tu viens avec moi. Il est passé maintenant. Tu reviendras demain !"


Je souris en secouant la tête, puis j'avance les fesses sur le bord du banc, récupère les béquilles et me mets debout. Augustin et moi parcourons lentement les quelques mètres qui nous séparent de l'entrée du centre. Dans le hall, nous nous dirigeons vers les ascenseurs et chacun s'en va retrouver l'intimité de sa chambre.


*

* *


Augustin n'a pas su tenir sa langue et j'ai bien cru voir toute mon équipe médicale sortir avec moi ce matin pour voir le mystérieux inconnu qui a fait sortir Louis de sa tanière. Je ne peux pas courir et j'en suis encore très loin, mais l'envie de m'échapper à toutes jambes de la salle à manger m'a traversé l'esprit.


Je remonte le chemin doucement, regardant bien là où je mets les pieds et faisant attention à ne pas faire supporter le poids de mon corps uniquement sur mon côté droit.

LA REEDUCATION DES COEURSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant