UNDERDOG

CHAPITRE 8 - Inconnu

〝 𝙻𝙴 𝙶𝚁𝙰𝙽𝙳 𝙼𝙴𝙲𝙷𝙰𝙽𝚃 𝙱𝙾𝚄𝙲𝙷𝙴𝚁 〞

Un truc que j'ai appris c'est que tôt ou tard, peu importe la route que nous empruntons, nos chemins finissent toujours par croiser celui de la mort. Ça ne m'effraie pas. En grandissant, j'ai fini par réaliser qu'il y avait pire que de voir les gens disparaître six pieds sous terre. L'important, ce n'est pas les défunts, c'est ceux qui restent. Le passé est mort et enterré, pourtant il ne nous laisse pas oublier. Il nous pourrit de l'intérieur et nous ronge jusqu'à l'os.

C'est pour cette raison que Lola est ici, puisqu'elle n'était pas prévue dans le plan.

À croire que la vengeance rend le boucher plus imaginatif qu'il ne l'est en temps normal.

Je reste un instant pensif, à ressasser cette idée. Je me serais bien passé de cette assemblée de testostérone, mais tous les membres de ce club étaient d'accord pour organiser cette petite entrevue. Si ce n'est quelques murmures provenant de l'arrière de la pièce, nous avons tous sagement attendu que Lola se réveille. Quand je me risque à regarder derrière moi, j'ai envie d'arracher la langue des infirmiers qui ricanent comme des gamins.

Après de nombreux gémissements étouffés de la part de Knox, Lola sort enfin de son puissant sommeil.

— La belle au bois dormant nous honore de sa présence, souffle un des mecs.

— Ce n'est pas trop tôt, siffle un autre.

En l'observant remuer sur sa chaise, je m'adosse à l'une des parois bétonnées de l'Underground.

Ses mains et ses pieds sont ligotés à la chaise pour l'empêcher de bouger, tandis qu'un bandeau noir recouvre ses yeux. Sa position de soumission prouve qu'elle est incapable de bouger ou de voir ce qu'il se passe ici. Toutefois, elle a au moins la maigre satisfaction de pouvoir utiliser sa bouche si l'envie lui prend de nous faire la conversation.

Pour Knox, c'est tout l'inverse.

Attaché à une chaise, face à sa sœur, il la voit, l'entend, mais ne peut pas lui parler. Un morceau d'adhésif rouge est collé sur sa bouche, l'empêchant d'émettre le moindre mot.

Knox est conscient de sa présence.

Lola ne l'est pas.

C'est ce qui rend cette entrevue plus sordide qu'elle ne l'est déjà.

Encore étourdie par les vapeurs de l'anesthésiant, il faut une minute à Lola avant de commencer à se débattre.

— Où...où est-ce que je suis ? Murmure-t-elle.

Aucun de nous ne répond.

Le boucher contourne la chaise jusqu'à se retrouver derrière Knox. Un scalpel en main, il entaille sa joue, plantant la lame juste en dessous de l'os de sa pommette. Le sang coule le long de sa mâchoire, souillant de quelques perles le sol noir. La brûlure engendrée par cette coupure le fait hurler. Un cri douloureux, quasiment inaudible à cause du tissu qui le bâillonne, éclate dans la pièce.

En l'entendant, Lola se crispe. Sa confiance en soi se dissipe un peu et ses lèvres s'entrouvrent. Elle est si petite comparée à nous. Paradoxalement, son mal-être n'en est que plus grand.

— Si tu as envie de crier toi aussi, c'est maintenant, la prévient le boucher.

Malgré son ton railleur, mon regard n'est happé que sur le corps chétif de Lola vers lequel le boucher s'avance.

Sans une once d'humanité, il essuie le scalpel poisseux de sang sur sa bouche. La froideur du bistouri en acier la surprend. Elle tente de reculer son visage, balançant sa nuque en arrière. Elle veut probablement se débattre et se libérer pour partir loin de cet endroit.