Chapitre 8

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Le lendemain je crois halluciner en voyant Lucas sortir d'une Ferrari devant la fac. Et visiblement mon choc se lit sur mon visage.

- Tu ne t'attendais pas à me voir là ? dit-il en s'avançant vers moi.

Aucun mot ne sort de ma bouche, je suis trop abasourdie.

- On dirait que tu as vu un fantôme.

Je me mets à rire nerveusement. Qu'est-ce qu'il se passe ? Il était encore le principal suspect d'un meurtre la veille.

- Je ne comprends pas, dis-je en bégayant

- Ce n'est pas un meurtre, Léa c'est suicidée.

- Pardon ?

Je dois avoir l'air bête plantée au milieu du trottoir avec mon air ahuri.

- T'as bien entendu.

Les étudiants qui passent autour de nous et qui reconnaissent Lucas le dévisage, et d'autres murmures des ragots à propos de sa sortie miraculeuse.

Je suis rejoint par Thaïs dix minutes après ma rencontre avec Lucas.

- Est-ce que c'est vrai ce qu'on dit ? Il est revenu ?

Je hoche la tête de bas en haut.

- Ne me regarde pas avec ta tête éberluée me dit-elle en me donnant un coup dans les côtes.

Partout dans les couloirs les gens ne font que chuchoter et raconter des histoires toujours plus imaginatives les unes que les autres. Certains parlent même d'un trafic de drogue entre gangs.

Le doyen de la fac a du faire une déclaration pour calmer les foules. Selon lui ces derniers événements sont malheureux mais il faut avancer pour ne pas mettre notre avenir en péril. Je trouve ça ironique de sa part.

Il a fallu quelques jours pour que la fac retrouve son ambiance habituelle. Maintenant devant le portail de la fac, des gens ont déposé des fleurs et des photos en souvenir de Léa. Du jour au lendemain plus personne n'a évoqué cette histoire de suicide. Ce sujet est devenu tabou. C'est une manière étrange de faire comme s'il ne s'était rien passé.

Je suis retourné à mon petit quotidien tranquille : métro, fac, dodo et ainsi de suite. J'ai passé un week-end entier à dormir et selon  mes calculs, il me manque encore 246h de sommeil ! Sans compter le fait que les examens arrivent dans deux semaines ! Encore des heures de sommeil manquées qui vont s'ajouter au compteur.

Les jours suivant je ne fais que le croiser. Le nombre d'heures de cours que nous devons passer ensemble paraît improbable. Il est hors de question que je lui donne l'impression qu'il m'intimide. Et puis ce serait lui donner satisfaction.

Cette journée à était ennuyant à mourir : Thaïs m'a envoyé un message le matin pour me prévenir qu'elle ne viendrait pas en cours aujourd'hui. Comment elle peut me faire ça ? J'ai dû passer ma journée seule, je n'avais personne avec qui mangeait le midi. Son absence m'a définitivement prouvé que je ne suis pas faite pour la solitude.

Il reste une épreuve avant la fin de la journée : un TP de physiologie sur l'osmolarité sanguine.

Lorsque nous rentrons dans le laboratoire, le professeur nous assigne un binôme par ordre alphabétique. Je me retrouve avec une fille que j'avais déjà brièvement aperçue à la fac, son prénom est Eva. Elle est grande et connue pour être une vraie tête. Je lui souris puis nous asseyons a une paillasse. Lucas a été mis en binôme avec une autre fille et se retrouve assit à côté de moi. Nous sommes chacun face à notre partenaire et nous nous tournons tous les deux le dos. Nos corps se touche presque et son bras me frôle à chaque mouvement qu'il fait. Mon corps se raidit... ce qui est idiot étant donné qu'il ne me touche même pas. La main d'Eva passe devant moi.

- Il faut déterminer les cellules qui sont en hyperosmolarité, dit gentiment Eva

Désolé dis-je en me reconcentrant sur l'exercice.

A chaque fois que Lucas écrit son coude me pique les cotes. J'ai beau me décaler son coude atteint toujours mon côté. Je me tourne vers lui : son bras est plié dans un angle exagéré pour écrire. Il fait définitivement exprès. Je me racle la gorge assez fort pour qu'il comprenne que ça m'agace. Il se tourne vers moi :

- Oh ! On dirait le bruit d'un petit animal sauvage, dit-il avec un sourire satisfait

- Le petit animal sauvage va finir par te planter avec son stylo si tu continues.

- Aïe, je suis tombé sur un animal enragé.

Je me lève frustrée

- Je vais chercher des lames de microscope, finis-je par dire à Eva

Quand je reviens m'asseoir Lucas pousse mon tabouret avec son pied qui fait un bruit énorme en raclant le sol : toute la classe se tourne vers moi. Je murmure un désole et me rassoit. Eva m'attend pour continuer le travail. Je lui tends le matériel et elle parait amusée :

- Je vois que tu mets du cœur dans ce TP.

- Bien sûr j'adore la physiologie

- Ça parait évident, dit-elle en plaisantant

En guise de conclusion, le prof nous fait passer une fiole afin que nous puissions observer le fractionnement du sang. La fiole arrive à la table de Lucas puis, au bout de quelques minutes, il me la tend. Au moment où j'avance la main pour l'attraper, il la ramène devant lui.

- Tu as vu comme le plasma se différencie du sang, dit-il en se tournant vers son binôme.

Elle le regarde comme s'il venait de dire quelque chose de super intelligent. C'est exaspérant. Il me tend de nouveau la fiole. J'approche ma main

- Fais attention, dit-il en éloignant à nouveau la fiole de ma main

- Est-ce que ça t'amuse ? C'est bon donne, dis-je agacée par ces petits jeux

Il lève un sourcil et un sourire en coin apparaît sur son visage.

Je me penche pour l'attraper mais ses bras sont beaucoup plus longs que les miens. Je tire sur sa manche. Son bras se baisse mais ce mouvement est suivi par un bruit fracassant. Une flaque de sang tache le sol. Le prof se tourne vers nous et soupire.

- Le cours est fini. Vous deux, nettoyez votre désastre.

Tout le monde quitte la salle.

- La physiologie hein... me murmure Eva en me faisant un clin d'œil.

Je bouillonne intérieurement. Je me penche pour ramasser les gros morceaux de verre. Une main m'arrête.

- Ne touche pas, dit Lucas de sa voix grave.

Il s'accroupit à son tour et se met à ramasser les bouts de verres pendant que je lui passe des serviettes pour nettoyer le sang par terre. Une fois que tout est propre et qu'il s'est lavé les mains, il se tourne vers moi

- Tu ne t'es pas coupé, dit-il en m'attrapant le poignet

J'ai l'impression qu'il est inquiet : son regard est plus doux. Mais j'aimerais qu'il arrête de faire comme s'il se souciait de moi alors qu'il va juste finir par m'ignorer.

- Non ça va, affirmais-je en dégageant doucement mon poignet

Il passe une main dans ses cheveux et dit d'une voix presque inaudible :

- Ce serait mieux qu'on arrête là.

Quelque chose se tord au fond de moi.

- De quoi ? dis-je en fronçant les sourcils.

- De se comporter comme si... il y avait quelque chose. Je me suis bien amusé, maintenant il faut que ça s'arrête.

- Mais si tu es encore là c'est que tu te soucie de moi non ? Met toi d'accord avec toi-même.

Je prends violemment mes affaires et quitte la salle en trombe. Le sang me monte aux oreilles, tout ce qu'il y a autour de moi paraît confus. Je ne sais pas comment décrire ce sentiment : il y a quelques instants j'étais aveuglement heureuse, et en une phrase, tout a chaviré... Ça fait mal. Et je ne sais pas pourquoi c'est aussi douloureux. Je ne veux pas me soucier de lui. Il a raison : depuis le départ nous ne partageons rien.

Le soir j'envoie un message à Thaïs pour prendre de ses nouvelles et accessoirement la supplier de venir demain.

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