Étape 13

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Samedi 13 Avril

Sainte-Maure-de-Rouraine / La-Celle-Saint-Avant / Port-de-Pile / Colombier / Les-Ormes
23 kms 060 - (336 kms 880)


     J'ai encore entendu fureter mais cette fois, je pense qu'il s'agit d'un animal. Je ne m'en suis pas préoccupé. J'avais trop envie de dormir.

     Ce matin, c'est à Sainte-Maure-de-Touraine que je déjeune. Un petit bistrot bien sympa tenu par un couple d'homme. L'un est derrière le bar à essuyer des verres tout en chantant la chanson de Régine :

     "Quand vient l'Mardi, la grande Zoa
       met ses bijoux, ses chinchillas
       et puis à minuit, la grande Zoa
       autour du cou s'met un boa..."

     L'autre balaie la salle en se dandinnant. J'adore et je reprends avec le premier :

     "Y en a qui marmonnent
       que la grande Zoa
       ce serait un homme
       on dit ça..."

     Du coup, je me fais deux copains. Je ne sais pas s'ils sont franchisés par Michou mais à Sainte-Maure, le show est là et l'ambiance garantie. Tous les clients peuvent en profiter et je constate qu'ils sont aimés de tous. Ca rentre en rigolant et ça ressort le coeur aux anges. C'est vraiment ce qui s'appelle bien commencer sa journée mais je ne veux pas m'attarder et finir à lever une jambe sur une table.

     Clopin-clopant, je progresse en savourant la campagne tourangelle et prends ici et là quelques photos. A une bifurcation, j'ai quand même un petit doute et pour me rassurer, je demande les lumières d'une fermière. Tout va bien, je ne suis pas perdu. Je dois traverser ce sentier boisé et prendre le premier chemin qui tourne à gauche. En bon élève, je suis ses instructions et découvre en plus une balise coquillée. Je suis sur le bon cheval et avance de plus belle. Cependant, la ville suivante me semble bien plus loin que ce que j'avais noté. J'enclenche encore sur au moins deux kilomètres et c'est le drame ; Je reconnais un croisement passé quelques heures plus tôt. Je venais de là et ça me met K.O technique avant la sonnerie du premier round.

     Il y a une autre balise que je suis sur plus d'un kilomètre puis j'aperçois enfin le panneau d'une ville : Sainte-Maure-de-la-Touraine... J'ai tourné en rond. Quatorze kilomètres pour ma pomme...

     Au carrefour d'après, j'essaie de demander ma route à un automobiliste, mais celui-ci démarre comme si j'étais un tueur en série. J'ai plus de chance avec le deuxième qui m'apprend que la Celle-Saint-Avant se situe douze kilomètres plus loin. Je n'ai qu'à monter dans son fourgon, il va m'y conduire.

     - Non, non ! Je ne peux pas.
     - Et pourquoi donc ? Y a pas de dérangement puisque j'y vais.
     - C'est que Compostelle ça se fait à pied. Pas en bagnolle.

     Mon gars éclate de rire ;

     - T'es en train de me dire que si tu montes, c'est triché ?
     - Bah oui...
     - Mais puisque tu les a marché ces kilomètres ! D'accord, pour des queues de cerise mais ils sont là. En montant, tu ne fais que réctifier une erreur. Y a pas de triche...

     Ca se plaide, alors je grimpe dans la fourgonnette.

     De la Celle-Saint-Avant, j'enquille "loyalement" sur Port-de-Pile, Colombiers et les Ormes. Là je m'arrête parce qu'il y a un camping. J'appelle pour une douche contre espèce trébuchante et la gérante me répond qu'il n' y a pas de souci, je suis attendu. Ca change plutôt de l'accueil d'hier, non ?

     Au passage, je croise un groupe de jeunes occupés à picoler à la terrasse d'un café et dans le lot, il y a un pèlerin avec un sac deux fois plus gros que le mien, accompagné d'un chien. Je ne sais pas qui est le plus pouilleux des deux et m'arrête taper la discute.

     - Je viens de Maubeuge me dit-il et toi ?
     - Pas loin de Paris.

     Il m'invite à m'assoir mais je décline parce que tout me dérange chez lui. Il me fait plus penser à un poivrot en perdition sur les chemins de l'alcool que ceux de Compostelle. Je n'aime pas sa gouaille, son air satisfait qu'il affiche et la façon qu'il a de roter après une gorgée de bière.

-2-

     La gérante, elle, est un vrai délice. Le coin plus qu'agréable alors enfin de compte, je me décide à y planter ma tente. Cela me donnera l'occasion de faire un peu de lessive, ce qui ne sera pas non plus du luxe. le Nirvana pour quatre euros cinquante ! J'en suis d'ailleurs très étonné et demande s'il n y a pas erreur sur le tarif, mais non.

     L'hygiène n'est pas optimale lorsqu'on bivouaque. Ce n'est pas Dimanche tous les jours et on n'a pas trop l'occasion de vêtir une chemise blanche mais de vous à moi, ça m'étonnerait que Christophe Colomb se lavât matin et soir quand il découvrît les Amériques. je ne sais pas si vous vous rendez bien compte des aléas climatiques mais lorsqu'il fait entre -1 et 4° comme ça l'est en ce moment à l'aube, est-ce qu'il y a de quoi être très regardant ? Si vous me répondez oui, je vous traiterai de menteur sans ciller.

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