Octobre

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Les choses se sont passées très vite. Nassim a lancé une pierre dans le carreau, a ouvert la fenêtre, a crié « Je peux pas faire ça !! », Anthony l'a poussé, est entré, Amandine l'a suivi. La vieille était là, elle a essayé de se défendre, Anthony l'a bousculée, Amandine a crié « mais t'es malade ! » et est allée la relever. Anthony l'a poussée, elle est tombée, sa tête a heurté très fort le coin de la table basse, et puis plus rien.


A son réveil elle était à l'hôpital avec un gros bandage, et c'était déjà le lendemain. Le choc avait été plus fort que prévu, il avait fallu l'opérer. Sa mère dormait sur un fauteuil à côté de son lit, les yeux cernés et rougis. Un bouquet de marguerites fanait dans un vase, et la chambre était silencieuse, calme, presque trop. Amandine se redresse, se frotte les yeux et les larmes montent quand elle se rappelle pourquoi elle est là. Je suis conne, je suis trop conne ! Elle se voit déjà en prison, espère que Mme Perrin va bien, que son imbécile de frère ne lui a rien fait, que Nassim...Pourquoi l'a-t-elle suivi lui aussi ? Elle l'aime, mais est-ce qu'on va, par amour, piquer les pauvres bijoux d'une vieille ? Je me suis crue dans une série d'M6, c'est pas possible, se dit-elle, serrant ses tempes entre ses mains.

-Oh là ! Jeune fille ! Va pas te recasser la tête !

C'est l'infirmière. Elle ne l'a pas entendue rentrer. A ces mots sa mère se réveille et lui prend la main, puis lui caresse la joue en murmurant « merci mon Dieu... » Plusieurs fois. L'infirmière inspecte ses pansements, sans un mot; et sa mère se redresse, la regarde droit dans les yeux et lui lance :

-Mais qu'est-ce qui t'a prise ?
-Je sais pas...Maman...pardon ! oh pardon maman !

La boule qu'elle avait dans la gorge à son réveil se transforme en sanglots, des sanglots d'enfant perdue qui secouent son corps tout entier, et elle vient nicher son visage dans le cou de sa mère, comme quand elle était petite fille. L'infirmière s'éclipse, et laisse Amandine dans les bras de sa mère, qui la berce et lui répète que « ça va aller ».

A force de pleurer, Amandine s'est endormie et sa mère l'a couchée et bordée, comme un bébé, la couvant du regard. Elle n'aurait jamais cru qu'elle ferait ce genre de chose...pas elle. Elle sent la colère monter quand elle pense à son grand fils, colère et culpabilité aussi, pourquoi est-il devenu comme ça lui qui était un si gentil petit garçon ? Pourquoi est-il maintenant en garde à vue pour vol avec violence ? Pourquoi a-t-il frappé une dame âgée, frappé sa sœur ?
Assise sur sa chaise, elle regarde sa fille. Hier encore elle avait 8 ans et s'émerveillait devant la maison de poupée que son père avait fabriquée avec du contreplaqué récupéré à l'usine. Il avait travaillé des jours dessus, et elle, elle avait tout décoré. Aujourd'hui la maison prends la poussière dans le garage, son mari ne fabrique plus rien, et ses enfants...Valérie sent alors des larmes couler sur ses joues. Elle a l'impression que comme elles, sa vie coule entre ses doigts sans qu'elle ne puisse rien y faire. Elle se sent vieille, fatiguée, à bout.

- Comment tu te sens ?

C'est Francis, son mari, qui vient d'entrer dans la pièce. Il se tord les mains, a l'air préoccupé.

- Anthony est toujours au commissariat... c'est...c'est grave je pense...

Valérie ne peut rien répondre, sa gorge la serre trop, elle fait un léger signe de tête.

- J'en étais sûr qu'un jour il nous ferait des conneries à traîner avec ces racailles des Lilas, crie-t-il tout à coup. Il était avec un mec de là-bas, Nadir !
- Nassim...dit Amandine dans un souffle, c'est Nassim.
- Ah t'es réveillée toi ! Qu'est-ce que t'as fait hein ? pourquoi t'y es allée toi aussi ? Pourquoi t'as menti ?

Les Roses BlanchesWhere stories live. Discover now