Chapitre 9 : Confrontation

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L'annonce tomba comme un couperet.

— Mes émotions ? répéta bêtement Elune.

— Oui. La magie agit en fonction de tes émotions. Dans ton cas, puisque tu sembles pouvoir agir uniquement sur la météo, la colère provoquera un orage. Ta tristesse ferait tomber de la pluie. Ta peur pourrait déclencher des vents violents ou couvrir le ciel de nuages. Ton don n'est pas le don originel, mais il demeure amplement suffisant pour être dangereux. Je veux m'assurer que tu es capable de te contrôler avant de te mettre un Artefact dans les mains. Sans contrôle, tu pourrais détruire des îles, abattre des arbres sans sourciller ou créer un ouragan qui ramènerait ton petit exploit, de l'autre jour, au rang de jeu pour enfant.

Elune déglutit difficilement. Instinctivement, elle recula. Elle n'avait pas la moindre idée de ce que le Maître du Temps comptait faire et ne souhaitait pas le découvrir. Un sourire glacial s'étira sur le visage d'Orlyë.

— Dès demain, je ferais venir un de nos confrères Maglien spécialisé dans l'Esprit. J'en connais un qui peut influer sur les émotions. Il nous sera très utile. D'ici là, fais ce que tu veux.

Elune décida d'occuper le reste de sa journée à visiter la maison et à améliorer son pont de cordes. Le résultat ne fut pas fameux mais elle put enfin l'emprunter plus aisément. Alors qu'elle était pendue dans le vide, occupée à vérifier la solidité de sa construction, Feynor passa au-dessus d'elle chargé de lourds paquets. Il volait si lentement qu'elle craignit qu'il ne parvienne pas jusqu'à la terre ferme. Après un instant d'hésitation, elle se tracta jusqu'à l'île et vint l'aider à porter ses sacs. Il commença par l'invectiver avant de la laisser faire. S'il n'osait pas le montrer, Elune l'avait compris. Il était épuisé. Ce fut donc à deux qu'ils portèrent les sacs jusqu'au bâtiment où ils rangèrent le tout. Une fois leur tâche achevée et les aliments mis en sécurité dans des placards surélevés, Feynor laissa son familier pénétrer dans le garde-manger. Le renard se précipita vers les espaces de rangement dans le maigre espoir de pouvoir attraper quelque chose. Sans succès.

— Ferni arrête, ordonna Feynor.

Son familier lui jeta un air dépité. Prise de pitié pour l'animal affamé, Elune fouilla dans les placards. Les Eyliens ne mangeaient que très rarement de la viande. Ils considéraient que cela revenait à manger de potentiels familiers. Si les Syliviens les rejoignaient sur ce point, les Zohaliats ne s'en privaient pas. Après tout, ils ne possédaient pas de familiers. Qu'ils en mangent n'était pas si surprenant. Elune finit par dénicher un peu de viande. L'animal avala le petit morceau tout rond dans un glapissement de contentement. Puis il vint s'asseoir sur son derrière devant l'adolescente, la langue tirée et les yeux écarquillés.

— Arrête, on dirait un chien, ria-t-elle en lui grattant une oreille.

Le renard tira une telle tête déçue qu'elle éclata de rire. Elle s'assit à même le sol et l'invita à la rejoindre. Le familier se coucha et posa sa tête sur ses genoux sous le regard effaré de Feynor.

— Ferni ! siffla Feynor entre ses dents.

Il tremblait de rage. A l'évidence, il se retenait difficilement de se jeter sur Elune pour l'étrangler.

— Pourquoi ce nom ?

— Qu'est-ce que ça peut te faire ? répliqua l'intéressé d'un ton glacial.

Elune se redressa.

— Pour savoir.

Feynor ne prit même pas le temps de lui répondre. Il fit signe à son renard de le suivre et sortit de la maison. Il s'éloignait en direction du cercle de pierre lorsqu'Elune le rattrapa.

La Mélodie des Plumes - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant