J'suis pas d'humeur à la fête

821 53 91
                                    


Sidjil passait une mauvaise soirée.

Il passait une mauvaise soirée, et tout le monde qui était en mesure de voir son visage dans la salle sombre de ce bar pouvait le deviner. Les épaules tendus, les mains qui jouaient avec son verre, la jambe qui tremblait sous la table en bois et les traits du visage crispés. Oui, c'était bien évidant. Comme écrit, noir sur blanc.

Il avait pourtant bien commencé sa journée.

Il s'était levé du bon pied, était parti à la salle de sport de bonne heure, avait fourni un travail suffisant mais productif lorsqu'il était rentré. Il avait mangé sainement, avait fait le ménage chez lui avec sa playlist préférée en fond. Il a même dansé dans son salon, laissant ses chaussettes glisser sous ses pas hasardeux, sur son parquet maintenant tout beau tout propre. Et il s'était réjoui à l'idée de passer une soirée de sortie, entouré de ses amis dans un bar peu connu de Paris. De revoir ses proches de longues date et ceux qu'il venait de rencontrer. Il était même de bonne humeur quand en chemin, il s'était pris tous les bouchons sur la route.

Non, il avait décidé que rien ne pouvait briser sa bonne humeur.

Rien, sauf peut-être son petit Maxime.

Maxime.

Détrompez-vous, il n'était pas malheureux de voir Maxime, bien au contraire, chaque occasion de se retrouver était une bonne chose. Son amitié avec le plus jeune était fusionnelle, des âmes sœurs platoniques qui s'étaient retrouvés parmi des foules d'âmes grises et aléatoires. Voir son ami était comme revoir le soleil suite à de longs jours d'orages. Comme retrouver une pièce de puzzle enfouis sous le canapé, après avoir passé des heures à la chercher. Oui, il était de bonne humeur en sachant qu'il allait retrouver Maxime.

Mais son Maxime n'était actuellement pas en train de remplir sa fonction de son Maxime, car il était trop occupé à être le Maxime de quelqu'un d'autre.

Et c'est comme ça que le Toulousain se retrouvait accoudé à une table dans le coin du bar, la lumière tamisée des leds bleus le rendant presque invisible aux yeux de tous.

Et il passait décidemment une mauvaise soirée.

Les bouchons dans Paris l'avait empêché d'arriver à temps pour l'heure du rendez-vous fixé entre le groupe, et il dû accepter son retard (il pense qu'il aurait été en retard de toute façon, avec ou sans bouchons, mais il s'abstient de commenter).

Lorsqu'il était entré dans le bar et que le hume épais de bière et l'odeur corporelle de toutes ces personnes avaient atteint son nez, il se sentit sourire. Ses yeux retrouvèrent avec aisance la silhouette de ses amis, déjà sur le point d'entamer leurs secondes bières. Les verres vides collaient aux tables en bois et les rires chaleureux enveloppaient l'air. Lorsqu'il les rejoint enfin, il fut accueilli par des accolades et des houements, tous provenant de voix qu'il reconnaissait et appréciait. Il fit le tour afin de saluer les individus avec entrain, et lorsqu'il arriva à en saluer Maxime, tout était normal. Ils se prirent dans les bras, se tapotant légèrement le dos et rirent ensemble de son retard presque maladif. Après quelques échanges taquins, ils se joignirent de nouveau à la discussion du groupe. Et si leurs bras se frôlèrent de temps en temps, faute de leur proximité, Sidjil n'allait pas se plaindre.

Ils avaient passé la soirée à échanger des anecdotes, des histoires milles fois ressassées mais toujours autant drôles.

Sidjil et Maxime, toujours côte à côte, discutaient à voix basse, trop plongés dans leur monde pour faire attention à leurs alentours. Le Toulousain se sentait bien. Il regardait avec intérêt les traits du visage se mouvoir sous les paroles joyeuses du plus jeune. Ses joues étaient rosés, sûrement la faute des quelques verres déjà consommés. Ses sourcils s'arquaient, dansant sous la musique des émotions que procuraient l'histoire qu'il contait. Ses yeux pétillaient, sautant de celles de Sid au reste de son visage, s'assurant de bien captiver l'attention de son ami. Ses mains volaient de droite à gauche, accompagnant son récit avec ferveur, des formes abstraites se dessinaient dans l'espace entre eux. Et ses lèvres, elles, bougeaient à une allure qui rendait la tâche difficile au barbu de saisir les sons qui en émanaient. Elles remuaient à une vitesse folle, susceptible de rendre jaloux n'importe quel rappeur en raison de son débit de parole.

Jalousie me dit...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant