La Résurrection des Clans (fanfiction LGDC - La Guerre des Clans)

Chapitre 34 : En Quête de Justice

La douleur revient à la charge, comme une vague fatalement destinée à s'écraser sur le sable ou la pierre. Chaque effort était plus difficile que le précédent, chaque inspiration lui semblait être la dernière. Pourquoi les autres reines semblaient mieux vivre leur mise bas que Panse Dodue ? Son premier accouchement avait été un véritable supplice, mais la souffrance qu'elle avait ressenti ce jour-là semblait bien moindre comparée à l'agonie qu'elle connaissait à cet instant. Était-ce ainsi que Ventre Blanc comptait la punir ? Survivrait-elle à cette épreuve ? Pourquoi avait-elle fallu qu'elle succombe au charme de Plume de Vent ? Comment avait-elle pu souhaiter avoir d'autres chatons après avoir tant subi lors de la naissance de Plume d'Eau, Griffe de Roc et Pelage de Ciel ?

"- Ça va aller, encore un effort, l'encouragea Patte Tachetée d'une voix basse."

Panse Dodue aurait voulu la chasser, horripilée par sa tranquillité alors qu'elle-même endurait le martyre. Mais la femelle blanche et noire était la seule lumière dans la Pouponnière étouffante et sombre. Sans son soutien, Panse Dodue abandonnerait. Elle n'était pas assez forte pour affronter cet évènement seule. Si seulement Plume de Vent était là... La guérisseuse se souvint à quel point la présence de Coeur Noir l'avait aidé à tenir bon quand elle mettait leur portée au monde. Le souvenir de son ancien compagnon la fit gémir, la distrayant une fraction de seconde de sa situation ; pourquoi avait-il fallu qu'il rejoigne le Clan des Étoiles ? Panse Dodue en était certaine, tout aurait été différent si le guerrier ébène marchait toujours à ses côtés...

"- Il n'y en a plus qu'un, reprit Patte Tachetée, tirant Panse Dodue de ses pensées aussi cuisantes que ses contractions."

La soigneuse tigrée hurla une dernière fois, faisant appel au peu d'énergie qui lui restait. Elle se laissa retomber sur sa litière, haletante, en sentant que sa détresse prenait fin. Elle avait réussi. C'était terminé. Maintenant que le plus dur était passé, la chatte aux yeux verts n'avait plus qu'une envie : rencontrer ses précieux nouveaux-nés. Elle savait que sa fatigue et son abattement fondraient comme neige au soleil en humant leur odeur. Ce calvaire en vaudrait la peine au moment où ses prunelles se poseraient sur les êtres fragiles qu'elle avait porté durant plusieurs lunes.

Panse Dodue bascula lentement sur le côté, éreintée mais d'avance comblée par cette occasion si spéciale. Elle croisa le regard ambré de Patte Tachetée ; le désarroi qu'elle y lut lui glaça le sang.

"- Que se passe-t-il ? Où sont mes chatons ? s'enquit brusquement Panse Dodue.
- Je suis désolée... La plupart sont morts-nés, miaula la reine bicolore d'une voix rauque."

Ses yeux étaient vitreux, sa bouche tremblante. Elle devait revivre sa propre mise-bas : deux de ses petits n'avaient jamais connu leur premier souffle, malgré les efforts de Panse Dodue et de Coeur Noir pour les réanimer. Seuls Pelage de Grêle et Nuage de Nuit avaient pu grandir parmi leurs proches, jusqu'à ce qu'ils les quittent tout aussi brutalement que Coeur Noir...

Panse Dodue se redressa en vacillant, le coeur au bord des lèvres. Quatre adorables boules de poils tachetées gisaient sur la mousse, parfaitement immobiles. Une lamentation sourde monta de la gorge de Panse Dodue quand elle tituba jusqu'à ses petits, qui n'auraient jamais la chance de profiter du soleil ou de se plaindre de la pluie. La guérisseuse tigrée leur caressa les flancs, la vision brouillée par les larmes.

"- Mais ces deux-là sont vivants, ajouta Patte Tachetée d'une voix étrange qui mit aussitôt Panse Dodue en alerte."

Elle n'osa croiser les prunelles de sa camarade une nouvelle fois, craignant ce qu'elle y lirait. La petite chatte s'approcha des rescapés tandis que l'appréhension lui broyait les entrailles. 

D'abord, Panse Dodue ne remarqua rien d'anormal chez les deux chatons. Le premier était tigré de blanc et de gris ; le second était d'un gris cendré parfaitement uni, à l'exception de son ventre et du bout de ses pattes qui étaient d'un blanc lumineux. Alors que les prunelles de la reine tigrée balayaient nerveusement sa portée du regard, elles se figèrent soudain sur le chaton gris cendré et blanc : comment n'avait-elle pas pu constater avant qu'il lui manquait un membre ? Le petit animal était tri-pattes.