chapitre 2: Carlos

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Réveillé au lever du jour par ce cauchemar qui me hante depuis quatre ans. Je m'essuie le front avec un tee-shirt qui traîne au sol en observant la salope que j'ai ramenée hier soir. Sans aucune délicatesse, je la secoue pour qu'elle dégage de ma piaule, puis me recouche, tandis qu'un flot de souvenirs s'insinue dans mon crâne.

Allongé au sol, aveuglé par le sang qui s'écoule de mon arcade, une voix grave me parvient aux oreilles. Ce timbre rauque ne m'est pas inconnu, il s'agit d’Alvaro, le plus fidèle soldat de mon père. Il m'aide à me relever pour me sortir de cet endroit de malheur. Je jure face à la douleur que je ressens dans l'ensemble de mon corps. Cette salope de française ne m'a pas loupé. Que dire de mon frère, ce traître, qui n'a eu aucun scrupule à me trahir ?!
— Carlos, magne-toi, ils vont faire exploser la baraque !
— Où sont mes parents ? demandé-je, inquiet.
— Morts, m'explique-t-il en ne quittant pas des yeux la porte de sortie.
Encore sous le choc de cette révélation, je reste muet jusqu'à mon arrivée à la clinique privée. Je suis resté plus d'un mois sous la surveillance des médecins. Alvaro en a profité pour me trahir, reprenant les rênes de mon cartel. Un an après son ascension, il me proposait de réintégrer son clan en tant que son second. Évidemment, j'ai accepté comme un con, mais ce que je ne savais pas, c'est que cet enfoiré avait lui-même exécuté Juan de sang-froid. Qu'après le décès de mon frère, Sam a été hospitalisée pour une fin de grossesse à risque, liée au choc du décès de sa moitié. Alvaro s'est alors arrangé avec les spécialistes français pour faire croire au décès de leur bébé, afin de l'anéantir et qu'elle mette fin à ces jours. Il a vécu quelques mois en France, attendant dans l'ombre que le bébé soit hors de danger et puisse voyager. À son retour, il m'a collé le gosse dans les bras, me demandant de prendre les mesures nécessaires pour élever mon neveu comme mon propre enfant.
— Un conseil qu'il ne traîne pas dans mes pattes, sinon il rejoindra définitivement son père.
— Ce n’est qu'un enfant.
— Je m'en tape, démerde-toi et fais le taire à la fin !

J'ouvre à nouveau les yeux, m'extirpe de mon lit, m'habille, et je sors de mon antre toujours avec cette idée en tête, faire payer à Alvaro l'exécution de Juan, l'enlèvement de Noah et reprendre le pouvoir. Seulement, pour le moment, je suis seul contre une armada de sbires prêts à risquer leurs vies pour leur chef. Chaque jour qui passe me remplit de haine et de culpabilité, Torrente a dépassé les limites du raisonnable. Son geste est impardonnable ! Surtout, quand je croise, comme à cet instant, un petit bonhomme de trois ans, brun aux yeux verts, courir dans les couloirs avec sa nourrice. C'est son portrait craché, un mini Juan. Il se dirige droit dans ma direction, le sourire aux lèvres. Mon cœur se comprime, une boule se forme dans ma gorge, m'empêchant de déglutir correctement quand ses petits bras s'agrippent à mon cou.
— TIIIIOOOOOOO !!!!!
— Olá, pequeno, como você está ? (Coucou, petit, comment vas-tu ?)
— Bem (bien).
— Où tu vas comme ça ?
— Faire du poney, ordre du patron, me répond Carla en souriant faussement.
   À l'entente de ce dernier mot, mon sang bouillonne dans mes veines, ma mâchoire se contracte. Je suis à la limite d'aller défoncer la gueule de mon chef. Pourtant, je n'en ferai rien tant que je n'aurai pas retrouvé sa mère qui a disparu des écrans radars.
— D'accord, amuse-toi bien et sois sage !
—Vouii pomis !
Je lui caresse les cheveux, puis file, sans un mot de plus, extérioriser ma rage à la salle d'entraînement. Après plus de deux heures à me défouler sur le sac de frappe ainsi qu'avec quelques soldats, je quitte la pièce pour rejoindre Alvaro, de retour au bercail.
— Asseyez-vous ! nous ordonne le patron avant de reprendre la parole. Messieurs, si je vous ai fait venir dans mon bureau, c'est pour vous annoncer un accord avec un des cartels d'Argentine.
— Putain, enfin ! La came commençait à manquer, le coupe Lino.
— Je sais. C’est pour ça que ce soir, nous allons célébrer cette nouvelle alliance au « Pongo ».
— Vous pouvez dégager maintenant. Carlos, tu restes, nous devons faire un point.
— Pas de soucis.
Une fois la porte refermé, je me rapproche d’Alvaro qui me tend des documents. J’y jette un rapide coup d'œil en constatant qu'il s'agit des fiches de renseignements concernant les futures recrues.
— Tu en penses quoi ?
— Je ne peux pas te le dire, sans avoir assisté aux tests qui auront lieu demain.
— Bien, j'aimerais que tu accélères le recrutement. Nous avons perdu une dizaine d'hommes lors de la dernière offensive. En prime, les militaires rôdent de plus en plus autour des favelas.
— OK, je m'en occupe.
— Je compte sur toi, tu es le meilleur de mes hommes.
D'un hochement de tête, je le remercie avant de quitter à mon tour son bureau.
Vingt-et-une heures, nous arrivons au centre-ville de São Paulo. Le propriétaire du « Pongo », Raoul, nous attend devant l'entrée principale. Il nous guide à notre table habituelle, où sont déjà présentes les putes chargées de satisfaire le moindre de nos désirs.
— Raoul, amène-nous tes meilleures bouteilles de Scotch, requiert mon supérieur.
— Bien sûr, señior Torrente.
— Bouffon, marmonné-je en fusillant du regard le gérant qui hurle sur deux de ses employés.
— Carlos, tu es sûr que ça va ? m'interroge Pedro, assis à mes côtés.
— Ouais, c'est rien, juste un petit coup de mou.
— Dans ce cas, savoure cette pause. Chaque jour qui passe est une nouvelle épreuve.
— Merci de me le rappeler, enfoiré !
— Avec plaisir, se bidonne-t-il.
Je secoue la tête, puis me joins à la bonne humeur qui règne dans ce lieu. Nos plats terminés, je repousse mon assiette, observe la salle quasi déserte, quand mon regard se pose sur deux femmes. La première est de toute beauté avec ses formes bien proportionnées. Dommage qu'elle ne soit pas blonde, mais bon, pour une nuit de baise, c'est amplement suffisant. La seconde est rousse, plus âgée et… moche. Bordel, même saoul, je ne voudrais, pour rien au monde, avoir ma queue entre ses cuisses. La preuve, elle réussit presque à me faire débander en quelques secondes. Putain ! Concentre-toi sur l'une des putes ou sur la copine de la rouquine. D'ailleurs, en détaillant les deux femmes, je remarque que la brune me trouve à son goût. Je devrais tenter ma chance, ça m'épargnera de ramener une de ces salopes qui se trouvent à notre table.
— Je reviens, dis-je en me levant pour rejoindre la créature à proximité.
Évidemment, deux de nos jeunes recrues me suivent afin de me protéger de tout danger.
— Bonsoir, madame, mademoiselle, puis-je m'installer à votre table et vous offrir un rafraîchissement.
— Bonsoir, oui, bien sûr, je vous en prie, me répond la brune.
— Garçon ?! interpellé-je le serveur, une tequila, et pour ses dames ?
— Deux cafés, s'il vous plaît, intervient la laide qui se force à me sourire.
Je ne prête plus attention à son visage, préférant poser mes yeux sur la nana qui l'accompagne. Après plus d'une heure de discussion, je ne regrette en rien de m'être joint à elles. Plus précisément, à Alma, cette jeune femme à un sacré répondant. Quant à son amie, Sami, il me semble difficile de l'analyser, puisqu'à plusieurs reprises, elle a quitté la salle. Nous laissant un peu d'intimité, tout comme les deux larbins qui m'accompagnaient. Dès que je prononce le moindre mot, elle rougit, prends une gorgée d'eau. Au bout de quelques minutes, elle finit par me communiquer ses coordonnées. Son amie refait surface, je décide qu'il est temps m'éclipser et de les laisser seules.
— Alma, j'espère te revoir bientôt. Bonne soirée.
— Merci, bonne soirée, me répond-elle souriante.
Les deux femmes discutent entre elles quelques minutes avant de quitter le restaurant sans omettre de jeter un dernier coup d'œil dans ma direction. Nous faisons de même trois heures plus tard et pour une fois, je rentre seul. De retour à l'hacienda, je m'empresse de grimper les étages qui me séparent de Noah pour m'assurer que tout va bien. J'entrouvre la porte et constate que le petit bonhomme dort à poings fermés dans son lit. Je rejoins mes quartiers, me maudissant toujours et encore de ne pas avoir buté Torrente quand le moment s'est présenté.

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