Chapitre 21 - Sarouman

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Ilona reprit doucement connaissance. Elle sentit d'abord qu'on la portait sans ménagement, puis que ses poignets étaient liés. À l'odeur et aux grognements, elle comprit qu'elle s'était faite enlever par des orcs. Sa tête lui faisait mal. Elle y porta la main et vit que du sang tâchait désormais ses doigts.

Elle commença à défaire ses liens, en regardant discrètement autour d'elle pour vérifier qu'on ne la voyait pas faire. Une fois ses poignets déliés, elle attendit que les orcs s'arrêtent pour la nuit. Le soleil se couchait, mais ils ne semblaient pas vouloir s'arrêter. Alors, sans plus attendre, elle frappa au visage l'orc qui la portait. Il la lâcha et, avec l'aide d'un sort, elle se rendit invisible.

Ilona se mit à courir pour leur échapper, mais ses blessures dues à l'explosion la ralentissaient. Ses forces déclinaient rapidement, et son sortilège se délita. Quand elle fut redevenue complètement visible, les orcs n'eurent aucun mal à la rattraper et l'assommèrent.

Lorsqu'elle se réveilla, elle se trouvait dans un cachot de pierre, fermé par une porte en bois. La pièce ne contenait qu'une couchette, taillée à même le mur, et une petite fenêtre laissant passer la lumière du jour. Ilona, elle, avait à nouveau les poignets liés, mais par une chaîne de fer cette fois-ci. Elle se leva, tant bien que mal, et essaya d'ouvrir la porte. Elle se mit sur la pointe des pieds pour pouvoir voir à travers. Ce qu'elle vit la rendit perplexe. Ce qui aurait du être des mines était complètement inondé. Des arbres semblaient se déplacer entre les immenses débris métalliques qui jonchaient l'eau.

— Des Ents... murmura Ilona.

Au même moment, un cliquetis métallique résonna et la porte s'ouvrit. Elle se retourna et vit deux orcs entrer. Ils se saisirent de ses bras et l'entraînèrent à leur suite.

De leur côté, Gandalf, Legolas, Aragorn et Gimli la cherchèrent longuement. Quand il devint évident qu'elle n'était nulle part dans le Gouffre, le magicien comprit que des orcs l'avaient emmenée.

Mais qu'elle soit entre les griffes de Sarouman ou ailleurs, ils n'avaient pas le choix. Il fallait s'occuper de la menace que représentait encore le magicien blanc avant de la chercher.

Ils réussirent à convaincre le roi Théoden d'envoyer des troupes, pour défaire Sarouman et achever de détruire son armée.

Les troupes du Rohan se mirent en route au plus vite, accompagnés par les guerriers elfes.

Au bout de deux jours de marche, ils arrivèrent en Isengard. Merry et Pippin, perchés sur un muret, les accueillirent.

— Mes seigneurs,  bienvenue en Isengard ! s'exclama théâtralement Merry en faisant un large geste du bras.

— Oh, jeunes coquins ! râla Gimli. Une belle chasse dans laquelle vous nous avez embarqués ! Et on vous retrouve à festoyer et à fumer !

— Nous sommes assis sur le champ de la victoire et savourons quelques réconforts bien gagnés, répondit Pippin en souriant. Le porc salé est particulièrement savoureux.

— Nous n'avons pas le temps pour ça, rappela Gandalf d'une voix sèche.

— Nous sommes sous les ordres de Sylvebarbe qui vient tout juste de reprendre les rênes de l'Isengard, expliqua Merry, penaud.

Les deux hobbits descendirent de leur perchoir. Aragorn et Legolas les firent monter sur leurs chevaux et ils pénétrèrent dans l'enceinte de l'Isengard.

Ils avancèrent dans l'eau, évitant les débris, jusqu'à ce que certains prirent pour un immense arbre. L'Ent se tourna vers eux.

— Ah, jeune maître Gandalf... Je me réjouis de votre venue. Le bois et l'eau, les troncs et la pierre, je peux en venir à bout. Mais il y a un magicien à mater ici, enfermé dans sa tour.

— Ne vous inquiétez pas, nous sommes venus pour ça, assura Gandalf.

— Allons lui régler son compte et qu'on en finisse ! s'exclama Gimli, derrière Legolas.

— Pour une fois, je suis d'accord avec le nain, ajouta l'elfe.

— Non. Cela me coûte de le dire, mais il nous le faut vivant. Il faut qu'il parle.

Le magicien s'avança jusqu'au pied de la tour, suivi par les hommes du Rohan. Au sommet, Sarouman les regardait approcher. Après quelques minutes de silence, il interpella Théoden.

— Ne pouvons nous faire conseil ensemble comme nous l'avons fait jadis, mon vieil ami ? Ne pouvons nous faire la paix, vous et moi ?

— Nous ferons la paix, répondit le roi, furieux. Oui, nous aurons la paix. Lorsque vous répondrez de l'embrasement de l'Ouestfold et des enfants qui gisent sans vie ! Nous ferons la paix lorsque la vie des soldats dont les corps furent dépecés devant les portes de Fort-le-Cor alors qu'ils étaient morts seront vengés ! Nous ferons la paix. Lorsque vous pendrez à un gibet pour le plaisir de vos propres corbeaux ! Là, nous serons en paix !

Le vieux magicien l'écoutait, appuyé sur son bâton.

— Des gibets et des corbeaux. Vieux radoteur, répondit-il dédaigneusement.

Sans prêter plus longtemps attention au roi du Rohan, il se tourna vers Gandalf.

— Que voulez vous Gandalf ? Laissez-moi deviner.... La clé d'Orthance ? Ou peut-être même les clés de Barad-Dûr avec les couronnes des sept rois et les baguettes des cinq magiciens ? Ou alors... votre fille ? sourit-il.

L'espace d'une seconde, on pu voir de l'inquiétude apparaître sur le visage de Gandalf. Mais c'est le visage neutre qu'il s'adressa à Sarouman.

— J'ignore de quoi vous parlez. Mais votre traîtrise a déjà couté de nombreuses vies et des milliers sont encore en péril. Vous pouvez les sauver Sarouman. Car vous étiez dans les secrets de l'ennemi.

— Ne faite pas semblant mon ami. Vous savez très bien de quoi, ou plutôt de qui, je parle. Permettez moi d'ailleurs de vous féliciter. Je n'avais aucune idée de son existence jusqu'à il y a peu, vous l'avez bien cachée. Sinon, vous êtes venu quérir des informations, c'est cela ? Et bien j'en ai une pour vous. Il attaquera très bientôt. Vous allez tous mourir.

— Descendez Sarouman, et votre vie sera épargnée.

— Gardez votre pitié et votre clémence, je n'en ai nul besoin. Non, j'ai bien mieux. Je l'ai, elle.

Au même moment, deux orcs surgirent du sol, entraînant avec eux une elfe aux cheveux blancs. Ilona.

— Sarouman ! s'exclama alors Gandalf. Votre bâton est brisé !

À ces mots, le bâton de Sarouman éclata entre ses mains, faisant vaciller le magicien.

— Sarouman, vous étiez dans les secrets de l'ennemi. Dites-nous ce que vous savez.

— Mais je n'ai pas dit mon dernier mot !

Sarouman saisit Ilona par le bras, sortit un poignard d'un repli de sa tunique et le plaqua contre sa gorge. Il la fit avancer jusqu'au bord de la tour, à quelques centimètres du vide.

— Dites-moi Gandalf, vous qui n'hésitez pas à sacrifier tous ceux qui vous sont proches, tous ceux à qui vous manifestez de l'amour, comme le Semi-Homme que vous avez jeté à sa perte, seriez-vous prêt à sacrifier votre propre fille pour obtenir ces informations que désirez tant ?

Sans laisser le temps à son père de répondre, Ilona se dégagea de l'emprise de Sarouman et lui arracha son poignard des mains. Surpris, il ne résista pas et perdit l'équilibre. Au moment de tomber de la tour, il s'agrippa à Ilona, l'entraînant dans sa chute. Alors qu'elle tombait avec lui, elle lui enfonça le poignard dans le bras pour qu'il la lâche et s'éloigna de lui.

En bas, tous les regardaient tomber, pétrifiés. Mais à une dizaine de mètres du sol, Ilona croisa instinctivement les bras et un halo blanc apparut autour d'elle, ralentissant sa chute. Pendant que Sarouman s'empalait sur une des pointes métalliques d'une immense roue, Ilona se posa doucement dans l'eau. Gandalf descendit de cheval, se précipita vers elle et la serra dans ses bras.

— Mais alors, c'est vraiment sa fille ? s'interrogea Théoden.

— Oui. D'ailleurs, moi, je le savais déjà, se vanta Gimli.

Héritage (LOTR)Where stories live. Discover now