45 - Dans les intestins du Stockholm (1/2)

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Les problèmes allaient toujours par deux. Non, par cargo de douze, si on regardait la réalité en face. Au premier abord, ça avait paru si simple de reprendre le contrôle du Stockholm, et voilà que trois gros pépins s'invitaient à la fête ; trois pépins armés jusqu'aux dents qu'il serait difficile de déloger de la salle des machines. En supplément, pour accompagner cette immense part de tartes aux noises, la question du temps était cruciale. D'ici peu, Dubrov et ses hommes allaient comprendre qu'il y avait un souci et ils entreprendraient le nécessaire pour retourner la situation en leur faveur. Ils en avaient les moyens, ils étaient formés à toutes les situations d'urgence envisageables à bord d'un vaisseau spatial.

Côte à côte, Ellie et Seth avaient étudié tout ce qui leur était accessible depuis la console de navigation. Histoire de leur compliquer la tâche, Sargasse avait activé un sous-programme qui ne leur était pas familier, une sécurité accessible uniquement aux représentants de l'autorité pour prendre le contrôle des vaisseaux à leur guise. Malheureusement, leurs connaissances cumulées n'étaient pas suffisantes pour dompter les lignes de code particulièrement absconses. Après tout, l'un comme l'autre ne savait que ce que Luc avait bien voulu leur apprendre. Ils étaient comme des enfants devant un tableau périodique des éléments.

Arrivant très vite à cours d'idées aussi bien que de temps, Seth suggéra qu'ils débloquent l'accès à un unique couloir pour leur permettre de s'introduire dans le secteur de la salle des machines. Il ne parvenait pas à contrôler grand-chose depuis le sous-programme obscur, mais il se pensait en capacité de faire au moins cela. Puisque l'ennemi finirait tôt ou tard par trouver le moyen de venir à eux, il semblait plus judicieux de venir à lui en premier.

Ellie approuva cette proposition. A défaut de pouvoir élaborer un plan « propre » activable depuis le confortable fauteuil du pilote, elle ne voyait pas d'inconvénient à se salir les mains si ça leur permettait de se débarrasser des cafards installés dans leurs murs. Cependant, il ne fallait pas oublier que leurs cafards étaient du genre coriace et qu'ils les dépassaient en nombre. S'ils allaient au contact la fleur au fusil, c'est eux qui se feraient écraser sous de grosses semelles de rangers cirées.

Encore une fois, le Waterloo sut se montrer utile, sans états d'âme pour ses vrais maîtres. Le patrouilleur livra un équipement militaire de qualité aux intrus qui ne se gênèrent pas pour le mettre à sac. Ils y dénichèrent un shocker, plusieurs couteaux de combat et un gilet pare-balles beaucoup trop grand qu'Ellie enfila tout de même par acquit de conscience. Ce moment de préparation se fit dans un calme et un silence empreints de solennité. Ils savaient qu'ils jouaient le tout pour le tout, c'était leur dernier baroud d'honneur ; ils en sortiraient vainqueurs ou vaincus.

Comme Seth l'avait escompté, le déverrouillage d'une porte donnant accès au secteur de la salle des machines était à sa portée. C'était précisément le programme que surveillait Sargasse au moment où il avait été interrompu dans sa tâche. La stratégie dirigea l'attention de l'alien sur une porte en bout de couloir, à l'endroit le plus éloigné de là où se trouvaient Dubrov et ses hommes. Le temps était compté, il fallait se rendre sur place avant que les militaires ne remarquent qu'ils étaient libres de quitter la zone.

Ellie prit la tête de leur petite expédition vers l'arrière du vaisseau, trottant à une allure mesurée. Ils passèrent devant la cellule de Luc, puis devant la chambre froide où le corps de Sargasse tenait maintenant compagnie aux restes des moutons dépecés. Les nombreux secteurs condamnés les obligèrent à emprunter des voies détournées ; ils ne mirent pas moins d'un quart d'heure à atteindre leur destination.

La jeune femme ouvrit la dernière porte sur un long couloir obscur et tendit l'oreille. Elle percevait au loin le bruit des soldats toujours affairés à mettre encore plus de bazar dans la salle des machines, à la recherche d'un albinos imaginaire.

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