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L'une des choses que Mai aimait le plus dans la télé-réalité, c'était qu'elle pouvait en regarder pendant des heures sans se sentir stupide. Le niveau d'intelligence dans ce genre d'émission était si bas que Mai ne ressentait pas son manque d'étude, elle ne se sentait pas inférieure, et elle pouvait à son tour rire des imbécilités qu'elle entendait. Cela avait quelque chose de réconfortant. Alors, lorsqu'elle se sentait mal, elle s'allongeait dans son lit, lançait une télé-réalité au hasard, et restait devant jusqu'à ce qu'elle se sente assez abrutie pour arrêter. En ce moment, elle regardait une télé-réalité américaine, c'étaient toujours les plus amusantes. Elle n'avait pas vraiment compris le but de l'émission, elle savait juste qu'il s'agissait d'une quinzaine de candidats constitués à cinquante pour-cent de plastique, qui étaient enfermés dans une villa de luxe, et qui se disputaient tous les jours pour des choses absurdes. Pour l'instant Jessica se disputait avec Cassie car elle avait embrassé Tyler, alors qu'il était réservé pour Tessa. La dispute prenait de l'ampleur, les cris fusaient dans toute la villa et les répliques étaient de plus en plus cinglantes.
Cela faisait plus d'une heure que Mai était plongée dans cette passionnante dispute. En rentrant chez elle, elle s'était enfermée dans sa salle de bain et était restée dans son bain au moins une heure, si bien que l'eau était devenue froide, et que la mousse avait entièrement disparu. Lorsqu'elle était sortie, elle n'avait pas pris la peine de se sécher les cheveux, mais elle les avait coupés dans un élan de rage, et ils tombaient à présent autour de son visage en boucles indéfinies et irrégulières. Elle ne ressemblait plus à rien, mais cela n'avait pas d'importance. Elle avait ensuite remis ses sous-vêtements bleus, puisqu'elle les avait à peine portés, elle avait ouvert la fenêtre de sa chambre en grand, et s'était allongée dans son lit pour regarder son émission. Sa chambre s'était vite refroidie, la neige n'avait pas tardé à s'engouffrer à travers sa fenêtre. Mai tremblait de froid, mais elle n'y faisait pas attention. Elle espérait bien attraper froid et tomber malade, pour avoir une bonne raison de rester enfermée chez elle et de ne plus voir personne avant plusieurs jours.
Elle avait tellement honte de ce qu'il s'était passé avec Naoya qu'elle n'avait pas osé en parler à ses amies. Elle leur avait simplement envoyé un message pour leur dire qu'Ino n'était pas chez lui, et qu'elle était donc repartie sans lui avoir parlé. Et pour être sûre que ses amies ne viennent pas chez elle pour la réconforter, Mai leur avait dit qu'elle partait voir Kasumi, une autre de ses amies, car elle l'avait croisée en chemin. Les filles n'avaient pas posé plus de questions, et elles avaient fini par partir chacune de leurs côtés. Nobara était avec d'autres amies, Maki était rentrée chez elle pour étudier, et Yuko était partie voir Ryômen pour qu'il lui raconte comment s'était passé l'anniversaire de Megumi. Cela arrangeait Mai, si elles étaient toutes occupées, elles n'allaient pas discuter sur leur groupe commun, et elle n'aurait pas à faire semblant d'aller bien. Quant à Ino... Il l'avait appelée plusieurs fois lorsqu'elle comatait dans son bain, et il l'avait rappelé une heure plus tard, mais elle n'avait pas décroché. Il devait sûrement vouloir lui dire qu'il avait retrouvé Tweedledum, et elle n'avait pas la force d'entendre sa voix.
C'était paradoxal, car il était la seule personne capable de la réconforter en ce moment, mais elle ne pouvait pas lui parler. Entendre les notes graves de sa voix, les sourires dans son intonation, et les mots doux qu'il lui adressait toujours... Entendre cela la ferait un peu plus tomber amoureuse de lui. Cela ne ferait que l'enfoncer, et la rendre plus triste. Elle ne se sentait pas capable de lui parler pour le moment, et puis, mieux valait l'ignorer. Avec un peu de chance, il ne chercherait pas à rester en contact avec elle, et il finirait par l'oublier... C'était le mieux pour eux deux, Ino serait plus heureux avec quelqu'un d'autre. Il n'était pas du genre à passer facilement à autre chose, il n'avait pas voulu laisser Mai après son avortement, mais s'il voyait qu'elle ne s'intéressait plus à lui... Peut-être qu'il partirait ? Il fallait juste lui faire croire que tout allait bien, comme ça il ne se sentirait pas obligé de rester. Oui, c'était ce qu'il y avait de mieux à faire. Il serait plus heureux sans Mai dans sa vie.
Les sentiments qu'il avait pour elle n'étaient pas romantiques de toute manière. C'était purement sexuel, c'était certain... Naoya avait raison, Ino ne pouvait pas avoir de sentiments pour elle. Excepté son physique, il n'y avait rien à aimer chez elle, et c'était justement ce qu'aimait Ino. C'était même la première chose qu'il avait aimée chez elle, il ne l'avait jamais caché. Mai ne représentait rien pour lui, rien d'autre qu'un corps qui l'attirait. Naoya avait raison, ils n'avaient aucun avenir ensemble. Et dire qu'elle avait envisager de lui avouer ses sentiments... C'était une perte de temps, ça ne ferait que la blesser inutilement. Mai avait honte d'avoir cru l'espace d'un instant que quelque chose pouvait se passer entre eux. Elle avait honte d'avoir cru qu'elle en valait la peine, qu'elle était intéressante à ce point, qu'elle pouvait lui apporter quelque chose. Et elle avait encore plus honte de s'être rabaissée à ce qu'elle refusait de faire. Elle avait voulu utiliser son corps pour garder Ino auprès d'elle, et Naoya l'avait compris en la croisant une seule fois. Était-ce si évident qu'elle ne pouvait rien faire sans son physique ? Ino en avait-il conscience lui aussi ? Comprenait-il, à chaque fois qu'il la voyait arriver dans de belles tenues, que c'était son seul moyen de le savoir ? Pensait-il lui aussi qu'elle n'était douée qu'à coucher avec lui ?
Une part de Mai savait que non, il n'était pas comme cela. Mais une autre part d'elle était persuadée qu'au fond, tout au fond de lui, il ne pouvait s'empêcher de penser que son seul talent était de coucher avec lui. Et elle avait tellement honte de cela... Elle voudrait seulement être plus que ça... Mais elle n'en était pas capable, elle n'avait aucune valeur. Elle était aussi vide que les émissions qu'elle regardait, c'était peut-être pour cela qu'elle les aimait tant...
Une notification apparut sur l'écran de sa tablette, tirant Mai de ses pensées, et elle remonta ses lunettes sur son nez pour la lire correctement. C'était un message d'Ino. « Je suis devant chez toi, ouvre moi ». Mai effaça le message sans y répondre. Entre voir Ino maintenant et faire la morte, elle préférait faire la morte. Elle avait trop honte pour le voir, elle n'était pas capable d'affronter son regard. Elle n'était même pas capable d'affronter son propre regard. Elle se sentait tellement faible qu'elle en venait à se détester. Elle avait été impuissante face à Naoya, elle l'avait laissé la toucher et l'intimider, comment pouvait-elle continuer de se regarder dans un miroir ?
Une seconde notification apparut, encore d'Ino. « Je sais que t'es chez toi ». Mai efface une nouvelle fois le message, en priant pour qu'il lâche l'affaire et rentre chez lui, mais une nouvelle notification apparut. « Si tu m'ouvres pas je passe par la fenêtre ». Mai haussa les sourcils et mit son téléphone en mode avion. Passer par la fenêtre, bien sûr. Ino tenait à ce point à lui parler de ses chats ? Ou bien venait-il la voir parce qu'il savait que Naoya lui avait parlé ? Non, c'était impossible, la jeune femme avait dit qu'elle ne lui dirait rien. Il voulait sûrement savoir comment elle allait. Oui, c'était probablement ça. Il lui envoyait des messages tous les jours et elle ne lui avait pas répondu aujourd'hui, alors il devait s'inquiéter. Elle devrait peut-être lui envoyer un message pour le faire partir. Mai retira alors le mode avion de son téléphone, et tapa rapidement un message à Ino. « Je suis pas chez moi ». Elle n'eut aucune réponse. Tant pis, Ino avait dû partir.
Mais soudain, quelque chose bougea dans le champ de vision de Mai, et elle remarqua que des mains étaient posées sur le rebord de sa fenêtre. Elle poussa un cri de peur et se redressa en saisissant machinalement son oreiller pour se défendre, alors que la tête, puis les épaules et le torse d'Ino, apparaissaient. Il se hissa sans difficulté sur le rebord de sa fenêtre, et essuya ses mains comme si de rien était.
— Qu'est-ce que tu fais ! s'écria Mai avec incrédulité.
— Je t'ai dit que j'allais passer par la fenêtre, répliqua Ino en rentrant dans sa chambre, avant de refermer la fenêtre derrière lui.
— J'habite au cinquième étage, t'es complètement fou ! cria Mai en lui lançant son oreiller. T'aurais pu te tuer !
— C'est mon métier de faire ça, c'était pas dangereux ! dit Ino en esquivant son oreiller. Mai j'étais super inquiet pour toi !
— C'est pas une raison pour entrer chez moi comme ça, j'aurais pu être nue !
— Tu répondais pas à mes appels, j'ai cru qu'il t'était arrivé quelque chose !
— Ça voulait juste dire que je voulais pas te parler ! T'es chiant, je voulais rester toute seule, dit Mai d'un air de reproche. 
    Elle évita son regard et retourna sur son lit, pour éteindre son ordinateur et ranger ses lunettes dans son étui. Ino en profita pour retirer son manteau couvert de neige, son bonnet et ses chaussures, avant de s'approcher d'elle et de s'asseoir sur le bord de son lit. Il retira son pull, pour ne garder qu'un t-shirt sur lui, et le tendit à Mai en signe de paix. Mai hésita un instant, mais elle finit par le saisir et le mettre. Il était trop grand pour elle, il tombait sur ses cuisses et ses mains se perdaient dans ses manches, mais cela ne la dérangeait pas. Porter un vêtement d'Ino la rassurait, elle aimait être enveloppée de son odeur. Elle se releva ensuite pour récupérer son oreiller qui traînait par terre, et prit les chaussures et le manteau d'Ino pour les emmener dans son salon et les mettre sur un radiateur. Ino la suivit, et du coin de l'œil, Mai le vit partir dans sa cuisine. Elle l'entendit faire couler de l'eau, avant de brancher quelque chose, sûrement une bouilloire. Il n'avait pas l'air en colère contre elle au moins, c'était déjà cela...
— Qu'est-ce que tu fais ? demanda-t-elle en le rejoignant.
— Du thé, t'as besoin de te réchauffer.
Mai ne répondit pas et croisa les bras sur sa poitrine. Elle s'adossa à son comptoir de cuisine et baissa les yeux, pour ne pas risquer de croiser le regard d'Ino. Le voir la rendait encore plus honteuse de ce qu'il s'était passé, elle était désemparée. Qu'allait penser Ino d'elle ? Elle qui disait toujours qu'elle pouvait se débrouiller seule, qu'elle n'avait besoin de personne... Elle n'avait même pas été capable de se défendre face à Naoya. Elle l'avait laissé prendre le dessus sur elle et lui faire du mal, elle l'avait laissé la faire se sentir inférieure, comme lorsqu'elle était enfant et qu'il la rabaissait sans cesse. Elle s'était sentie plus faible que jamais. Son corps s'était enfoncé dans le mur sans qu'elle ne parvienne à s'écarter, ses muscles avaient cessé de lui obéir, et ses larmes avaient brisé la barrière de ses yeux. Naoya l'avait écrasée comme si elle n'était qu'une fourmi sur son chemin... Le pouvoir et la pression qu'il exerçait sur elle étaient effrayants...
Pourquoi n'avait-elle pas réussi à se défendre ? Pourquoi fallait-il que Naoya connaisse aussi bien ses fragilités ? Était-elle faible à ce point ? Elle ne pouvait même pas compter sur son courage ? Était-elle dépendante des autres à ce point ? Naoya avait raison, sans le clan Zenin elle ne serait rien, sans Ino personne ne s'intéresserait à elle, et sans cette fille, elle ne serait peut-être jamais rentrée chez elle. C'était humiliant de réaliser à quel point elle était une incapable...
Le déclic de la bouilloire, annonçant que l'eau était chaude, sortit Mai de ses pensées. Elle regarda Ino faire couler l'eau dans une tasse et mettre un sachet de thé dedans, avant de s'approcher d'elle et lui donner la tasse. Mai la prit et bu une gorgé en gardant les yeux baissés, pour ne pas croiser son regard. Ino fit alors un pas vers elle, pour entrer de force dans son champ de vision, et Mai se recula contre le comptoir. S'il commençait à se coller à elle, elle n'allait pas pouvoir continuer de l'ignorer longtemps...
— Je suis désolé d'être entré par ta fenêtre, dit-il d'une voix plus douce qu'à son arrivée. Je peux m'en aller si tu veux.
— Maintenant que t'es là autant rester, répondit Mai en haussant les épaules.
— Est-ce que je peux te prendre dans mes bras alors ?
Mai haussa de nouveau les épaules, en répondant un simple « Hmm », et Ino se rapprocha d'elle. Il l'entoura de ses bras et l'enlaça contre son torse, pressant sa tête contre sa poitrine. Mai n'eut pas la force de le repousser, alors elle laissa tomber ses bras près de son corps, et posa la joue sur son t-shirt. Son cœur battait si fort qu'elle le sentait à travers le tissu épais de ses vêtements, et sa poitrine se soulevait plus vite que d'habitude. La chaleur qui se dégageait de lui enveloppa Mai et réchauffa son corps glacé, bien plus que ne l'avait fait le thé qu'elle avait bu. Sentir sa peau chaude contre la sienne, et son souffle qui tombait sur son visage avait le même effet qu'un feu en forêt en plein hiver. Il avait dû courir pour venir ici, et s'il était allé jusqu'à escalader son immeuble pour la voir, c'était qu'il était inquiet...
Il savait. Il savait ce qu'il s'était passé, sinon il ne réagirait pas ainsi. La jeune femme qui lui avait rapporté Tweedledum avait dû lui parler, ou bien il avait senti que quelque chose clochait. Mai ferma les yeux avec honte alors que ses épaules s'affaissaient, et se mordit les lèvres pour ne pas pleurer. Comme s'il avait senti qu'elle ne se sentait pas bien, Ino resserra son étreinte autour d'elle, et baissa son visage vers elle pour déposer un baiser sur ses cheveux.
— Qu'est-ce qu'il s'est passé ? demanda-t-il à voix basse.
— Rien, j'étais juste fatiguée donc j'ai pas répondu à mes messages aujourd'hui...
— Je parle pas de ça, je sais que t'as vu Naoya. Je sais que c'est toi qui as retrouvé Tweedle, et je sais que Naoya était avec toi et qu'il t'a fait quelque chose. Qu'est-ce qu'il t'a dit ?
— Rien d'important, dit Mai après quelques secondes d'hésitation. Il voulait juste un peu discuter.
— Il avait besoin de te plaquer contre un mur pour te parler ?
— C'était rien. Il le fait tout le temps. Ça m'a rien fait, je m'en fiche, dit Mai dans un souffle.
— Mai, dit Ino en prenant son visage entre ses mains. Qu'est-ce qu'il t'a dit ?
— Rien..., murmura Mai en continuant d'éviter son regard.
Ino leva davantage son visage vers lui, et l'obligea à le regarder dans les yeux. Mai déglutit difficilement et plongea son regard dans le sien. Ses iris bruns étaient plus sombres que d'habitude, les lumières jaunes qui brillaient toujours dedans avaient disparu, et des ombres pleines de désir de vengeance étiraient ses pupilles. Il n'avait jamais regardé Mai de cette manière, avec une douce fureur qui grandissait dans son regard. Cela avait quelque chose d'inquiétant, comme si une tempête qui se préparait depuis des jours allait éclater. Mai savait que sa colère n'était pas dirigée contre elle, mais elle ne pouvait pas s'empêcher de se sentir coupable. 
Toute cette histoire était de sa faute, si elle avait tout de suite repoussé Naoya, il ne l'aurait jamais entraîné dans cette rue, elle aurait elle-même rendu son chat à Ino, et tout irait bien entre eux. Mais maintenant... Ino n'allait pas la laisser tranquille avant de savoir ce qu'il s'était passé avec Naoya et lorsqu'il l'apprendrait... Il risquait de très mal réagir, Mai n'était pas prête à voir cela. Elle s'imaginait très bien lui expliquer la situation, les larmes aux yeux, le cœur battant à toute allure. Et alors, un silence s'installerait entre eux, et Ino finirait par détourner les yeux, embarrassé que Naoya lui ait dit la vérité. Car lui aussi savait que Mai n'était douée que pour le sexe, c'était d'ailleurs pour cela qu'ils le faisaient autant, parce qu'ils ne pouvaient rien faire d'autre. Il tenterait alors de lui expliquer qu'il n'avait jamais caché qu'il voulait seulement coucher avec elle, que leur relation ne reposait que sur le sexe, qu'ils étaient trop différents de toute façon. Il lui dirait que c'était mieux qu'ils ne s'attachent pas, et puis que Naoya avait raison, elle n'avait pas de vie stable, elle ne pouvait pas rester maquilleuse toute sa vie, elle n'avait même pas de diplômes, elle ne savait même pas cuisiner, et elle ne voulait pas d'enfant...
Il ne le dirait pas de manière agressive, non, il le dirait d'une voix douce, avec un regard désolé. Il la consolerait, il la rassurerait, il ferait en sorte qu'elle ne se sente pas mal, il l'aiderait à se reprendre en main, et il lui dirait qu'il voulait toujours d'elle. Mai n'était pas prête à entendre cela, elle ne voulait pas qu'Ino baisse dans son estime. Même si cela signifiait qu'elle se voilait la face, elle préférait garder l'image positive qu'elle avait de lui, et penser qu'il avait un minimum d'estime pour elle.
— Mai, répéta Ino en s'approchant un peu plus d'elle. Qu'est-ce qu'il t'a dit ?
— Il m'a juste demandé de revenir au clan, c'était vraiment pas important, répondit Mai en l'obligeant à lâcher son visage, pour reposer sa tête sur sa poitrine.
— Je te crois pas, répondit Ino en caressant ses cheveux. Qu'est-ce qu'il a dit ? Il s'en est pris en toi ? Il t'a fait quelque chose ?
— Bien sûr que non, il m'a rien fait il a juste... Il a...
— Il t'as fait du mal ?
— Non !
— Il t'a touché, insista Ino, le regard de plus en plus noir.
— C'est mon cousin, il me ferait rien comme ça.
— La fille qui m'a rapporté Tweedle m'a dit qu'il arrêtait pas de te coller, qu'il te tenait par la taille et que tu voulais qu'il te lâche, alors s'il t'a fait du mal, j'ai besoin de le savoir. Je te jugerai pas Mai, je veux juste que tu ailles bien. Je sais que tu vas mal, t'as pas besoin de faire semblant avec moi.
Une larme échappa à Mai sans qu'elle ne puisse la retenir, elle tomba sur l'arête de son nez, et disparut sur le t-shirt d'Ino. Elle ferma aussitôt les yeux pour tenter de retenir ses larmes, et se mordit les lèvres avec violence, en respirant calmement. Ce n'était pas le moment de pleurer, elle ne pouvait pas fondre en larmes dans les bras d'Ino. Son cœur battait de nouveau à tout rompre dans sa poitrine, et elle avait tellement de larmes dans ses yeux qu'une sensation de brûlure déchirait ses iris. Et voilà, maintenant elle était sur le point de pleurer ! Comme si pleurer réglerait ses problèmes ! Comme si cela changerait la situation ! Elle était ridicule ! Quel âge avait-elle pour agir comme ça ? Elle pleurnichait comme une enfant, sérieusement ! Ino avait passé l'âge de l'écouter pleurer pour des histoires aussi futiles ! Elle était vraiment ridicule.
— Mai, je suis pas en colère contre toi, je veux juste t'aider, murmura Ino en essuyant sa joue avec son pouce. Si tu veux pas me parler, dis-le-moi, je comprendrai. Je veux juste que tu saches que tu peux compter sur moi. Je te dis pas que je peux régler tes problèmes et faire disparaître Naoya, même si j'en ai très envie, mais je peux au moins t'écouter et te rassurer. Je sais pas ce qu'il t'a dit, ni ce qu'il t'a fait, mais moi je suis là pour toi et si tu as besoin, tu peux m'en parler.
— Qu'est-ce que ça peut te faire ce qu'il m'a dit ? répondit Mai avec un reniflement.
— T'es importante pour moi et si t'as un problème, je veux être là pour t'aider.
— C'est mon problème, c'est pas à toi de t'occuper de ça...
— Mai, t'es pas n'importe qui pour moi. J'ai rien de mieux à faire que de t'écouter, alors parle-moi. Pourquoi tu veux pas le dire ?
— C'est juste que... Il m'a fait un discours sexiste et misogyne, comme d'habitude...
— Comment ça ?
— Il m'a dit que j'étais habillée comme une pute et que j'étais qu'un trou dans lequel tu te vidais, murmura Mai, les yeux remplis de larmes.
— Quoi ? répondit Ino, sa main s'immobilisant sur sa joue. 
— Il m'a dit que tu ressentais rien pour moi et que tu me voyais juste pour coucher avec moi. Il m'a dit que je valais rien, que je savais juste coucher. Il a dit que j'étais une incapable, que je me respectais pas et que j'avais rien à t'apporter. Il sait pour nous deux et il sait que j'ai avorté, e-et il voulait que je retourne chez les Zenin parce que j'étais bonne qu'à faire des enfants. Il voulait me trouver un mari pour que j'aie des enfants avec lui, parce qu'il pense que je m'en sortirais pas seule, parce que personne veut de moi et que j'ai que mon physique sur lequel compter...
— Mai...
— Il pensait que tu me payais pour coucher avec toi, et...E-et il a commencé à me toucher le ventre en disant que j'avais tué mon bébé et... Et... Il voulait savoir ce que tu me faisais, si j'aimais ton sperme... Il m'a demandé combien de doigts tu me mettais, e-et...
— Quoi ? s'exclama Ino d'un ton menaçant.
— C'est humiliant, renifla Mai en passant ses bras autour de sa taille. Je me sens faible, j'ai pas réussi à le repousser... Je me suis jamais sentie aussi mal de toute ma vie, j'ai l'impression de plus être moi-même et j'ai honte de pas réussir à être celle que je veux être. Et j'ai honte d'avoir cru que quelqu'un pouvait s'intéresser à moi alors que je suis vide, si j'étais pas belle t'aurais même pas fait attention à moi... Naoya a raison, la seule chose que je suis capable de faire, c'est faire des enfants...
Sa voix se brisa sous le coup de l'émotion, et Ino ne répondit pas. Sa main était toujours immobile sur sa joue, tout son corps était figé, il avait cessé de la bercer. Mai entendait que le rythme de son cœur s'était accéléré, sa respiration était plus forte, ses muscles s'étaient contractés. Sa colère était palpable, Mai pouvait presque sentir l'orage qui grandissait en lui. Ne pas avoir de réponse était pire que ce qu'elle avait imaginé, c'était terriblement angoissant. Était-il en colère pour le comportement de Naoya, ou était-il en colère parce que Mai savait qu'il ne ressentait rien pour elle ?
Le silence entre eux se prolongea un moment, sans que Mai n'ose demander à Ino ce qu'il pensait. Mais après d'interminable minute d'angoisse, il finit par respirer longuement, et reprit ses caresses avec des gestes doux.
— Mai, t'es pas juste un corps. T'es bien plus que ça, c'est juste que tu t'en rends pas compte et que Naoya se sert de ça pour te faire du mal.
— Non, je sais rien faire, j'ai aucune valeur, hoqueta Mai. Je sais rien faire, j'ai même pas de diplôme, et j'ai un caractère horrible, personne ne voudra de moi, Naoya a raison, sans les Zenin je suis rien.
— Je veux pas que tu dises ça, c'est complètement faux. Un diplôme détermine pas ta valeur, tes études ne reflètent pas qui tu es. Regarde, Naoya est diplômé des plus grandes écoles de Tokyo, et pourtant c'est un véritable connard. Tu peux pas laisser les paroles de quelqu'un comme lui t'atteindre, il en vaut pas la peine. Une personne aussi pitoyable que lui mérite pas ton attention. Il est irrespectueux, pervers et presque incestueux, ce qu'il dit n'a aucun crédit. Il t'a dit ça pour te faire du mal, mais c'est faux, et tu dois pas le laisser t'atteindre comme ça. Il a pas le droit de te parler comme ça, de t'emmener quelque part, de te plaquer contre un mur, et de t'intimider comme ça. C'est déguelasse de faire ça, dans tous les sens du terme. C'est ton cousin, il a pas à te toucher le ventre et à te demander comment je te doigte, et aucun homme n'a à te demander ça. Tu peux pas laisser un homme comme ça te blesser, tu vaux bien plus que ça.
— J'en suis pas sûre, murmura Mai.
— T'es une femme incroyable Mai, ce qu'à dit Naoya c'était pour te blesser, c'est tout. 
— Je vois pas en quoi je suis incroyable...
— Parce que tu te concentres sur les choses que tu n'as pas et que Naoya exige pour une femme, il te force à te voir comme si tu ne valais rien.
— Mais je sais rien faire, dit Mai en battant des cils.
— Tu sais faire plein de choses, t'es juste trop dur avec toi-même. T'as pas besoin d'en faire des tonnes pour être exceptionnelle, t'es juste toi-même, et c'est ça que j'aime chez toi.
— Tu dis ça parce que quand je te vois je mets toujours une heure à me préparer pour être belle.
— Peut-être, mais c'est aussi ça qui fait que tu es toi. Je te trouve belle avec du maquillage et de beaux vêtements, et je te trouve belle le matin, quand tu viens de te réveiller, et que tu es au naturel. C'est vrai, t'es belle, et je peux pas nier que c'est la première chose qui m'a attiré chez toi quand je t'ai vu dans ce bar. Mais t'es bien plus que ça Mai... T'es intelligente, même si t'as pas de diplôme. T'as du caractère, et c'est quelque chose que j'ai tout de suite aimé chez toi, même quand on se connaissait pas. J'aimais comment tu étais sur le groupe la manière dont tu me parlais, le fait que t'as pas peur de dire ce que tu penses... Et tu te laisses pas faire, t'es forte, même si t'as parfois besoin d'aide, t'es vraiment forte, et j'ai jamais eu l'impression que t'avais besoin de moi pour quoi que ce soit. Et puis t'es toujours là quand on a besoin de toi, t'es une super amie pour les filles, et avec moi t'es super aussi. Tu m'as aidé à chercher Tweedle, t'as réglé mes problèmes de photos, et toi aussi tu fais attention à ceux que t'aimes, à ta manière. Et crois-moi, on est beaucoup à t'aimer comme tu es, et n'importe quel homme aurait envie de t'avoir dans sa vie.
— Y'en a pas beaucoup qui me demande pourtant, t'es le seul à coller, répondit Mai en essuya ses larmes avec sa manche.
— Si, c'est juste que je monopolise ton attention avec ma beauté alors tu les remarques pas. Mais je peux que te comprendre, ma beauté éclipse les autres.
— T'es bête, dit Mai avec un sourire.
— Et toi t'es belle même quand tu pleures, répondit Ino.
Il releva son visage vers elle et passa ses pouces sur ses joues. Son regard s'était radouci, il n'y avait plus une ombre de colère dedans, les couleurs de ses iris étaient plus claires. Mai le regarda longuement sans savoir quoi faire, ses yeux ne pouvaient pas s'empêcher de descendre sur ses lèvres. Elle mourrait d'envie de poser ses lèvres sur les siennes, oublier tout ce qu'il lui était arrivé, ne plus jamais lâcher Ino et se perdre dans ses baisers. Mais elle ne pouvait pas faire cela, elle devait arrêter de se jeter dans ses bras dès qu'elle le pouvait. Si Ino ne l'aimait pas, rester à ses côtés ne ferait que la blesser, et elle ne savait pas si elle pouvait supporter cela encore longtemps. Ne serait-ce que pas jalousie, elle ne serait pas capable de se contenter de sexe avec Ino, et de le voir passer ses journées avec d'autres filles.
Devait-elle lui dire qu'elle l'aimait ? Ou bien devait-elle simplement dire qu'elle ne voulait plus le voir ? Non, elle n'en n'était pas capable, elle ne pouvait pas le perdre. Mais alors que faire ? Elle ne pouvait pas rester dans cette situation avec lui.
— Pourquoi t'es comme ça avec moi ? finit-elle par demander.
— T'as pas une petite idée ? demanda Ino avec un sourire.
— Parce que t'es gentil avec tout le monde ? Mais delà à venir chez moi dès que je te réponds pas, c'est un peu excessif.
— Je suis pas juste gentil, je suis amoureux de toi, dit Ino en riant.
— Qu'est-ce que tu racontes ? répondit Mai sans comprendre.
— Me dis pas que tu t'en étais pas rendu compte, dit Ino avec surprise.
— Quoi ? Non, t'es pas amoureux de moi.
— Si, je suis amoureux de toi, et tu m'aimes aussi.
— Je... Je vois pas pourquoi tu dis ça.
— Vraiment ?
— Oui, vraiment. Je suis pas... Amoureuse... De toi.
— Tu fais exactement la même tête que quand tu mens, se moqua Ino. Mai, on est tout le temps ensemble, on se parle le matin et la nuit par message, on fait des date ensemble, on couche ensemble, on voit personne à côté, et en plus les filles m'ont fait un guet-apens. On est limite déjà ensemble.
— Pas du tout, je... Je suis pas amoureuse ! On est juste... On est sexfriends, c'est ce qu'on avait dit... Et..., bégaya Mai en reculant contre la table.
    — Tu portes mes vêtements, on se tient la main dans la rue, on dort l'un chez l'autre. On est ensemble Mai ! Je suis amoureux de toi, tu peux me dire que tu m'aimes aussi !
    — Je- C'est pas une raison, ça veut juste dire qu'on s'aime bien !
    — Megumir c'est vraiment de famille en fait, c'est dingue. Je vais appeler Ryômen pour savoir comment il a fait pour convaincre Megumi qu'il l'aimait.
    — Mais ça n'a rien à voir, je megumis pas, c'est la vérité ! T'es pas amoureux de moi, t'as dit que tu voulais rester celui avec qui je couche ! s'exclama Mai.
    — Je l'ai dit après que t'aies avorté, quand tu voulais pas de moi ! Mais maintenant c'est plus pareil, Mai je ferais pas autant de choses pour toi si je t'aimais pas ! Je suis gentil mais il y a des limites quand même !
    — Oui mais... Mais...
    — Bon ok on est pas ensemble, dit Ino en sortant son téléphone de sa poche.
    — Qu'est-ce que tu fais ?
    — Je me réinscris sur Tinder, c'est pas mon truc de rester célibataire.
    — Quoi ? Non ! s'écria Mai en lui prenant son téléphone des mains.
    — Tu vois !
    — Tu peux pas coucher avec moi et être sur une appli de rencontre, tu m'as dit qu'on avait une relation exclusive !
    — Oui, ce qui équivaut à un couple ! répliqua Ino en s'écartant d'elle pour sortir de la cuisine.
    — Qu'est-ce que tu fais, questionna Mai en le suivant.
    — Je vais te montrer qu'on est pas juste sexfriends. Regarde. J'ai ma brosse à dents dans ta salle de bain, j'ai une serviette pour moi, dit Ino en lui montrant rapidement ses affaires dans sa salle de bain, avant de partir dans sa chambre. Ça c'est mon chargeur, ça c'est ma casquette. Dans ton armoire j'ai au moins deux pulls que tu m'as volés, j'ai un pantalon, et j'ai des caleçons. Et je tiens à te faire remarquer que je suis le seul à avoir des affaires chez toi, il y a pas celles des filles par exemple.
Ino fouilla dans son armoire, alors que Mai croisait les bras sur sa poitrine, sans savoir comment réagir. Était-ce si évident que cela ?! Elle pensait qu'Ino ne voulait pas aller plus loin dans leur relation ! Depuis quand l'aimait-il ? Pourquoi n'avait-elle rien vu ! Depuis quand savait-il qu'elle l'aimait ?
— T'as porté ça pour notre premier rendez-vous, dit Ino en sortant une tenue de son armoire. Ça tu l'avais au cinéma, ça c'était au restaurant, ça c'est les sous-vêtements que t'avais quand t'es venue sans rien d'autre chez moi... C'est des tenues de date ça !
— Et depuis quand on est ensemble ? demanda Mai en haussant un sourcil.
— On a commencé à se comporter comme un couple un peu avant de danser ensemble, mais je dirais que c'est surtout depuis le cinéma que c'est concret, dit Ino en se rapprochant d'elle jusqu'à l'obliger à lever la tête vers elle.
— Tu supporteras pas de sortir avec une fille comme moi, répliqua Mai d'un ton catégorique.
— On parie ?
— ... Non c'est bon.
— Tu penses toujours que je t'aime pas ? demanda Ino, en la prenant par la taille pour la rapprocher de lui.
— Je sais pas. J'ai besoin de preuves, répondit Mai avec un regard perçant.
— Tu veux que je te fasse l'amour comme à ma petite amie ?
— Parce que ça change quelque chose ?
— Oui. Quand tu couches avec ton copain c'est mille fois mieux que quand tu couches avec un sexfriends, parce que là il y aura des sentiments, et ça te fera encore plus de bien. T'as pas envie d'essayer ? demanda Ino en glissant ses mains sous son pull pour les poser sur ses fesses, et l'attirer un peu plus contre lui.
— Je sais pas, donne moi envie d'essayer, répondit Mai en plongeant son regard dans le sien.
— Alors je peux t'embrasser ? demanda Ino.
— Seulement si tu le fais bien et que tu me donnes envie de sortir avec toi.

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