B5. Odieuse manipulation

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Point de vue de Mme Barnes

La nouvelle planque dans laquelle ils nous ont emmenés est d'un standing plus élevé. Elle fait même très pro. En revanche, l'animation se limite aux visites déplaisantes du moustachu. La notion du temps commence quant à elle à me faire défaut. Je suis incapable de dire si nous sommes ici depuis plusieurs heures ou plusieurs jours.

J'ai réussi à négocier une courte balade à l'extérieur de la sorte de suite qui nous sert de cellule. Mon petit garçon reste accroché à ma main, mais au moins il se dégourdit les jambes. Heureusement qu'il n'est pas d'humeur aventureuse. J'ai déjà du mal à le retenir en temps normal, alors ce ne sont pas mes heures de sommeil en moins qui me viendraient en aide s'il lui prenait l'envie d'aller explorer les couloirs.

Je saisis l'occasion pour découvrir davantage les lieux, tout en essayant d'obtenir des informations de la part de nos geôliers. Mais ceux-ci se contentent de plaisanter entre eux en russe. J'aurais peut-être dû demander des cours à Bucky dans ce domaine là aussi. Un sourire m'échappe quand je pense à la tête qu'il ferait face à une telle requête.

« Vous semblez apprécier la compagnie. À moins que ce ne soit la déco. En tout cas, je suis ravi de voir que vous vous plaisez ici. »

J'ai la désagréable surprise de voir venir à notre rencontre le commanditaire de notre kidnapping. Je lui serais gré de s'occuper de gérer son business douteux et sa moustache plutôt que de s'intéresser à nous. Je ne réponds pas et me contente de le fusiller du regard.

« Vous savez, c'est la première fois que je fais dans l'enlèvement. On va dire que le trafic de femmes ne comptait pas vraiment. Je ne pensais pas que ça pouvait être aussi plaisant. En fait, nous sommes un peu comme des colocataires. Nous pourrions sympathiser, ça rendrait votre séjour parmi nous encore plus agréable.

— Vous menacez mon mari de la plus pitoyable des manières, alors n'attendez aucune sympathie de ma part.

— Quel délicieux caractère. Je comprends ce que son mari lui trouve, commente-t-il à l'attention des hommes qui m'entourent. Je dois reconnaître qu'il a bon goût. »

La gifle part sans qu'il ait le temps de l'arrêter. J'aurais apprécié qu'elle laisse une marque sur sa joue. Il la frotte en esquissant un sourire amusé. Je suis tentée de lui en mettre une deuxième, mais les molosses ont saisi mes bras.

« Ne me touchez pas, protesté-je en essayant de me dégager.

— Il n'est pas là, vous savez. Il vous laisse à votre triste sort pour accomplir mes basses besognes. Je suis bien plus loyal que lui. Si vous souhaitez vous divertir, il n'en saura rien.

— Ne me parlez pas de loyauté. Vous n'obtiendrez rien de moi. Vous êtes répugnant !

— Mec, y a un appel pour toi, l'informe l'un de ses hommes avec étonnamment peu de formalité en lui apportant mon portable.

— Nous n'en avons pas fini, on se voit plus tard, dit-il avant de coller le téléphone à son oreille en m'adressant un clin d'œil. Oh, tiens, quelle heureuse surprise ! J'étais justement dans une conversation passionnante avec votre femme. Elle a beaucoup d'esprit, vous savez. Et ses mains... Voyons, nul besoin d'être aussi grossier. Je vous ai dit qu'elle était entre de bonnes mains. Les miennes, en l'occurrence. Où en est votre mission ? Je ne suis pas réputé pour ma patience. »

Le désagréable personnage s'éloigne pour poursuivre sa conversation et fait signe à ses hommes de nous reconduire à notre cellule. Provoquer Bucky ainsi va finir par lui retomber dessus, il ne devrait pas jouer à ça.

De retour dans la chambre, je m'assois sur l'unique lit et m'adosse contre le mur. Mon petit garçon grimpe sur mes genoux pour jouer avec la chaîne de son père qui pend autour de mon cou. Je ne m'attendais pas à ce qu'il me la confie, lui qui ne s'en sépare jamais. Il a aussi pensé à emporter l'irremplaçable doudou et un sac d'affaires malgré la précipitation dans laquelle il a dû quitter la maison. Même si j'en étais persuadée avant même de l'épouser, il me montre chaque jour à quel point il est un père exceptionnel.

Au risque de t'aimer | Bucky BarnesWhere stories live. Discover now