33. Etrange rapprochement.

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Noemie

Je ne m'attendais pas à une soirée comme celle que je viens de vivre. Dire que j'ai été traumatisée est un euphémisme. C'est bien pour cela que je suis dans un jet privé nous ramenant à la maison, sur les genoux de Victor, blottie dans ses bras, tremblante comme une feuille. Au début, son cœur battait fort et bruyamment, mais au fil du temps, ses battements sont revenus à la normale. Malgré tout, je reste agrippée à la chemise tachée de sang qu'il n'a pas pu retirer, car dès qu'il s'éloigne de moi, je me mets à pleurer comme une madeleine sans pouvoir m'arrêter. Ben est quelque part dans l'avion également, mais même lui n'a pas réussi à me calmer. Il semble de toute façon complètement ailleurs, il a perdu de son mordant et de sa gaieté. Je ne fais plus partie de ses priorités. Je ne sais pas ce qu'il a, et cela m'inquiète, je vais essayer de lui tirer les vers du nez, mais pour le moment, je n'ai pas la force de m'en occuper. J'agis égoïstement, mais je n'ai plus d'énergie. J'ai l'impression d'avoir été complètement vidée. Je repense aux phrases plus qu'énigmatiques que le père d'Aly m'a adressées. Que voulait-il dire par nous sommes « faites du même sang » ? Cet échange était plus qu'étrange et je n'arrive pas à m'expliquer ce que j'ai ressenti en voyant cet homme. Mes émotions se bousculent, se mélangent et forment un chaos dans ma tête. Ce qui me soulage dans un sens, c'est de savoir enfin qui se cache derrière ces messages, d'abord douteux, puis bienveillants envers notre mission et surtout envers Aly. Elle est le cœur de tout : le lien entre toutes les personnes que nous rencontrons et nous-mêmes.

— Noé... il faudrait que je me change... je suis... plein de sang... tu ne peux rester la tête posée dessus ça me rend malade.

— Tu ne peux pas...

— Je m'absente que quelques secondes. Je promets de faire le plus vite possible.

— Tu ne peux pas...

— Noé...

Je resserre une fois de plus les poings sur sa chemise et ne lâche rien.

— Emmène-moi avec toi, alors !

— Quoi ? Sous la douche ?

Il semble choqué par ma suggestion, mais pour moi, il n'y a rien de sexuel. C'est juste une question de survie. Il est mon repère, mon souffle dans toute cette folie. Sans lui, j'ai l'impression de perdre la tête et mon esprit rejoue encore et encore la scène dont je viens d'être témoin. Je sais dans quel monde je vis, mais je n'ai jamais été témoin de toute cette violence qui l'habite et c'était très bien ainsi.

— Dans la salle de bain. Je ne regarderais pas promis, mais ne me laisse pas s'il te plaît, ne m'abandonne pas !

— D'accord !

Victor

Voir Noemie dans un tel état de détresse, me vrille les entrailles. Je ne sais pas quoi faire pour la réconforter hormis la serrer fort contre moi. Ce qui a l'air de la calmer. Je devrais être fier qu'elle recherche mes bras, plutôt que ceux de Ben. Mais elle est tellement... brisée... que je ne peux même pas en profiter. Son beau visage ne doit plus être contre le sang de nos ennemis. Alors je me lève avec ma beauté dans les bras et me dirige vers la salle de bain. Je passe près de Ben, mais il reste le regard rivé sur l'extérieur. Sa jambe s'agite de bas en haut, signe de stress, mais qu'est ce qui lui arrive à celui-là encore ?! Et pourquoi ne prend-il pas soin de Noemie ?! J'avais raison lorsque je disais qu'il ne la méritait pas ! Il le prouve une fois de plus ! Bon, c'est sûrement ma jalousie qui parle pour moi. Bien que cela arrange mes affaires, je ne le comprends pas. J'ai l'impression que rien ne va dans cet avion. J'entre dans la petite cabine d'eau et referme la porte derrière nous. Noemie se laisse glisser au sol et s'installe dans un coin de la salle de bain, dos à la douche. Ce petit moment d'intimité me fait sourire. J'ai longtemps attendu cet instant, mais il arrive de manière complètement loufoque. Nous ne faisons rien correctement, elle et moi. La voir dans ce petit coin recroquevillée sur elle-même me déstabilise. Elle est vraiment au plus mal.

Destin souffléWhere stories live. Discover now