Quatrième partie

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« Tout a dégénéré. La situation m'échappe. Je perds le contrôle. Je l'aime à en crever. »


Point de vue d'Hailey

Je suis de nouveau dans ma cellule. Seule. Quand il est revenu à la voiture et qu'il a voulu me bander les yeux, je lui ai pris le foulard des mains et je l'ai fait moi-même. J'ignore pourquoi j'ai fait ça, mais je l'ai fait. Il ne m'a pas attaché les poignets comme à l'aller. Peut-être qu'il a oublié. Je ne sais pas. J'aurais pu à tout moment me libérer les yeux et regarder dehors, appeler à l'aide, essayer d'ouvrir la portière ou même tenter de me repérer mais à la place, je me suis allongée sur la banquette, silencieuse. Il n'a pas parlé une seule fois lui non plus. Il n'y avait rien à dire, ou peut-être trop justement. Il sait tout de moi et je voulais en savoir plus sur lui. Je crois que finalement j'aurais préféré ne rien savoir. Au début il n'était qu'un psychopathe dont je ne connaissais ni le prénom, ni le visage. Je n'avais qu'à le détester et avoir peur de lui. C'était facile finalement. Peur et haine. Rien de plus.

Mais maintenant, je ne sais plus.

Ce soir, quand il m'a raconté pour ses parents, j'ai réalisé qu'il ne se résumait pas seulement à un fou qui me retenait prisonnière, il avait eu une vie. Il n'est pas né le jour où il m'a enlevée. Il a vécu avant tout ça. Il a vécu avant moi. Je me demande ce qu'il se serait passé si on s'était rencontrés "avant" justement. Si nous nous étions croisés deux années avant, serions-nous devenus amis ? Ou si nous nous étions bousculés par accident ce jour là au cimetière par exemple... Est-ce qu'on aurait appris ensemble à sourire de nouveau ?

Je chasse toutes ces idées de ma tête. Il devait déjà être probablement fou avant. Je sais que je me mens à moi-même. Ce soir, là où tout le monde aurait vu un malade mental bon à enfermer moi j'ai vu un garçon de 19 ans complètement détruit. Finalement c'est moi qui suis peut-être en train de perdre la tête. Mon esprit s'embrouille encore une fois. J'ai l'impression que je passe mon temps à ça. M'embrouiller. Le fuir et m'embrouiller. M'embrouiller parce que je le fuis. Et voilà je recommence encore.

J'ai dû m'endormir sur le chemin du retour dans la voiture car je me suis réveillée ici, sans lui.

Sans lui.

Ces mots raisonnent étrangement dans ma tête. Je réalise qu'une image n'a pas quitté mes pensées une seule seconde depuis que j'ai ouvert les yeux : Lui à genoux sous la pluie devant cet arbre qu'il a frappé sans relâche pendant ce qui m'a semblé être une éternité.

J'entends le cliquetis de la serrure, la porte s'ouvre et je me mets à trembler, j'ai peur. Je n'ai pas peur de lui mais j'ai peur de le revoir après ce qu'il s'est passé. Il entre, il tient une trousse de premiers secours dans sa main.

- Je dois soigner tes blessures.

Sa voix est froide et distante tout comme son regard, il se referme comme au début, comme quand il avait ce mur de béton autour de lui. Ça ne me plaît pas. Je ne veux pas qu'il s'éloigne de moi comme ça. Je ne veux pas qu'il redevienne comme il était avant. Je fronce les sourcils. Il doit croire que c'est parce que je ne veux pas être soignée car quand il s'approche son regard est plus doux.

- S'il te plaît Hailey, il faut vraiment que je te soigne.

Je regarde mes bras, les bandages sont mouillés et des taches de sang apparaissent un peu partout. J'avais oublié ces blessures mais en les voyant j'ai de nouveau mal. Il a raison, il faut les changer. Je hoche la tête et pour la première fois, il vient s'asseoir sur le matelas à côté de moi. Peut-être qu'il ne s'éloigne pas tant que ça finalement. Je me surprends à m'en sentir soulagée.

ObsessionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant